48

756 47 14
                                    

ELIOTT

Être loin de celui faisant battre mon cœur était d'un supplice que je ne pensais pas être capable de ressentir du manque de présence d'une quelconque personne. Mais Elyo n'était pas une personne quelconque. C'était peut-être aussi pour cette raison, qu'avant lui, je n'avais jamais rien ressenti de tel. D'autant douloureux.

Ça faisait exactement quatre jours et trois nuits que j'étais enfermé entre les murs de ma chambre trop grande pour une seule personne, sans aucune autorisation de sortie, de possibilité d'observer le monde qui m'entourait de part et d'autre et celui qui me manquait un peu trop. Beaucoup trop.

Alors je lisais. Dormais. Laisser défiler les mots sous mes yeux épuisés, remplis d'une lassitude dont je n'arrivais pas à me débarrasser. M'endormais encore en enfonçant ma tête dans l'oreiller pour étouffer ma respiration irrégulière et les larmes qui ne cessaient de couler le long de mes joues mouillées, en espérant aussi un peu que la vie s'en irait plus vite. Que le temps défilerait sans que je ne me rende compte de rien.

En vain. Parce que plus je tournais les pages, plus c'était nos moments à nous qui prenaient l'ascendant sur ceux des personnages fictifs. Et plus je tentais de rejoindre Morphée, plus c'était la vue de son regard transperçant qui me faisait sourire bêtement, continuer à chanceler en pleurant encore plus intensément.

Et s'il pensait que j'avais fini par l'abandonner ? Que j'avais brisé notre promesse d'un simple claquement de doigt sans prendre en compte la moindre de ses émotions ? Celle de ne jamais nous quitter, même dans le prochain univers ? Que je ne souhaitais plus voir l'étirement enfantin de ses lèvres et la lueur malicieuse de ses yeux bruns ?

Je soupirais longuement en relevant le regard jusqu'au plafond que j'avais déjà dû analyser une centaine de fois, peut-être même plus, en l'espace de ces quelques jours. Parce qu'il n'y avait pas grand chose à faire. Lire des livres qui n'arrivaient pas à captiver toute mon attention, trop dormir pour tenter de fuir la réalité et observer le plafond en essayant d'effacer la moindre de mes pensées.

J'espérais que ce n'était pas le cas. Qu'au fond de lui, il se doutait que je n'avais jamais décidé de moi-même d'arrêter de le côtoyer. Parce que moi, si je l'avais pu, je serais resté à ses côtés tellement longtemps que le monde autour de moi, de nous dans ce cas, aurait fini par croire que c'était là notre destinée. Qu'on ne pouvait pas faire autrement que de s'observer longuement, nos doigts entrelacés et parfois nos bouches plaquées l'une sur l'autre. Être côte à côte pour toujours.

Quelles règles. Quelle vie. Quel ennui.

Trouvaient-ils un certain réconfort à me faire sentir misérable de la sorte ?

Je baissais lentement le regard avant de le fixer sur le balcon et de laisser mes pensées filaient à miles à l'heure. Trop rapidement pour je tente d'en attraper même une seule pour essayer de la déchirer du bout des doigts. Pour que mon cerveau puisse avoir son propre mot à dire sur la situation. Quant à mon cœur, il arrivait trop bien à suivre. Tout ce qu'il me murmurait était de fuir. De rejoindre ce garçon au regard apaisant en faisant le mur. En désobéissant complètement aux ordres de mes parents. En bravant l'interdit qu'ils avaient forgés de toutes pièces.

Les battements de mon cœur s'accélérèrent et je me relevais rapidement sur mon lit, une main plaquée contre le matelas en même temps qu'un minuscule sourire remplis d'excitation se mouva le long de mes lèvres en pensant à ce que j'allais accomplir une fois la nuit tombée et mes parents complètement endormis. En attendant le moment fatidique, je devais continuer à être trop patient, impatient en réalité, en me perdant au fond d'histoires qui n'arrivaient pas à me transporter dans leur univers. Parce que c'était lui et seulement lui qui avait réussi à voler toute mon attention. Complètement.

FORNEVER (bXb)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant