𝟗 - 𝐔𝐧 𝐠𝐫𝐚𝐧𝐝 𝐫𝐞𝐭𝐨𝐮𝐫

503 56 8
                                        




𝐂𝐀𝐙𝐈𝐄𝐋


Je suis paumé. Mais pas le genre paumé mignon où tu cherches juste tes clés pendant cinq minutes avant de les retrouver dans ta poche. Non. Je parle du vrai paumé. Celui qui te retourne le cerveau, t'empêche de respirer normalement et te force à refaire la même scène en boucle dans ta tête depuis la veille au soir.

Depuis hier, Orion n'arrête pas de me hanter l'esprit. Sa voix. Son regard. Ce qu'il m'a dit. Et surtout... pourquoi est-ce que ça m'a autant marqué ? Pourquoi je n'arrive pas à le voir comme avant ? Pourquoi je me suis senti obligé de répondre, de me livrer moi aussi ? J'ai l'impression que mon crâne va exploser sous le poids des questions qui s'y entassent.

Je suis allongé sur mon lit quand la porte de ma chambre s'ouvre sur ma mère, en fin d'après-midi ce jeudi. Elle a l'air épuisée. Vraiment épuisée. C'était pourtant censé être son jour de repos aujourd'hui. Son premier depuis que Lyra a été retrouvée morte. Autant dire qu'un « jour off » pour elle, ça ressemble surtout à une pause entre deux tempêtes.

— Tes devoirs avancent ? me demande-t-elle en s'affalant à côté de moi sur le lit.

— Non. Je suis paumé.

— Besoin d'aide ?

— C'est pas les devoirs.

Elle se redresse aussitôt et me fixe. Elle m'analyse. Et je déteste quand elle fait ça, parce qu'elle est beaucoup trop forte. Ma mère et moi, on est trop proches pour notre propre bien. Elle me lit comme un livre ouvert. Impossible de lui mentir. Impossible de lui cacher quoi que ce soit.

— Tu ne m'as pas raconté comment ça s'est passé avec Orion, ici, l'autre jour, dit-elle calmement.

Exactement ce que je disais.

— Heu... c'était... super, je réponds vaguement.

Elle arque un sourcil.

— « Super » comment ?

Je soupire, vaincu.

— Il m'a avoué qu'il était gay.

— Tu ne le savais pas ?

Là, vraiment, j'ai l'impression d'être l'idiot du village.

— Bah... non. Et puis j'me mêle pas trop de la vie privée des gens. Ça me regarde pas.

— Et c'est seulement ça qui t'a perturbé... ou il y a autre chose ?

Je détourne les yeux. Forcément qu'il y a autre chose. Beaucoup trop de choses à la fois.

— Non. Je crois que c'est autre chose...

Elle ne dit rien. Elle attend. Comme toujours.

Et moi, je pense à Brielle. Brielle qui me plaît physiquement, avec qui je pourrais facilement tenter un truc si je voulais. Et Alek pourra bien aller se faire foutre, royalement et profondément. Mais depuis hier soir, même ça, ça a changé. Elle ne me fait plus le même effet. Et cette simple pensée me retourne l'estomac.

— Une partie d'échecs ? me propose-t-elle soudain.

J'acquiesce, reconnaissant de cette échappatoire, et on se retrouve quelques minutes plus tard dans le salon. Je la bats en quatre coups à peine.

— Merde... mon fils est un génie, grogne-t-elle.

— C'est papa qui m'a appris ce coup, je murmure avec un sourire triste.

𝐌𝐈𝐃𝐍𝐈𝐆𝐇𝐓 𝐁𝐋𝐔𝐄Où les histoires vivent. Découvrez maintenant