Chapitre 2 (Réécrit)

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Lyra profita de l'atmosphère chaleureuse du déjeuner pour aborder le sujet de la lettre. Elle avait soigneusement réfléchi à ses mots toute la matinée. Ses arguments étaient imparables. Marie le lui avait assuré et répété. Elle les dirait de manière posée, confiante et avec toute la maturité dont elle était capable.

Monsieur et madame Merryweather étaient déjà attablés, accompagnés des trois grandes sœurs de Lyra : Cassandra, Enora et Obélia.

Sur le pas de la porte qui menait à la salle à manger, la benjamine sentit son cœur battre à tout rompre dans sa poitrine. Pas qu'elle était particulièrement angoissée d'en parler à sa famille. Encore moins à son père. Non, elle ne craignait pas du tout la réaction de son père. En temps normal, c'était un papa poule, qui ne disait jamais non à ses filles. Alors pas de quoi s'inquiéter. Pas du tout...

Elle longea la table jusqu'à son siège, tout en saluant ses sœurs et ses parents.

Bien que particulièrement vigilants sur leur dépense, la table des Merryweather était toujours appétissante et réconfortante. Un faisan dodu et juteux, dernier trophée de chasse du père, trônait fièrement au centre des plats. Des pommes de terre chaudes, des asperges à la vinaigrette et des petits pois aux oignons embaumaient la pièce à vivre. Affamés par leurs nombreuses activités du matin, les Merryweather mangeaient avec appétit.

Pour une telle annonce, Lyra avait fait un effort vestimentaire. La jeune femme avait troqué son habituel pantalon en lin et sa chemise pour une robe lilas, cintrée sous la poitrine. Sa large tresse, coiffée avec adresse par Marie, pendait mollement sur son épaule gauche.

La faim tordait son estomac... ou peut-être était-ce l'inquiétude, finalement.

— Alors ? Tu as eu beaucoup de monde ce matin au marché ? demanda Enora, la deuxième de la fratrie, en sauçant son assiette avec un morceau de pain.

Elle avait déjà avalé son déjeuner. Le plaisir de manger était aussi une caractéristique chez les Merryweather.

D'ordinaire, Lyra se rendait trois fois par semaine en ville pour conter des histoires. En début et en fin de semaine, sa scène était au marché, là où elle savait qu'un grand nombre de personnes se concentrait. Les autres jours de spectacles, elle se baladait un peu, se perchant sur le bord de la fontaine ou déclamant ses contes au centre de la grande place.

La famille de Lyra la soutenait dans son activité de conteuse, d'autant plus que sa popularité grandissait en même temps que son nombre de spectateurs. Depuis que la benjamine avait découvert cette passion, ils aimaient se retrouver le soir pour se blottir dans les canapés du salon et écouter les histoires et les anecdotes de la jeune femme.

— Je n'y suis pas allée, concéda Lyra. J'aimerais vous parler de quelque chose, avoua-t-elle en tordant sa serviette entre ses doigts.

Tous la regardèrent attentivement, n'ayant pas l'habitude d'une Lyra si sérieuse. Elle hésita un instant, contemplant le visage perplexe de sa mère, ceux curieux de ses sœurs et celui soucieux de son père.

— J'ai reçu une lettre du château. Pour le Bal d'Hiver. Je suis invitée par leurs Majestés, en tant que conteuse.

Des exclamations de surprise sortirent de la bouche de madame Merryweather et d'Obélia. Enora lâcha son pain pour féliciter sa sœur, rapidement rejointe par Cassandra.

Lyra rougissait de joie sous les acclamations de sa mère et de ses sœurs. Elle ne lâcha cependant pas son père du regard.

Monsieur Merryweather posa ses couverts, vida son verre de vin d'une traite et s'essuya lentement la bouche.

La Conteuse & le Renard doré - En réécritureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant