𝐌𝐈𝐃𝐍𝐈𝐆𝐇𝐓 𝐁𝐋𝐔𝐄

𝟏𝟑 - 𝐏𝐚𝐬𝐬𝐞 𝐚̀ 𝐚𝐮𝐭𝐫𝐞 𝐜𝐡𝐨𝐬𝐞

𝐒𝐔𝐙𝐀𝐍𝐄

J'ai tout de suite compris que quelque chose n'allait pas.

Orion avait quitté le lycée en plein milieu de la matinée. Sans un regard en arrière. Le visage blanc, fermé, vidé. Il avait traversé le couloir comme un fantôme, bousculant presque les élèves sans même s'excuser. Et à midi... Caz n'était pas venu manger avec nous. Caz qui ne ratait jamais le déjeuner. Caz qui râlait quand la sonnerie sonnait en retard. Caz qui prenait toujours la même place, pile en face de moi, juste à côté de Riley.

Son absence me laissait une drôle de sensation sous la peau. Une tension sourde. Comme si tout était sur le point d'exploser.

À la cafétéria, l'ambiance était bruyante, étouffante, saturée de rires trop forts et de conversations absurdes. L'odeur des frites me retournait presque l'estomac. J'étais assise avec Riley, Roselyn et Mari. Enfin... assise, c'est un bien grand mot. Riley et Roselyn étaient en train de se dévorer du regard, penchés l'un vers l'autre, leurs genoux qui se frôlaient, leurs sourires beaucoup trop explicites pour être discrets.

Je piquai un haricot avec mauvaise humeur.

— Sérieusement... marmonnai-je. Vous pourriez au moins faire semblant d'être civilisés.

Riley tourna vers moi son sourire insolent.

— Jalouse, Forks ?

— Rêve, répondis-je en levant les yeux au ciel.

— Menteuse.

Roselyn ricana doucement, puis cala son menton dans sa main.

— Elle est juste en manque d'amour.

— Ferme-la, Van Der Wynn.

Mon regard glissa malgré moi vers Mari. Elle riait doucement, un peu mal à l'aise, les joues légèrement rosies. Et mon cœur fit ce truc débile qu'il faisait toujours quand elle était là. Ce battement trop rapide. Cette chaleur idiote dans la poitrine. J'avais beau jouer les dures, elle avait toujours ce pouvoir absurde sur moi.

— Tu fixes trop, Suz, murmura Riley sans même détourner les yeux de Roselyn.

Je manquai de m'étouffer.

— N'importe quoi.

— Totalement n'importe quoi, confirma Roselyn avec un petit sourire entendu.

Je détournai le regard, agacée, quand Roselyn me détailla plus attentivement.

— T'as une tête de fille qui rumine un sale truc. Qu'est-ce qui se passe ?

Je triturai mon verre entre mes doigts.

— Orion s'est barré du lycée ce matin... Et Caz n'est pas là.

Leurs sourires s'éteignirent d'un coup.

— Parti comment ? murmura Mari.

— Il est parti comme s'il fuyait quelque chose.

Roselyn se raidit.

— Et Caz ne l'aurait jamais laissé partir comme ça sans raison.

Je hochai lentement la tête.

— Voilà.

Et c'est à ce moment-là que je le vis.

William entra dans la cafétéria en traînant un peu la jambe, la tête basse. Un œil au beurre noir violacé marquait son visage. Il ne regarda personne. Il s'assit seul, à l'écart, son plateau encore intact devant lui.