Chapitre 34 - Manigances familiales

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— Clark !

Eleanor ignorait combien de temps avait duré son échange avec Manik. Sûrement quelques minutes, tout au plus. Pourtant, elle avait l'impression d'avoir quitté le campement depuis des heures.

Quand elle revient au milieu des tentes et cabanes, la plupart des Neutres étaient déjà couchés. Cela ne l'empêchait pas de crier le nom du Grand Alpha, qu'elle désespérait de retrouver. Et s'il n'était pas revenu ? Et s'il s'était perdu dans le désert ? Et si...

Elle avait beau essayer de les faire taire, ces questions torturaient son esprit sans relâche. Gagnée par une sorte de tournis, elle manqua plusieurs fois de trébucher. Le sol était relativement plat et propre, mais il paraissait se dérober sous ses pieds. Elle se rattrapa de justesse à une branche d'arbre, sans trop savoir ce qu'il faisait là.

— Tout va bien, mademoiselle ?

Elle sursauta. En clignant des yeux, elle réalisa que la branche était en réalité le bras d'une femme.

— Vous êtes toute pâle, s'inquiéta cette dernière. Vous ne voulez pas vous assoir ou...

— Dites... Dites-moi où est Clark, il... Il est parti et...

Elle voulut terminer sa phrase, mais ses lèvres refusèrent de lui obéir. Il lui sembla soudain que son corps était trop lourd pour elle et ses genoux ployèrent sous son poids. La femme l'aida à se poser par terre, tout en prononçant des mots qu'elle ne comprit pas.

Tout se mélangeait, sans qu'elle ne parvienne à démêler quoi que ce soit. Elle avait à la fois chaud et terriblement froid, ses vêtements l'étouffaient et elle tremblait en même temps, tout était trop sombre et trop lumineux...

— Eleanor ?

Seule cette voix réussit à percer son trouble. Elle ouvrit les paupières – réalisant seulement maintenant qu'elle les avait fermées – et vit deux yeux bleus la fixer avec inquiétude.

— Qu'est-ce qui t'est arrivé ? Qu'est-ce que...

Elle aurait aimé lui répondre, or un noeud obstruait sa gorge. Il ne se défit que lorsqu'elle éclata en sanglots, si douloureux qu'ils l'empêchèrent encore de parler.

Elle sentit aussitôt des bras l'entourer, et perçut de vagues paroles inintelligibles.

— Je vais m'occuper d'elle, ne vous en faites pas, crut-elle entendre au milieu du brouillard.

Il lui sembla ensuite que son corps quittait le sol. Quand elle le retrouva, ce fut pour s'assoir sur une surface plus moelleuse. Elle avait simplement conscience de s'accrocher à quelque chose qui dégageait une odeur et une chaleur rassurantes, qui l'étreignait sans l'étouffer, qui l'apaisait petit à petit...

Ses sanglots se confondaient avec ses tremblements, si bien qu'elle n'était plus qu'une petite chose frémissante. La voix de Manik sifflait à ses oreilles comme le chant d'un serpent. Derrière ses paupières closes, elle ne voyait que ses yeux brillants et son sourire moqueur. Je te garde à l'oeil. Tu ne m'échapperas jamais. Voilà ce que je t'interdis. Des bribes de phrases se mélangeaient dans son esprit, sans qu'elle ne distingue le passé lointain des moments récents.

Pourquoi fallait-il encore qu'il soit capable de la mettre dans cet état ? Elle n'avait plus seize ans, elle n'était plus censée être aussi fragile qu'autrefois, elle s'était juré qu'il ne contrôlerait plus sa vie... Et voilà qu'elle se retrouvait à pleurer comme une enfant.

Elle resta ainsi un temps incalculable, jusqu'à remonter doucement à la surface. Sa respiration se fit un peu moins erratique, et les battements de son coeur redevinrent réguliers. Ils s'emballèrent de nouveau lorsqu'elle sentit des doigts frôler ses joues, pour en dégager quelques mèches de cheveux.

Soleil d'Argent [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant