C'était seulement le deuxième bal auquel assistait Lyra. Elle le redoutait cependant moins que le premier. Désormais, elle savait à quoi s'attendre. La descente des marches. Les regards des nobles. L'intimidante présence des reines.
Ce soir, elle n'était pas là pour s'amuser. Elle avait un objectif bien en tête. Et il n'était pas question qu'un seul spectateur ait une remarque à faire sur sa prestation. Elle devait être parfaite.
Pour marquer le coup, elle avait revêtu l'un de ses derniers gains. Une robe jaune offerte par les reines, salaire du premier bal. Bien entendu, c'était un bijou de couture. La dentelle qui recouvrait le bustier remontait jusqu'à son cou, dessinant des ornements délicats sur sa peau brune. Le tafta de la jupe dansait au moindre de ses mouvements. Et des cristaux éclatants brillaient à chacun de ses pas.
Madeleine avait bataillé pour dompter la chevelure de la conteuse, mais le résultat était splendide. Ses cheveux lâchés et tressés sur le haut de sa tête, telle une couronne, laissaient cascader de lourdes boucles chocolat dans le bas de son dos dénudé. Ajouté à cela un maquillage faisant ressortir ses yeux et une bouche peinte d'un rouge sang, Lyra Merryweather semblait tout droit sortie d'un conte de fée.
Comme la première fois, la conteuse retrouva les mêmes profils d'invités : les gourmands, les vantards, les danseurs et les charmeurs. Cette dernière catégorie déambulait dans la salle de bal, toujours en charmante compagnie. Lyra avait pu constater qu'ils préféraient néanmoins les coins sombres, à l'écart, où ils pouvaient aisément voler un baiser.
Et visiblement, le Renard doré était de cette catégorie-là.
Elle le surprit dans un coin de la Grande Salle, entouré d'une dizaine de jeunes gens. Exactement comme le soir de son premier bal. Le même coin isolé. Et si ses souvenirs étaient bons, les mêmes aristocrates à son bras.
Elle l'avait rapidement repéré. Pas qu'elle le cherchait du regard. Non. C'est juste qu'il sortait du lot, le fameux chef de la garde. Dans son élégant costume noir comme la nuit, brodé de fil d'or, il se démarquait des autres costumes aux couleurs vives. Le visage toujours recouvert de son masque. Le jour de leur rencontre, la figure impassible du garde avait mis Lyra mal à l'aise. Ce soir, elle trouvait que les lueurs des bougies dansant sur la surface d'or le paraît d'une expression malicieuse.
Le Renard doré, qui jusque-là avait gardé le masque baissé dans son verre, releva la tête dans sa direction. D'ailleurs, comment faisait-il pour boire sans enlever son masque ? Utilisait-il une paille ? Cette image fit sourire la conteuse. C'est alors qu'il s'avança vers elle, ses admirateurs emperruqués sur les talons. Et en moins de temps qu'il en fallut à la jeune femme pour s'apercevoir de sa présence, il lui faisait face.
— Bonsoir, commença Lyra, après une courbette de politesse.
Le Renard doré hocha la tête, muet. Il attendait devant elle, ses doigts gantés tapotant les bords de son verre de vin. Il était certes chef de la garde. Et conseiller de guerre. Mais Lyra ne comprenait quand même pas pourquoi il était invité à ce genre de réception. Ça se faisait d'inviter le chef de sa sécurité ? À moins qu'il soit avant tout un noble ?
Un ange passa. Puis deux. Trois. Et c'est toute la population du paradis qui leur passa devant le nez, au vu du peu de réaction du garde. Pour ajouter à ce moment gênant, les musiciens arrêtèrent la musique, le temps de tourner les pages de leurs partitions.
— Lyra Merryweather ! Je suis ravie de vous revoir, très chère ! lança d'une voix forte le duc de Lomont qui venait de faire son apparition.
Par le soleil et la lune, il était arrivé à point nommé. Lyra n'aurait pas supporté une seconde de plus d'être dévisagée par la suite du Renard. Ils leur lançaient des regards à l'un, puis à l'autre, comme s'ils assistaient à une compétition d'un jeu de raquette où personne n'avait la balle.
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La Conteuse & le Renard doré - En réécriture
RomanceSi Lyra Merryweather avait commencé à conter, c'était pour faire rêver les gens. Et aussi un peu pour l'argent... Parce que de l'argent, sa famille en avait besoin. Heureusement, sa réputation grandit jusqu'à atteindre les portes du château de Silv...