ELIOTT
Mes paupières s'ouvrirent, j'avalais une minuscule bouffée d'oxygène, m'étouffais du souffle qui me manquait déjà parce que l'air restait bloqué au fond de ma gorge, suffoquais de la vie qui semblait ne plus vouloir de moi. Parfait, moi non plus, je ne voulais plus d'elle. Impression étrange de tomber. Mais cette fois-ci, pas vraiment de lui, simplement dans le vide. Ha. Le vide. C'était exactement ce qui me démangeait partout sur le corps. Cette douleur invisible qui me donnait tellement envie de vomir. J'avais mal. Mais qui aurait pu apaiser juste un peu la souffrance qui me maintenait enfoncée au fond de mon lit ? Et puis, il y avait aussi mes larmes qui glissèrent encore le long de mes joues, sur l'oreiller et partout ailleurs.
Ha. C'était exactement ce que je ressentais. Le vide. Je me sentais affreusement vide. À l'extérieur et au dedans. Dépourvu de tout ce qui constituait normalement un être humain. J'avais mal. Tellement mal que j'en avais les doigts un peu tremblants, que j'avais envie de me gratter partout pour effacer le déchirement de chacun de mes membres. Et puis à l'intérieur de mon cœur, je me sentais brûlé. Une bombe posée délicatement sur mon organe vital. En fait, j'étais persuadé qu'elle avait déjà explosé et que si ce n'était pas encore le cas, ça ne tarderait pas à arriver. Elle ne manquerait pas de bientôt le faire en me réduisant en poussière. Mais de toute façon, j'avais déjà l'impression d'être un tas de cendre qui n'attendait que de s'envoler au loin, au fond du ciel tourmenté.
Je touchais le dessous de mes yeux et un minuscule sourire ressemblant davantage à une grimace mal choisie plutôt qu'à un étirement rempli d'espoir, de trop de joie, longea le bord de ma bouche en même temps que je tentais de me relever. J'avais les yeux gonflés. De toutes les larmes que je n'avais pas réussi à retenir dans les replis de mon âme. De toute la peine que je n'avais pas pu dissimuler de la vue de tous. Évidemment. Je m'étais lamenté toute la nuit avant de tomber d'épuisement. De m'effondrer sur mon matelas qui semblait à présent trempé du surplus de ma peine. D'ailleurs, c'était encore le cas. Je continuais de m'effondrais en silence et parfois trop bruyamment pour être vraiment entendu, entre les quatre murs de cette chambre, le chant d'oiseaux me murmurant des sons incompréhensibles, que je n'essayais même pas de déchiffrer au creux de l'oreille et le son du vide, celui qui avait l'ascendant, m'engloutissant encore plus intensément. Trop violemment pour que je puisse en réchapper.
Alors, je tombais de nouveau lourdement contre les draps de mon lit, les larmes obstruant ma vue, le sel inondant l'intérieur de ma bouche, mon corps n'arrivant plus à accomplir le moindre mouvement. Il était épuisé. Complètement. Je l'étais également. Un peu trop. Je n'avais plus envie de rien. Rien du tout. Je fermais les yeux une nouvelle fois en espérant du plus profond de mon cœur, que je n'aurais plus jamais à les ouvrir. Que cette réalité disparaisse pour le restant de mon existence. Je devais absolument la fuir. Cette dernière m'angoissait beaucoup trop pour que je puisse espérer y survivre. Je n'allais pas y survivre, c'était impossible, impensable. Infaisable. Parce qu'elle me donnait le tournis et une envie trop ancrée de vomir pour que je puisse la contenir encore longtemps au creux de mon estomac.
Quelle ironie. Je savais que la vie ne s'arrêterait pas encore de sitôt pour moi. Mon temps n'était probablement pas encore arrivé. Mais quand est-ce que se serait le cas ? Quand est-ce que je pourrais soupirer une dernière fois, sourire une dernière fois, plisser les yeux une dernière fois avant de mourir et de ressentir une profonde paix ? Celle m'assurant qu'il n'y aurait pas de lendemain ? Qu'il n'y en aurait jamais plus ? C'était sans doute parce qu'elle avait encore trop de choses à m'offrir et à me faire découvrir pour donner son autorisation à la mort de venir me chercher. De me sauver de cet univers qui me donnait la nausée.
Non. En fait, c'était complètement faux. Parce qu'elle n'avait qu'une seule et dernière chose à m'offrir.
Son sourire. La douceur de sa peau. Le goût de ses lèvres. L'éclat de ses yeux. Le froncement de son nez. Le mouvement de ses doigts le long de ma peau. Le long de ses tableaux. La manière dont il avait de dire qu'il m'aimait bien. Qu'il m'aimait de trop.
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FORNEVER (bXb)
RomanceEliott Wils était un adolescent de 17 ans qui se nourrissait des mots des livres quand l'oxygène ne suffisait plus à le maintenir en vie. Elyo Penters était un adolescent de 17 ans qui coloriait les parties blanches de ses toiles, mélangeant sa tri...