Léonie
Trois semaines plus tard
C'est triste de constater qu'il suffit qu'une personne frôle la mort ou la côtoie de trop près pour que les choses se décident enfin à bouger.
Ca fait trois semaines que je suis sortie de l'hôpital et que j'ai repris un train de vie normal. Ou presque. Quelque trucs ont changés comme mes rendez vous deux fois par semaines dans un groupe spécialisé dans les addictions. C'est un peu comme les Alcooliques Anonymes où nous sommes tous réunis autour en cercle, sur des chaises à nous écouter épancher nos malheurs. Au début, j'étais très renfermée mais petit à petit, j'ai fini par parler, expliquer et raconter tout ce qu'il s'est passé et comment je suis tombé dans le cercle vicieux de la mutilation. Cette chose qui semble être ta meilleure amie alors qu'elle n'est juste que ta pire ennemie à te détruire à petit feu. Je n'ai pas été jugé une seule fois ni même montrer du doigt par rapport à ma couleur de cheveux anormale. J'essaie encore aujourd'hui de les accepter et donc m'accepter moi-même. Avec mes nombreux défauts, ce blanc et mes cicatrices. Autant celles à l'extérieur qu'à l'intérieur.
La réunion de vingt minutes étant terminée, je me dirige vers la sortie quand quelque chose attire mon attention.
Des cheveux aussi dorés que le soleil et des yeux bleus larmoyants, je me surprends à m'arrêter devant cette petite fille qui me semble bien trop jeune pour se trouver dans un tel endroit.
– Hey, est-ce que ça va... ?
Question idiote soit dit en passant mais j'ai toujours été nulle pour engager la discussion. La petite relève son regard tourmenté vers moi et je crois entendre mon cœur se briser dans ma poitrine. Elle a le visage ravagé par les larmes et semble porter un poids bien trop lourd pour ses frêles épaules.
La gamine secoue la tête en répondant à ma question, murmurant si bas que je peine à l'entendre :
– J'ai mal...
Mes sourcils se froncent et je me trouve comme une maman poule à inspecter la fillette en ne voyant pourtant aucune blessure.
– Où est-ce que tu as mal ? je lui demande à m'abaissant à sa hauteur.
Et sous mes yeux complètement incrédules, elle relève sa manche de son pull rose pâle et je vois alors ce qu'il lui fait mal. Quelque chose que je connais hélas beaucoup trop bien et savoir qu'une gamine de même pas onze ans soit déjà dans ce cercle vicieux me donne envie de hurler.
– Je peux... ? je m'enquiers, préférant lui demander l'autorisation de la toucher.
Elle acquiesce en clignant ses yeux bordés de longs cils noirs.
Alors avec précaution, après avoir réchauffé mes mains en les frottant l'une contre l'autre, je les pose doucement sur son bras où de fines coupures de sang me font face. Elles sont récentes, si récentes que ça ne veut dire qu'une seule chose :
– C'est toi qui t'ait fait ça, n'est-ce pas... ?
Miss blondinette se referme comme une huitre dans sa coquille à ma question et je me maudis d'avoir manqué autant de tact.
– Hé, je ne te juge pas. Je suis très mal placé pour le faire, je tente de me rattraper.
Je capture instantanément son attention.
– Pourquoi ? Toi aussi tu te coupes... ?
Entendre cette question me donne une envie irrépressible de protéger cette gosse si jeune d'elle-même comme l'a fait Nathanaël avec moi.
J'hoche la tête puis après avoir pris une imperceptible inspiration, je remonte mes propres manches et expose sous son nez mes propres cicatrices.
– Comme j'ai dit, je suis la dernière personne pour te juger. Et puis... Peu importe ce qui t'a conduit à en arriver là, je comprends.
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LOVE NIGHT (TERMINÉE)
RomanceSourire ne veut pas dire adorer sa vie. Il reste plus qu'une année à tenir avant de dire adieu au lycée. Léonie originaire de Boston a migré à Chicago, abandonnant son père pour rejoindre sa mère et sa belle-mère. Seulement, elle n'est pas la seule...