— C'est pour ça que j'aimerais que tu gardes un œil sur elle et sur sa famille, ordonna Thelma.
Le Renard et les reines étaient toujours dans sa chambre. Elles s'étaient installées des deux côtés du lit. Et pendant qu'Ellyana lui caressait les cheveux, Thelma s'était remise dans sa position de reine.
— Je ne pense pas que Lyra Merryweather soit capable de trahison, déclara le Renard d'un air sombre.
Le Renard connaissait déjà les antécédents de la famille de Lyra. Bien avant que la conteuse ne lui en parle. Il avait d'ailleurs été le premier réticent à son invitation au Bal d'Hiver, de peur qu'elle n'espionne pour son père et par conséquent pour l'ancien roi. Mais Ellyana avait tellement insister et sa femme ne lui refusant rien, Thelma l'avait finalement convié à la fête.
Puis à force de la croiser, de lui parler, de l'analyser, il avait appris à la connaître. Et il était certain d'une chose. Lyra Merryweather ferait une très mauvaise espionne. Déjà parce qu'elle était trop extravertie, trop bruyante, trop remarquable. Et surtout, parce que tout ce qu'elle pensait se lisait sur son visage. Pas pratique pour cacher ses véritables intentions.
Et voilà que Thelma la suspectait, comme lui au début. Le Renard essaya de mettre toute sa conviction dans ses paroles et dans son regard. Ce fut un échec, Thelma se mit à pouffer de rire. Il faut dire que ce devait être difficile de le prendre au sérieux avec Ellyana qui lui faisait des papouilles.
— Elle, peut-être pas, convint Thelma, de nouveau grave. Mais ce ne serait pas la première fois que son père soit du côté de Childéric. Je préfère m'en assurer.
— Lyra semble être une jeune femme gentille et droite, confia Ellyana. Je ne l'imagine pas comploter contre la couronne. Et puis elle t'admire, ma chérie. Ça se voit dans ses yeux.
— Elle ne ferait jamais ça, insista le Renard, soutenant le regard glacial de sa reine.
Ses jambes avaient besoin de bouger, tout comme son arrière-train, ankylosé après ces derniers jours alité. Il devait se lever ou il exploserait. D'un même mouvement, il fit voler les couvertures et se mit debout. Un vertige le déséquilibra un instant, avant de réussir à s'ancrer dans le sol. Le pas chancelant, il se dirigea vers la commode sur laquelle Lyra avait déposé son masque. D'une main, il le prit et le plaça devant son visage. Le miroir face à lui renvoyait l'image d'un homme à la figure impassible, sans cicatrices, sans fêlures.
— Je suis ravie que tu commences à t'ouvrir aux autres et que tu fasses enfin confiance à quelqu'un, avoua Thelma. Je suis sincère. Mais il est de mon devoir de protéger Ambrume. Et il en va de même pour toi. Le Renard doré. Alors, tu vas la raccompagner chez elle et surveiller les Merryweather.
-§-
Le repas du soir avait été léger. Une soupe de châtaigne, des noix et en dessert du fromage et des nèfles. Les heures étaient passées. Le croissant de la lune souriait aux étoiles et aux somnambules. Et Lyra avait faim. Elle voulait manger du gras et du sucre. Une envie irrésistible. Encore plus irrésistible que de dormir dans ses draps de soie.
Alors, elle se leva, attrapa une couverture en laine qu'elle plaça sur ses épaules et sortit en direction des cuisines. Lyra adorait se promener la nuit. C'était une autre vision du monde. Plus sombre, plus énigmatique, plus mystérieuse. Et les galeries désertes d'un château étaient le décor parfait pour une bonne histoire paranormale. Elle s'imagina être une chasseuse de fantômes à la recherche de l'esprit d'un roi que l'on aurait décapité pour s'être adonné à la magie noire.
Mais l'imagination est parfois trop fertile.
Plus son histoire se construisait dans sa tête, plus elle entendait des complaintes inquiétantes dans le grincement du bois. Elle sentait des frôlements dans les courants d'air. Elle percevait des œillades malveillantes dans les yeux inexpressifs des tableaux.
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La Conteuse & le Renard doré - En réécriture
Roman d'amourSi Lyra Merryweather avait commencé à conter, c'était pour faire rêver les gens. Et aussi un peu pour l'argent... Parce que de l'argent, sa famille en avait besoin. Heureusement, sa réputation grandit jusqu'à atteindre les portes du château de Silv...