Chapitre 24 (Réécrit)

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Il faisait une de ces chaleurs dans cette voiture.

Malgré l'air frais qui s'y engouffrait, il continuait d'avoir des bouffées de chaleur. Au diable les recommandations du médecin, il aurait dû prendre Stardust. Il aurait au moins pu apprécier le voyage. Pourquoi Rivermoore devait être à deux jours de la capitale ? Et pourquoi un fiacre si petit ?

Il avait dû enlever son masque. C'était trop pour lui. D'autant plus que sa tête recommençait à tourner. Ah, il était beau, le chef de la garde, nauséeux et blanc comme un linge. Pour contrer son mal, il reporta son attention sur ce qui l'entourait. À droite, un mur. En haut, un plafond. Sa respiration s'accéléra. En face, Lyra. Non, ne la fixe pas ! À gauche, une fenêtre. La fenêtre, c'était bien ça !

Des arbres. Un gros rocher. Un chemin de terre.

Lyra.

Le ciel, les nuages, les oiseaux.

Lyra qui le regarde.

Un chemin, entouré d'arbres et de rochers sous un ciel nuageux sans oiseaux.

Lyra qui le regarde et lui sourit.

Cette façon qu'elle avait de le dévisager. C'était comme si elle plongeait au fond de son âme, balayant d'un mouvement de cil le mur qu'il avait érigé toutes ces années. Il détestait ça. Et en même temps, il ne voulait pas que ça s'arrête. Il voulait encore ressentir cette sensation. Celle d'être vu pour la première fois. En tant que Kayden. Non pas en tant que Renard doré.

Ses doigts glissaient sur le métal lisse de son masque. Ça le démangeait de le remettre, afin d'échapper aux iris d'ambre de la conteuse. De retourner se terrer dans son cocon. Au moins là-bas, il faisait sombre et il était protégé. Dans ce petit espace, il était trop exposé. Sa peau le brûlait aux endroits qu'elle fixait.

Et s'il faisait une tête étrange ? Il n'avait plus l'habitude de faire attention à ses expressions. Derrière son mur doré, il pouvait tirer la langue pendant une réunion ennuyante et personne ne le remarquait.

— Monsieur, Mademoiselle Lyra, interpella Alphonse en les rejoignant à la fenêtre. La nuit va bientôt tomber. On va devoir s'arrêter pour dormir. D'après Damien, l'auberge du cochon grillé n'est qu'à quelques kilomètres.

Trop absorbé par ses pensées, le Renard n'avait pas eu le temps de remettre son masque. Lyra a été plus rapide. Pour le confort du voyage, elle avait retiré sa cape en laine et l'avait posée sur ses genoux en guise de couverture. Lorsque Alphonse pointa le bout de son nez, elle jeta la cape sur la tête du Renard, le recouvrant jusqu'aux genoux. Une chose était sûre, le garde n'avait pas vu un centimètre de la peau de son chef.

— C'est parfait, Alphonse, répondit Lyra, un rire dans la voix. On va pouvoir revoir Maximilien ! Dis à Damien que c'est moi qui offre les boissons.

Le Renard ne voyait rien. C'était assez reposant.

— Je suis désolée, Kayden, ria-t-elle. J'ai paniqué.

Il frémissa. Il n'avait pas entendu son prénom dans la bouche d'une autre personne depuis... Depuis très longtemps.

Après quelques secondes, Lyra lui enleva son camouflage. Proche, elle était beaucoup trop proche. Du bout de ses doigts, elle aplatit les épis de ses cheveux roux. Il pouvait sentir le souffle chaud de son souffle sur sa peau. Et le parfum de miel et de lavande qui emplissait ses poumons l'envoûtait. Elle était concentrée. Et lorsque Lyra était concentrée, elle se mordait la lèvre inférieure. Remets la couverture ! hurla-t-il en son for intérieur.

Son calvaire prit fin lorsqu'ils passèrent les portes de l'auberge du géant Maximilien. Une délicieuse odeur de poulet grillé et de patates chaudes fit gronder leur ventre à l'unisson. Des plats plus luisants de gras les uns que les autres cheminaient sur des plateaux d'un bout à l'autre de la salle à manger pour atterrir sur les tables de voyageurs affamés. Achim, le cocher, était parti ranger le fiacre dans la grange, accompagné des deux gardes qui allaient nourrir leurs chevaux.

La Conteuse & le Renard doré - En réécritureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant