ELYO
— Pourquoi tu fuis tes parents ? lui demandai-je en le fixant attentivement.
Je vis son regard s'arrêter sur la page qu'il lisait, il la fixait comme s'il souhaitait rentrer dans le livre, comme si le fait de la regarder longuement pouvait lui permettre de rejoindre l'histoire.
J'aimais regarder les autres, c'était la manière la plus simple de savoir qui ils étaient et ce qu'ils pensaient. Les mots pouvaient être recouvert de mensonges mais le visage ne pouvait pas mentir et les yeux ne pouvaient dire que la vérité. Regarder les autres ne voulait pas forcément dire que je m'intéressais à eux ou à leurs problèmes. Au contraire, je m'en foutais complètement. C'était seulement une habitude que j'avais adoptée durant l'enfance.
Observer et subir c'était tout ce que j'avais fait.
Les émotions me faisaient peur depuis longtemps, surtout la colère. Elle me faisait peur depuis toujours et pourtant elle m'avait agrippée, faisant de mon corps son habitat . Alors parfois j'avais peur de moi et de ce dont j'étais capable, alors parfois quand je passais devant un miroir je serrais le poing et je me frappais.
Je me frappais parce que je me détestais et que je souhaitais disparaître. Je me frappais parce que c'était tellement plus simple de laisser la colère me détruire au lieu de détruire les autres. Je me frappais quand la colère était tellement forte que je ressentais le besoin de détruire tous ceux qui se trouvaient près de moi.
Les émotions, je les détestais. Et pourtant je regardais le visage des gens dans le seul but de les trouver.
— Pour rien, murmura-t-il en craquant ses doigts.
C'était la réponse que donnaient les gens quand ils ne souhaitaient pas se confier ou qu'ils avaient trop de choses à dire pour les placer dans une seule phrase. Je ne répondis rien, les mots ne servaient à rien dans ce genre de situation. Je laissais seulement mes yeux observer ceux de l'inconnu qui se trouvait devant moi.
L'émotion que j'avais pu apercevoir dans les traits de son visage était la tristesse. Ses yeux bleus si purs contrastaient mal avec cette émotion si impurs. C'est drôle, je n'avais pas remarqué qu'une telle souffrance émanait de son corps la première fois que l'on s'était vu. Peut-être parce que j'étais tellement plongé dans ma souffrance que je n'avais pas aperçu la sienne ? Peut-être parce qu'il avait dissimulé sa souffrance dans ses demi-sourires et ses yeux baissés ? Peut-être parce que sa souffrance était à peine visible et si silencieuse ?
— J'y vais.
Il hocha légèrement la tête et continua sa lecture sans m'adresser un seul regard. Je détestais que l'on me regarde. Je détestais que l'on ne me regarde pas. Au final, j'étais juste un adolescent compliqué, aimant et détestant certaines choses en fonction des situations et des moments.
Je m'enfonçais de plus en plus à travers les arbres jusqu'à atteindre mon endroit préféré, mon paradis terrestre. C'était un bout de plage entouré par la mer. Personne ne venait ici, ils préféraient tous la plage recouverte de place, de gens et de vie. Je préférais cet endroit qui me permettait d'être seul à seul avec la mer. Cet endroit qui m'autorisait à danser avec la solitude.
Je m'assis sur le sol, sur le sable. Mes genoux étaient remontés jusqu'à mon menton et mes bras les entouraient. Rapidement je changeais de position, je détestais celle-ci. C'était la position des faibles et je ne l'étais pas. Je ne l'étais plus.
Après plusieurs heures à rester devant la paix, je dus me résigner à retourner à l'orphelinat. J'étais obligé de remettre jour après jour les pieds dans cet endroit remplis de ténèbres et de peurs. Je n'avais ni le choix ni d'autre endroit où dormir.
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FORNEVER (bXb)
RomanceEliott Wils était un adolescent de 17 ans qui se nourrissait des mots des livres quand l'oxygène ne suffisait plus à le maintenir en vie. Elyo Penters était un adolescent de 17 ans qui coloriait les parties blanches de ses toiles, mélangeant sa tri...