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E L Y O

Tomber amoureux...

Tout se trouvait dans l'expression. Tomber amoureux. Parce qu'avant de le devenir, il fallait chuter, glisser sans savoir si on se rattraperait, si on y survivrait. On devait accepter de s'écrouler les yeux fermés en espérant que ça ne ferait pas trop mal, qu'aucune blessure ne nous atteindrait.

Tomber amoureux... Comment pouvait-on même espérer en réchapper quand tout le monde sait qu'une fois les genoux au sol, on en finit toujours éraflé, légèrement abimé.

Un trou béant au niveau de la poitrine, du sang s'écoulant jusqu'au sol, des éclaboussures peignant chacun des murs.

Je soupirais, un trop plein de souvenirs devant les yeux avant de reporter mon attention sur la réalité. Les murs étaient tout sauf tâchés d'hémoglobine. Ils étaient blancs, trop lumineux, trop parfaits. Trop faux.

Nous nous trouvions à présent sur le large canapé, des boissons fruitées entre les doigts. La mère d'Eliott avait également préparé une tarte à la pomme découpée en morceaux identiques qu'elle avait déposée sur la minuscule table basse qui se trouvait devant nous.

J'avalais difficilement ma salive en m'efforçant de rester concentré sur le goût sucré qui glissait entre mes lèvres à peine ouvertes. Pourtant j'avais envie de détourner le regard vers la femme aux cheveux bruns qui continuait de m'observer longuement et ses yeux posés sur ma personne devenaient légèrement pesants. Comme si elle avait pour mission de m'analyser, de connaître tout de moi en un simple clignement de paupières.

Je détestais me sentir épier de la sorte, ça me rendait mal à l'aise et en même temps trop nerveux.

Elle soupira finalement et je crus qu'elle allait détourner le regard pour peut-être fixer l'un des tableaux trop beau se trouvant au mur. Mais j'imagine que ces derniers ne devaient pas l'intéresser, qu'ils étaient les derniers de ses centres d'intérêts. Alors à la place, elle reprit simplement la parole.

— Alors dis-moi, comment vous êtes-vous rencontrés ?

Drôle de question.

Notre rencontre ? Quels mots aurais-je pu utiliser pour la décrire ?

J'écarquillais les yeux avant d'être soudainement pris par une violente toux. Je venais d'avaler de travers, ne m'attendant pas à cette question de sa part.

Notre rencontre ? Comment aurais-je pu la citer avec de simples paroles ?

Je me repris rapidement avant d'afficher un immense sourire sur la pointe de mes lèvres. Comme si je n'avais jamais été aussi sûr de moi, que je croyais en ma personne plus que quiconque. Tant de beaux mensonges. J'étais l'un des meilleurs à ce jeu-là. C'était l'illusion que je voulais offrir, le mirage que je souhaitais créer. Ce dont je voulais les persuader.

Parce qu'en réalité, j'avais peur. Une boule si intense s'était formée au creux de mon ventre. Depuis combien de temps faisait-elle partie de ma vie ? Si longtemps. Probablement trop longtemps.

Oui. J'avais peur.

De ne pas être assez bien. Assez tout simplement. De dire quelque chose de travers, de ne pas leur plaire, peut-être même de les décevoir. Je soupirer avant de lancer un rapide coup d'œil à Eliott, qui était déjà en train de m'observer attentivement et quand mon regard plongea sans se faire prier dans le sien, un large sourire vint se dessiner le long de ses lèvres roses et il hocha la tête pour me rassurer.

FORNEVER (bXb)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant