Chapitre 9

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Mais ce n'est pas grave parfois
De montrer des signes de faiblesse
Tu as le droit d'être toi-même
Ne te mens plus maintenant
Tout est connecté par le son

Lorsque je ferme mes yeux
Dans l'obscurité, ta lumière
Éclaire le chemin pour moi
Nous pouvons marcher sans crainte, toi et moi

Lights
BTS 

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       Pris de panique, Hélios se mit à genoux et commença à la secouer dans tous les sens par les épaules. Gaïa était à moitié allongée par terre, son buste adossé sur les trois énormes sacs qu'elle portait. Ses paupières s'étaient fermées.

       — Gaïa réponds-moi, ça va ?! Gaïa !

       Hélios respira un bon coup et reprit.

       — Gaïa s'il te plaît dis-moi que tu vas bien.

       — Arrête de me secouer, je vais vomir.

       Elle parlait d'une voix faible mais autoritaire. Par terre depuis à peine dix secondes, elle tentait déjà de se relever, mais retomba aussitôt sous le poids des sacs.

       — Oh Dieux merci t'es vivante !

       Encore à genoux, Hélios se laissa tomber par terre, rassuré.

       — Oh la vache, tu m'as fait peur.

       Assis à côté de Gaïa, de joie, il serra ses mains dans les siennes, un petit sourire sur les lèvres.

       — Lâche-moi.

       La jeune femme était furieuse. Pas contre Hélios. Pas vraiment. Il tentait simplement de la garder en vie. Non, elle était furieuse contre elle-même. Une profonde honte la submergeait. Et sur cet océan flottait une seule idée : on n'a pas le droit de s'évanouir stupidement. Sur un champ de bataille, ceux qui s'évanouissent meurent. La voix de sa mère résonnait lointainement dans son crâne. Les faibles ne méritent pas de vivre. Et elle le savait, seuls les faibles ont besoin d'aide. Peut-être aurait-elle alors préféré mourir. En tout cas les flèches empoisonnées qui quittaient ses yeux n'indiquaient pas le contraire. Elle aurait pu arracher les yeux inquiets de son sauveteur.

       — Ne me touche pas.

       Fermant la marche, ils avaient perdu le groupe depuis un bon bout de temps.

       — Si je te lâche tu vas jamais réussir à te relever et tu vas pourrir au soleil, fit Hélios avec un brin de douceur dans la voix.

       Il s'était mis à genoux et serrait les bras de Gaïa pour la maintenir assise.

       — Alors tu vas me laisser t'aider et on va reprendre la marche tous les deux.

       Non. Non. Il devait la laisser tranquille, la laisser seule ici, qu'elle meurt si c'était ce qui l'attendait. Elle n'avait certainement pas besoin d'aide.

       Indigne.

       La chaleur des mains d'Hélios sur ses avant-bras la rendait malade. Il devait la lâcher. Elle sentait sa peau brûler, son bras étranglé sous la pression des doigts d'Hélios qui la tenait gentiment. Elle ne respirait plus, ses poumons comme vides sous sa peau.

       Hélios l'interrompit dans sa réflexion et ne lui laissant pas le choix, il débarrassa Gaïa de ses sacs et reprit ses mains dans les siennes pour la remettre sur pied. Prêt à se relever, il s'arrêta net devant le visage blême de la jeune femme.

       — Gaïa par contre il va falloir que tu ouvres les yeux.

       — Ils sont ouverts, fit-elle d'une voix de plus en plus distante.

       Hélios fronça les sourcils, fixant les longs yeux fermés de Gaïa. Un sourire tendre mais préoccupé sur les lèvres, il reprit :

       — Mmh. Là pour le coup tu me mets un doute.

       Il attendit un instant, mais ne reçut aucune réponse. Il tira de nouveau sur les bras de l'endormie, provoquant une légère plainte.

       — Il faut pas que tu fermes les yeux Gaïa. Je pourrais ne pas réussir à te réveiller.

       Elle ne répondait plus, ses bras mous pendant des mains du jeune homme. Il commençait à être vraiment inquiet.

       — Ouvre les yeux Gaïa. S'il te plaît. Ouvre les yeux.

       Il soupira, ne savait plus quoi faire.

       — Gaïa.

       Hélios observa attentivement les cils blancs de la jeune femme, attendant qu'ils se relèvent.

       — J'ai très envie de les voir.

       Ses deux paupières se relevèrent doucement. Hélios retint un souffle quand il vit ce qui se cachait derrière elles.

       Somptueux. Pour la première fois il vit les yeux de la jeune femme. D'un bleu transparent, ils brillaient de vie. Au fond de chacun de ses iris brûlait une boule de feu. Une étoile. Une étoile bleue flottait sous chacune de ses paupières. Il connaissait ces yeux. Il les avait vus cette nuit-là. Les survivants parlaient encore aujourd'hui de ces yeux écarquillés qui avaient brillé dans la pénombre. Des étoiles mourantes qui attendaient d'exploser qu'ils y avaient vu. Et soudain il comprit le regard que Persès avait eu quand il avait lui-même vu le regard de la jeune femme. L'homme avait vu les étoiles exploser.

       — J'ai les yeux ouverts là ? demanda-t-elle la tête en arrière, absente.

       Hélios esquissa un sourire amusé devant les yeux écarquillés de la jeune femme et acquiesça.

       — Je voyais plus clair quand ils étaient fermés. Je crois pas que c'est bon signe.

       Il la tira délicatement debout et son bras autour d'elle, ils se remirent en route.

       — Tu vas pas pouvoir boire avant au moins une heure, alors il faut que tu tiennes d'accord ?

       Elle acquiesça.

       — Merci, fit-elle en regardant rapidement le jeune homme dans les yeux.

       Comprenant qu'elle le pensait vraiment, Hélios changea gauchement de sujet.

       — Au moins tu penses plus à tes pieds !

       La jeune femme n'eut pas la force de répondre.

       Alors qu'ils avaient presque rejoint le reste du groupe, à nouveau dans la forêt, ils virent à quelques mètres devant eux Atys, à terre, inconscient.








À ces âmes égaréesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant