23. Peine de Cœur

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Hana

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J'inspectai une dernière fois la composition qui trônait devant moi puis hochai la tête d'un air satisfait. C'était la troisième commande que je préparai aujourd'hui et j'étais contente du travail fourni. Au moins, me concentrer sur mon boulot me permettait d'occuper mon esprit ailleurs et de ne pas ressasser les évènements de ces derniers jours.

Je ne voulais pas y penser. Et d'ailleurs, dès que l'ombre d'un souvenir tentait de s'installer dans mon esprit, je le balayai immédiatement.

C'est pourquoi, à cet instant, je plaquai un nouveau sourire sur mon visage et me dirigeai vers un client qui venait d'entrer dans la boutique. J'avais conscience que Cerise me surveillait du coin de l'œil, mais là encore je choisissais l'ignorance plutôt que la confrontation.

— Bonjour, monsieur ! l'accueillis-je avec sourire. Est-ce que je peux vous renseigner ?

L'homme d'une soixantaine d'années m'expliqua qu'il cherchait des fleurs à offrir à sa petite fille qui venait juste d'emménager sur Paris pour ses études. Je passai le quart d'heure suivant à le conseiller jusqu'à ce qu'il passe en caisse. Ce fut un plaisir de le voir repartir satisfait et souriant.

C'était l'aspect que je préférais dans mon métier.

Mais je ne m'y attardai pas trop longtemps et me remis au travail. Toutes les commandes de la journée étaient déjà prêtes et les clients se faisaient rares à cette heure-ci. Nous étions sur le point de fermer pour la pause déjeuner, alors je décidai de faire un peu de rangement dans l'arrière-boutique.

— Tu as besoin d'aide ? me demanda Cerise qui venait juste de débarquer à mes côtés.

Je sursautai presque, elle avait été tellement discrète que je ne l'avais pas entendue arriver. Ou alors c'était moi qui étais bien trop dans mon monde.

— Non, c'est bon, lui répondis-je. Toutes les commandes de la journée sont prêtes et j'ai même pris de l'avance sur l'inventaire. Honnêtement, tu n'auras pas grand-chose à faire cet après-midi, simplement à t'occuper des clients. Cette fois, je ne te laisse pas avec une grosse charge de travail, je suis contente !

Nous étions jeudi, et comme chaque semaine je laissai la boutique à Cerise l'après-midi pour aller voir mon père. J'espérais que j'arriverai à garder bonne figure devant lui aussi.

— Hana, souffla doucement mon amie pour attirer mon attention. Tu te noies à nouveau dans le travail.

— Pas du tout ! lançai-je en me redressant, déjà sur la défensive. Je fais simplement ce qui était prévu ; me reconcentrer sur la boutique et alléger ta charge de travail.

— Tu ne me l'allèges pas, tu me la retires complètement, me corrigea-t-elle. Je suis arrivée à huit heure ce matin et tu avais déjà tout préparé pour l'ouverture. Depuis quand tu étais déjà en train de bosser exactement ? Est-ce que tu as même le temps de dormir la nuit ? Et ces commandes justement, en général on se répartit la tâche mais aujourd'hui c'est à peine s'il me reste quelque chose à faire !

— Tu es bien la seule employée du monde à se plaindre de ne pas avoir assez de travail à faire, plaisantai-je pour tenter d'alléger l'atmosphère.

Seulement ça ne fonctionna pas. Cerise avait croisé ses bras contre sa poitrine et son regard était sérieux, il me clouait sur place. J'allais encore avoir le droit à un sermon.

— Bien sûr que ça me fait plaisir de voir que la boutique tourne bien et que notre travail est fluide, soupira-t-elle. Mais ce que tu fais en ce moment, ce n'est pas sain, Hana. Et tu le sais aussi bien que moi. Tu ne quittes plus ta boutique, honnêtement je ne suis même pas sûre que tu montes dans ton appartement pour dormir.

BLOOMINGOù les histoires vivent. Découvrez maintenant