⇝ Chapitre 47 ~ Caitlin

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   Caitlin s'était beaucoup amusée à composer La reine des cendres, si bien qu'elle était sa chanson préférée de leur EP Dans les flammes. Paradoxalement, la chanson ne parlait presque pas d'elle ou ses amis, ce qui en faisait un ovni dans leur discographie, tout comme Pompéi, la chanson écrite sur une idée de leur manager. Si composer aux côtés de Dark Fate leur avait apporté un vent de fraîcheur, ne pas écrire sur eux-mêmes mais sur des personnages fictifs s'était avéré tout autant enrichissant et amusant, car Caitlin n'avait pas eu à affronter de vieux démons ou à mesurer à quel point elle se mentait à elle-même à propos d'un sujet ou un autre. Une façon comme une autre de s'épanouir créativement sans que ce ne soit trop chaotique.

Bien-sûr, elle n'en a pas dit autant à la journaliste qui est en train de les interviewer pour Billboard : elle s'est contentée de courir à la rescousse de ses amis et de clamer qu'ils avaient pioché un peu partout : dans les livres et films qu'ils aimaient, leurs expériences communes, leurs passés respectifs, dans les promenades londoniennes qu'ils avaient pris l'habitude de faire, dans les rencontres qu'ils ont faites. Emmy avait ensuite ajouté qu'elle se laissait porter par son instinct, ce qui la poussait parfois à écrire des chansons un peu plus expérimentales, comme Brûler les étoiles.

— Vous vous êtes entourés Dark Fate pour ce titre phare, n'est-ce pas ? reprend la journaliste, un sourire aimable aux lèvres tandis que Sad Joy confirme. D'ailleurs, ils vous ont accompagné dans l'entièreté de ce projet, si je me réfère aux crédits. Qu'est-ce que ça fait, d'être choyé par un groupe à l'aura si importante ?

— Je pense parler au nom de tout le monde si je dis qu'on peine parfois à réaliser qu'ils nous ont repérés, affirme aussitôt Alice tandis que Mike hoche vivement la tête. On a beaucoup de chance et on est très reconnaissant à Dark Fate pour ça. C'est grâce à eux qu'on a pu sortir nos deux EPs et qu'on peut discuter avec vous !

— Ils sont très professionnels, poursuit Mike, et toujours constructifs dans leurs conseils. Dans les flammes ne serait pas ce qu'il est sans leur aide pour aboutir à ce projet ! C'était la première fois qu'on avançait les yeux bandés, on ne savait pas vraiment ce qu'on voulait au début, et savoir qu'on pouvait compter sur eux en toute circonstance était rassurant.

— On a aussi pu voir comment ils fonctionnent en tant que groupe, et s'inspirer de leur mode de fonctionnement pour trouver le nôtre, ajoute Caitlin, enthousiaste. Avant, j'avoue qu'on n'était un peu moins discipliné : on avait tendance à regrouper des chansons qui évoquaient plus ou moins le même sujet sans créer avec une trame ou un fil conducteur, alors que ça permet d'être bien plus efficace.

Bon, ce n'était pas tout à fait vrai, la trame sur le feu s'était un peu construite d'elle-même, comme les deux précédentes, mais les deux enseignants de communication qu'ils ont eu ont été formels : Sad Joy doit toujours se montrer reconnaissant de la chance qui leur était accordée, expliquer à quel point ils ne seraient rien sans Dark Fate (ce qui était vrai, même si passer des heures à en parler agaçait Caitlin, car c'était là une vérité, une chose actée qu'on ne pouvait modifier, alors à quoi bon tergiverser là-dessus ? C'était fait de toute façon ! Et puis, rien n'interdisait Dark Fate de repérer d'autres artistes après eux.) Ils leur avaient aussi appris à éviter certains sujets trop intimes, et à rebondir sur des questions trop personnelles.

— C'est votre premier concert à sur le sol américain, reprend la journaliste. Ce n'est pas trop étrange, de jouer dans salle où vous avez chanté tous les cinq, lors de votre spectacle quand vous étiez lycéens ?

— C'est très perturbant, confirme Emmy en hochant la tête, une mèche brune persistant à revenir devant ses yeux. Je ne pensais pas retourner un jour dans cette salle ! Elle abrite tellement de souvenirs !

Le temps d'une chanson (3)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant