V. 3.

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3. À l'instant même où une pluie d'étoiles filantes traversa le ciel

BRUNO

Dès que Dolores entendit mon invitation, la nouvelle se rependit comme une traînée de poudre. Arieta sortit de la maison avec ses enfants, afin d'aller chercher ce dont ils avaient besoin au moulin et, pour elle, se préparer pour la soirée à venir. Sitôt la porte fermée, sitôt un déluge de conseils me parvinrent de toutes parts : mes sœurs, mes beaux-frères, certains de mes neveux... Même ma mère se mit à me prodiguer des idées. Où l'emmener, comment lui parler, ce que je devais porter ! Toute mon idée était à refaire, si je devais tous les écouter.

Or, j'avais déjà une envie précise, quelque chose qui me tenait à cœur depuis un moment. J'avais déjà envisagé cela depuis longtemps, je savais que c'était susceptible de plaire à l'inventrice, je ne souhaitais pas revenir en arrière. Je lui avais déjà vaguement parlé de cette possibilité, seulement, c'était un contexte différent.

Quand les DeVidrio revinrent, les deux plus jeunes qui devaient passer la nuit sur place entrèrent les premiers, me laissant délibérément attendre dans la cour intérieure qu'Ari se dévoile enfin.

Pour une raison inexplicable, je me sentis ému en la voyant passer la porte. Apprêtée, vêtue d'une robe et de sandales, elle avait pris le soin de jouer le jeu et cela me consola de mes dernières angoisses : elle ne pouvait pas avoir fait tant d'efforts simplement pour me faire plaisir, ou par pitié. Puisque je demeurais figé, elle s'approcha de moi en riant. J'essayai de me rattraper au mieux.

— Tu es... très jolie, m'entendis-je articuler. Mais c'est quelque chose que tu savais déjà, c'était un peu idiot de te le faire remarquer.

— Hé bien, confessa-t-elle, c'est la première fois que quelqu'un me le dit.

À y regarder de plus près, elle aussi, était un peu nerveuse. Elle jouait encore avec son pendentif en évitant les regards, faisant mine de réfléchir. Alors, je lui proposai de partir tout de suite. Le temps de saluer les quelques curieux qui demeuraient encore et nous partîmes.

— Où tu m'emmènes ? se renseigna-t-elle.

— J'ai le droit de te faire la surprise ? la taquinai-je.

— D'accord, concéda-t-elle. Mais je peux au moins savoir pourquoi tu as pris un panier de pique-nique avec toi ? Ce n'est pas me dire où tu m'emmènes, ça !

— Tu es trop curieuse, dis-je en riant. Disons que je me suis douté que tu n'avais pas encore mangé, aujourd'hui. Alors, je me suis dit...

— Tu as vraiment pensé à tout, me félicita-t-elle.

— Peut-être avais-je visualisé cette soirée depuis un moment déjà, avouai-je.

— Combien de temps ? voulut-elle savoir.

— Quelques... jours ? hésitai-je. En tout cas, pas plus de trois semaines, c'est promis.

Elle se mit à rire, au début, je crus qu'elle se moquait de moi, mais elle vint s'accrocher à mon bras et je compris qu'il n'y avait que de la curiosité et de la bienveillance en elle. Je ne comprenais pas ce qui avait pu m'en faire douter, l'espace d'un instant.

Je l'emmenais dans une clairière un peu isolée de notre village, j'étalais la couverture que j'avais prise et l'invitai à me rejoindre.

— Il y a de cela un moment, lui présentai-je mes intentions, quand nous étions sur la route de Santa Obstacúlo, tu m'avais avoué que tu ne voyais pas autant les étoiles que tu ne l'aurais souhaité.

Entrelacs Verts ÉmeraudeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant