⇝ Chapitre 25

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Je repose le casque contre le micro et essuie mes larmes d'un geste rapide. Pourquoi ai-je systématiquement les larmes aux yeux quand je chante ? Est-ce parce que je me sens détendue ? Ou bien parce que je chante avec le cœur ? J'imagine que je n'aurai jamais vraiment la réponse.

Je quitte la cabine et rejoins les autres, saluant les nouveaux arrivant d'un rapide « salut ».

— Émotive ? m'interpelle Freddie, en réponse.

Il me tend un paquet de mouchoirs.

— Pour ton nez, précise-t-il, avec une moue narquoise.

Je prends un mouchoir et me mouche bruyamment sous son air moqueur. Il s'est coupé les cheveux depuis la dernière (et unique) fois que je l'ai vu. Ils sont plus courts sur les côtés et dans la nuque, mais il a gardé des longues mèches sur le dessus qui tombent devant ses yeux, raides.

— Merci de te soucier de mon apparence.

— A votre service, Miss Dray, rétorque-t-il en s'inclinant avant d'écarter ses cheveux d'un mouvement de la tête. Premier jour en studio ? poursuit-il, le plus naturellement du monde.

Je confirme de la tête.

— Aurais-je le droit d'entendre la chanson que tu as si passionnément interprétée ?

Ne sachant pas s'il s'agit un d'un compliment, je m'abstiens de répondre à la fin de sa question. Je croise les bras sur ma poitrine.

— Elle n'est pas finalisée. On ne s'est pas encore partagé les paroles.

— Je suis presque sûr que c'est toi qui y mets le plus de cœur. Tu devrais garder le bridge. Et au moins un couplet. Tu l'as écrite, tu sais exactement ce que tu voulais dire et la façon dont tu veux l'exprimer.

— Je l'ai co-écrite, corrigé-je.

Freddie hausse les épaules.

— Et alors ? Luke m'a dit que c'était toi qui avait eu l'idée au départ.

— Je suis venue avec le refrain, c'est vrai. J'ai écrit les deux couplets avec Alice et c'est Luke qui m'a aidée à trouver le prérefrain, et-...

— Tu es littéralement en train de démontrer mon point, coupe-t-il, amusé.

Mon visage se fend d'une moue dubitative.

— Et vous, vous travaillez sur quoi ?

— Secret professionnel.

Il a parlé d'une voix traînante et termine sa réponse d'un clin d'œil. Je me retiens à grande peine de ne pas lever les yeux au ciel.

— Ôte-moi l'ombre d'un doute, tu étais bien à Sainte-Cécile ?

Je me raidis. Pourquoi cela semble autant intéresser les gens ?

J'opine de la tête. Il fronce les sourcils, penche la tête d'un air intéressé et demande :

— Pourquoi n'avez-vous pas eu de contrat, à la fin de votre lycée ?

Je soupire.

— C'est une longue histoire.

— Je suis tout ouï.

— Je ne te connais pas, asséné-je, peut-être un peu trop froidement.

Je me mords là lèvres, regrettant aussitôt le ton que j'ai employé. Mais je n'ai pas réfléchi, mes mots sont venus naturellement, comme quand je compose.

Il prend un air faussement affligé.

— Ça fait mal.

— Je ne suis même pas désolée.

Le temps d'une chanson (3)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant