Les appartements de Lysandre aux palais de Polaris étaient somptueux. Un peu comme tout le palais lui-même, d'ailleurs. Sculptures gigantesques, tableaux grandioses, statues plus vraies que natures, la demeure de son altesse Jude de Lior n'avait décidément rien à voir avec le château de Silverthrown. Tout y était plus ostentatoire, plus massif, plus intimidant, plus..., plus... Juste plus.
Lyra avait déjà du mal à mentir à un pays entier, maintenant, en plus de ça, elle se sentait minuscule. Son égo en prenait un coup depuis qu'elle avait commencé son nouveau loisir d'espionne. Certains font de la pâtisserie. D'autres se mettent au jardinage. Lyra, elle, devenait une délatrice. Ce n'était pas vraiment ce qu'elle imaginait comme évolution de carrière.
Lysandre avaient fait venir des domestiques pour emmener les affaires de Lyra dans la chambre qui lui avait été allouée. Chambre qu'elle aurait aimé visiter après un si long voyage. Le duc de Lomond en avait décidé autrement. Et pour le bien de sa mission, elle ne pouvait refuser une invitation au thé. Adieu sommeil réparateur dans un lit aux draps de soie.
C'est ainsi que Lyra s'était retrouvée assise sur le sofa du beau Lysandre, une tasse de thé fumante dans la main, les cernes aux yeux et une migraine pointant le bout de son nez. Voilà comment elle allait devoir le séduire... C'était pas gagné.
— J'espère que le voyage n'a pas été trop pesant, s'enquit Lysandre après une gorgée dans sa tasse d'or et de porcelaine.
Même la vaisselle était plus délicate que celle de Silverthrown. Leur rivalité n'avait donc pas de limite ?
— Un peu long, mais je mets cela sur mon envie hâtive de découvrir Aldonya et ses richesses artistiques.
— Je ne peux que vous comprendre, souffla le duc. Bien que j'ai apprécié mon séjour dans votre royaume, je dois avouer que le palais me manquait. Mes appartements, mes petites habitudes...
Lyra prit une gorgée à son tour. Elle réprima une grimace. La boisson manquait de sucre, et de goût. Si seulement Landry était là pour lui servir ce thé dont lui seul avait le secret. Et Madeleine avec ses gaufres. Le duc avait raison, les petites habitudes ont la vie dure, et elle avait déjà le mal du pays.
Ses ongles pianotèrent contre la porcelaine, émettant des cliquetis aigus. Elle devait faire la conversation, mettre son plan à exécution. L'enjôler. Mais une boule se formait au fond de sa gorge. Ses paupières papillonnaient en même temps qu'elles dispersaient ses pensées. Et son esprit refusait de se concentrer sur leur discussion.
— Je vous retiens alors que vous devez être épuisé, je fais un hôte impitoyable.
— Oh, non ! Ne vous en faites pas, je suis ravie de prendre le thé en votre compagnie. J'aurais tout le temps de me reposer cette nuit. Permettez-moi de rester encore avec vous, répliqua-t-elle, une moue de détresse sur les lèvres.
Heureusement qu'elle n'avait pas besoin de réfléchir, les mots sortaient d'eux-mêmes. Maintenant, il fallait juste qu'elle se rappelle ce qu'elle disait.
— J'imagine que vos journées ont dû être plus que mouvementées depuis le soir de notre dernier bal. À Silverthrown, je veux dire. Après tout, vous êtes la sauveuse du célèbre Renard doré. La Cour ambrumienne n'a pas dû vous lâcher d'une semelle.
— Co... Comment le savez-vous ?
Lysandre se mit à rire devant l'air surpris de la conteuse. Il fit danser ses jambes l'une sur l'autre avec grâce. Son sourire en coin fit apparaître sa parfaite fossette. Lysandre de Lomond avait l'aura de ceux qui aiment avoir du pouvoir sur ses interlocuteurs. Lyra reconnut immédiatement le même air fier et suffisant qu'avait emprunté Opale de Lomond lors de leur dernier échange. Pas de doute, il était bien son fils. Ce qui faisait de lui un adversaire aussi séduisant que redoutable.
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La Conteuse & le Renard doré - En réécriture
Roman d'amourSi Lyra Merryweather avait commencé à conter, c'était pour faire rêver les gens. Et aussi un peu pour l'argent... Parce que de l'argent, sa famille en avait besoin. Heureusement, sa réputation grandit jusqu'à atteindre les portes du château de Silv...