𝐂𝐀𝐙𝐈𝐄𝐋
La première chose qui me réveille, ce n'est pas la douleur. Ce n'est pas non plus la peur. C'est l'odeur. Une odeur épaisse, métallique, quelque chose entre le caoutchouc brûlé, l'essence et la poussière froide. Je cligne des yeux, mais rien ne s'éclaire ; le noir est total, étouffant, comme si la nuit avait avalé l'air lui-même. Je respire trop vite. Je sens mes côtes protester sous les bandages, la brûlure familière au thorax que j'ai appris à reconnaître ces derniers jours. Mon crâne pulse, une migraine sourde remue sous ma cicatrice.
Et alors, lentement, les bords du réel reviennent. La surface sous ma joue est dure, vibrante. Mes jambes sont repliées contre ma poitrine dans un angle impossible. Mes poignets heurtent une paroi métallique quand j'essaie de bouger. Les secousses, le bourdonnement grave du moteur, la sensation d'être jeté d'un côté puis de l'autre à chaque virage...
Je suis dans un putain de coffre.
Le souffle me manque. Pendant un instant, j'ai l'impression que mon cœur remonte jusqu'à ma gorge, comme s'il voulait s'enfuir avant moi. Je ferme les yeux, inspire lentement, tente de rassembler mes souvenirs comme on ramasse des morceaux de verre au sol.
Orion. Joey. Le jardin de l'hôpital. Les bancs couverts de givre. Je revois Orion qui se lève pour aller chercher son téléphone, son sourire encore accroché aux lèvres, la promesse silencieuse dans ses yeux. Joey assis à côté de moi, le brownie sur mes genoux, la conversation qui glisse soudain vers Lyra—son prénom prononcé trop facilement, trop directement.
Et ensuite...
Son regard.
Ses chaussures rouges.
Puis le choc.
Le noir.
Un sanglot m'échappe, sec, minuscule. Pas de douleur. Pas de panique. Juste un vertige affreux : l'idée que j'aurais dû mourir à la place de tout ça. Le moteur ralentit soudain, un crissement grave mord la route, puis plus rien. Le silence, lourd, menaçant, comme si le monde retenait son souffle avec moi.
Je retiens le mien quand j'entends les pas. Lents. L'assurance d'un homme qui sait que sa proie ne peut pas fuir. Le gravier craque sous ses semelles, un son sec, méthodique. Les pas s'arrêtent juste derrière moi. Puis la clé s'enfonce dans la serrure du coffre.
Un éclat de lumière blanche me frappe violemment les yeux quand le couvercle se soulève. Je détourne le visage, aveuglé, mais je devine déjà sa silhouette. Grande. Immobile. L'ombre d'un sourire accroché à ses lèvres.
— Alors... t'as dormi ?
Sa voix est douce. Tellement douce que j'en ai la nausée.
Je veux parler, mais ma gorge est sèche. Je voudrais hurler, mordre, cracher. Je voudrais être Orion, avoir sa rage, sa force, sa façon de faire trembler les murs quand il frappe dedans.
Mais je suis plâtré. Brisé. Et terrifié.
— Va te faire foutre, Joey, je finis par cracher, même si ma voix tremble. Si tu me touches, je—
— Tu vas faire quoi, hm ? Réalise où t'es, Caziel.
Il attrape mon plâtre à la jambe sans prévenir. Je hurle. Pas un cri maîtrisé. Pas un cri courageux. Un cri arraché, déformé par la douleur et la panique.
— Voilà. Là, tu réalises.
— T'es malade... tu... tu vas pas t'en sortir comme ça...
Il rit. Un rire qui n'a rien d'humain.
VOUS LISEZ
𝐌𝐈𝐃𝐍𝐈𝐆𝐇𝐓 𝐁𝐋𝐔𝐄
Fanfic✷ * ⋆ . ·˚ * . Dans une petite ville où tout le monde se connaît, la mort soudaine d'une adolescente vient briser le calme de l'hiver. Une enquête est ouverte, les regards se croisent, les soupçons s'installent, et le silence devient lourd de...
