Chapitre 39

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La marque l'inquiétait. Par moment, il le voyait porter la main à son torse et froncer les sourcils.

Il n'avait pas encore eu le temps, ou le courage, d'en parler à cet enfant... Mais il allait bien évidemment devoir le faire. Il en avait longuement discuté avec Cybèle Zabini et ne voyait pas comment expliquer autrement les choses.

Son âme avait été gravement touchée et, si, pour le moment, tout semblait normal, il n'y avait pas de miracles.

Les miracles n'existent pas. Les miracles sont pour les Poufsouffle ou les imbéciles de Sorcière Hebdo. Les miracles c'était bon pour ceux à qui il n'arrivait jamais rien.

Levant un regard sombre sur la classe de troisième année en train de brasser une potion de ratatinage, il retint un soupir agacé de justesse.

Par Merlin. Son enfant aurait bien besoin d'un peu de Felix Felicis. Voire quelques litres. Et lui, Severus Snape, aurait bien besoin de quelqu'un à qui parler.

Il avait honte de le dire mais, par les cloches de l'enfer, il n'avait pas la moindre petite idée de comment se comporter avec l'adolescent... Depuis son retour à la "vie", il se sentait gêné.

Il avait vu le gosse revenir et il avait eu envie de le tuer en tout premier lieu. Pour lui avoir menti de manière aussi éhontée... Pour lui avoir fait traverser - comme sa mère d'ailleurs - les neufs cercles de l'Enfer de Dante. Et puis il avait eu vraiment envie de lui dire qu'il était soulagé.

Qu'il ne voulait plus jamais le voir affronter qui que ce soit. D'ailleurs... Les papiers d'adoption traînaient depuis des semaines sur son bureau maintenant. Soigneusement paraphés de sa plus belle signature. Il l'avait fait la veille du Dernier Combat. Sur un coup de tête. Et il l'avait joint à son testament au cas où.

Faustus Judicia avait été très... arrangeant concernant les diverses démarches administratives et il avait eu accès aux précieux documents en un temps record.

Et Potter était mort.

Ou presque. Sous ses yeux. Et il n'avait jamais rien ressenti de pareil les semaines qui avaient suivies. Colère. Fureur. Angoisse. Douleur. Impatience. Découragement. Il s'était senti sombrer petit à petit dans ce même maelstrom d'émotions tout à fait ridicules et passablement usantes.

Et il avait repensé à tout cela. Au moment où il avait, à nouveau sur un coup de tête, déclaré à Dumbledore qu'il s'occuperait lui-même du survivant... Puis les mois passés à ses côtés. Les cauchemars. Les frayeurs. Ses blessures. L'état de son esprit quand il l'avait découvert...

Ses rencontres avec les Dursley. Le voile levé sur toute la sombre vérité qui entourait le survivant tel un miasme d'obscurité.

Et puis il l'avait vu grandir. Sans même réellement le réaliser, il avait vu Potter guérir. S'ouvrir petit à petit. Il l'avait vu se faire frapper, malmener, utiliser... et systématiquement se relever.

Il avait été élevé comme un porc qu'on mène à l'abatoire.

Et il avait souri. A la dernière seconde, il avait souri.

Baissant les yeux sur son bureau, il serra la mâchoire. Il venait de briser la plume d'oie qu'il tenait de sa main droite. Plusieurs élèves déglutirent avec difficulté, le premier rang semblant carrément vouloir disparaître.

Certes. Il était de mauvaise humeur depuis quelques mois. Mais tout cela était uniquement de la faute du Ministère.

Il avait manqué de finir à Azkaban. Sans Lucius, Narcissa et Minerva, il aurait sans aucun doute terminé ses jours en prison.

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