Nathanaël
Vous savez ce que font les êtres humains quand ils se sentent dépassés par leurs misérables vies ? Ils se bourrent la gueule.
Et c'est exactement ce que je suis en train de faire, dans ce pub où j'ai atterri depuis sans doute une heure vu ce qu'indique l'horloge rétro au mur. Et vu que je suis encore capable de distinguer les aiguilles, ça veut dire que je ne suis pas assez ivre pour pouvoir oublier hélas que mon père vient de refaire surface et que je l'avais pratiquement toujours connu sans même le savoir.
Rien que ce rappel me fait finir mon verre de whisky cul sec et je ne sens même plus l'alcool qui me brûle la gorge.
Bien évidemment, je n'aie pas l'âge réglementaire pour consommer de l'alcool mais l'être humain est corruptible. Il suffit d'une somme bien réglé pour qu'on me laisse picoler en paix et qu'on me resserve quand je le demande sans me faire la morale en même temps.
Justement, je pousse mon verre vide vers le barman pour sûrement la quatrième fois mais il ne me ressert pas. Au lieu de ça, il prend mon verre ouais mais il ne me le rend pas.
– Navré petit, mais t'es à plus de six verres. J'ai pas envie de foutre la clé sous la porte à cause d'un merdeux qui a besoin de noyer sa vie entière dans l'alcool.
Agacé, cependant compréhensif, je dépose l'addition des consos sur le bar et sort du pub d'une démarche titubante.
Allons noyer ma vie ailleurs.
C'était le plan et pourtant, inexplicablement, c'est sur le canapé de mon meilleur pote que je finis. Je ne pourrai même pas vous dire comment car je ne me rappelle pas comment du pub, j'ai pu me retrouver chez Shiro.
Quoiqu'il en soit, c'est aussi là-bas que je crèche pour la nuit et décuve comme un abruti le matin.
Les coudes sur la table de la cuisine devant laquelle je suis assis, je me masse les tempes, grimaçant à l'adresse du marteau piqueur qui résonne sous mon crâne.
– Putain, je grogne.
Un verre de jus de fruit ainsi que deux cachets d'Aspirine apparaissent devant moi. Je me les enfilent aussi sec et remercie Shiro, le bon samaritain qui aide son crétin de meilleur ami d'un merci marmonné.
– T'as Léo qui n'a pas arrêté d'essayer de t'appeler, m'apprend-il alors et je me souviens d'un coup que j'ai une existence aussi merdique soit elle mais surtout une copine qui à cette heure ci doit être en mode furie furieuse.
Cette constation ne fait que de me faire grimacer un peu plus et je finis par m'écrouler sur la table de la cuisine, la tête dans les bras.
Bordel, j'ai merdé.
– Elle sait que je suis ici ? je grommelle sans prendre la peine de me redresser.
– Non.
Bon, c'est déjà ça.
– Comment j'suis arrivé là ? je demande encore.
– Je t'ai trouvé allongé sur un banc d'arrêt de bus en train de délirer total.
Merveilleux.
Shiro pose deux tasses de café sur la table que je contemple d'un œil morne après m'être redressé.
– Tu devrais rappeler Léo. Elle est morte d'inquiétude.
– Je le ferai...
Quand, je sais pas encore. Sûrement quand j'y verrai un peu plus clair dans le bordel qu'est devenue ma vie.
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LOVE NIGHT (TERMINÉE)
RomanceSourire ne veut pas dire adorer sa vie. Il reste plus qu'une année à tenir avant de dire adieu au lycée. Léonie originaire de Boston a migré à Chicago, abandonnant son père pour rejoindre sa mère et sa belle-mère. Seulement, elle n'est pas la seule...