La conteuse était adossée contre la rambarde en pierre, en face du Renard doré. Trois autres personnes étaient déjà dehors. Un couple, qui posa à peine un regard sur le chef de la garde à son arrivée, trop occupé à minauder à l'écart de la foule. Et un vieil homme à la bedaine joviale qui sirotait son verre de vin en contemplant la lune.
Les bruits de la fête étaient étouffés par les fenêtres fermées. À l'intérieur de la salle de bal, les invités ressemblaient à des oiseaux colorés, enfermés dans une cage rendue dorée par les lumières chaudes des bougies. Ce qui faisait donc de Lyra et des quatre autres des oiseaux de nuit. Le vieil homme avait une bonne tête de hibou, pensa Lyra amusée.
Elle prit le verre tendu par le Renard et le but d'une traite. L'eau n'était plus fraîche, mais elle avait le mérite de lui redonner un peu de sensation dans la bouche. Entre son spectacle et les diverses conversations qu'elle avait eu, c'est tout un tonneau qu'elle aurait pu boire.
— Merci, dit-elle au garde après s'être éclairci la voix. Mais c'est que vous avez récupéré l'usage de la parole ? plaisanta-t-elle pour l'embêter. Vous ne vous adressiez qu'à Lysandre. J'ai bien cru que vous me faisiez la tête.
Il hocha la tête. C'était difficile de comprendre les émotions derrière sa muraille dorée et sa stature si droite. Il se plaça à côté d'elle, les bras croisés.
— Je suis désolé pour tout à l'heure. Je ne sais pas ce qui m'a pris. Quand je vous ai vu... Je... J'ai... J'avais envie de... Et puis, il est... Enfin... C'est... assez confus, concéda-t-il, avec difficulté, une main derrière la nuque.
— Je vois ça, constata la conteuse.
Elle reporta son attention sur le vieil homme, mais il avait disparu. Tout comme le couple, qu'elle voyait à présent sur la piste de danse, à travers la vitre. Ils n'étaient à présent plus que tous les deux. Cette situation lui rappela la vieille, leur réconciliation à l'écurie et leur virée dans les boutiques. Elle avait encore du mal à cerner l'homme à ses côtés. Il pouvait se montrer gentil et doux. Mais également froid, distant et impoli.
— Il est plus facile de vous parler dans la pénombre, ajouta le chef de la garde.
Lyra ne ressentait même plus la brise glaciale lui chatouiller le dos. Non. Elle ne sentait que ses joues chauffées et embrasées son visage. La conteuse ne savait pas comment interpréter ses paroles, comme beaucoup de fois avec le soldat. Et elle ne comprenait pas non plus la réaction de son corps à cette petite phrase. Une phrase bien trop honnête pour le Renard doré.
— Et alors ? demanda-t-elle d'une façon qu'elle espérait détacher. Que vouliez-vous me dire ? Avez-vous apprécié cette histoire ?
Les épaules du Renard tressautèrent. Au départ, Lyra crut qu'il avait froid ou bien qu'il allait se mettre à rire pour une raison inconnue. Et comme elle ne l'avait jamais entendu rire, elle se demanda quel son sortirait de son masque. Mais son visage factice était tourné vers la Grande Salle, où un attroupement de six personnes lançait des coups d'œil à la recherche de quelqu'un. Lyra en reconnut certains. C'étaient les jeunes gens toujours collés au chef de la garde.
— Oh non, pas eux, souffla-t-il, énervé.
Avant même que l'un d'eux ne tourne la tête dans leur direction, le Renard empoigna la main de Lyra et s'enfuit dans les escaliers de pierre. Ils se dissimulèrent derrière les épais buissons du jardin et passèrent sous des arches végétales, entremêlées de lierres et de fleurs sauvages en forme de trompette blanche.
Le costume noir du Renard doré se fondait à merveille dans l'obscurité de la nuit. Seule sa chevelure rousse perçait le voile sombre dans le champ de vision de Lyra.
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La Conteuse & le Renard doré - En réécriture
RomanceSi Lyra Merryweather avait commencé à conter, c'était pour faire rêver les gens. Et aussi un peu pour l'argent... Parce que de l'argent, sa famille en avait besoin. Heureusement, sa réputation grandit jusqu'à atteindre les portes du château de Silv...