10. Tourbillon, frisson, brûlure

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- Je suis désolé pour tout, Lou.

La porte claque avant même la fin de ma phrase et je reste planté comme un con au milieu du couloir.

Louis est en colère. Super en colère.

Tout le monde pourrait le deviner vue la façon dont il me parle depuis tout à l'heure. Mais si je le sais, c'est aussi parce que je la sens, sa colère.

En fait, je sens la moindre des émotions qui le traversent depuis l'imprégnation.

La première que j'ai ressentie, c'est l'inquiétude. J'étais au sol, en train de me battre contre les éléments et Louis s'est fait du souci pour moi. Je crois qu'il a cru pendant un moment que j'étais mort, ou au moins blessé.

Il m'a appelé. Je l'ai entendu, même si sa voix semblait lointaine et que j'étais incapable de bouger et de réagir. Quand il s'est inquiété, je l'ai senti.

On aurait dit qu'une main se posait chaleureusement sur mon épaule. Je me souviens que ça m'a rassuré. Ça m'a fait du bien, ça m'a aidé à sortir de ma torpeur.

Puis quand je suis revenu à moi et que Louis a compris que j'étais hors de danger, l'inquiétude a rapidement laissé place à la colère.

Depuis, ce sentiment ne l'a pas vraiment quitté. Au contraire, sa colère s'est amplifiée et continue à s'amplifier de minutes en minutes.

Elle devient plus noire, plus sombre, plus épaisse. Et elle prend la forme d'un tourbillon qui m'entoure, s'enroule autour de mes jambes et de mon tronc. Ça c'est encore supportable mais par moment ce brouillard semble s'enrouler autour de ma gorge et se serrer de plus en plus, me faisant suffoquer. Un tourbillon qui me coince, m'enserre, et menace de m'aspirer vers le fond.

Parfois, la colère est remplacée par la haine. Pure, sauvage. Encore plus violente.

Louis me déteste. Il me déteste d'avoir provoqué son loup, même si moi j'ignore toujours ce qu'il s'est passé. Il me déteste d'avoir toqué à sa porte le soir de ses chaleurs. Il me déteste d'exister.

À chaque fois qu'il pense et ressent un truc pareil, moi, je ressens comme une brûlure dans la nuque. La première fois, j'ai touché ma peau, persuadé qu'elle brûlait vraiment. Mais non, c'est dans ma tête. Ou plutôt dans le cœur de Louis.

Sa haine aussi est de plus en plus forte, de plus en plus blessante, au fur et à mesure que les minutes s'écoulent tandis qu'il est enfermé dans sa chambre. Je sais qu'il ressasse. Et plus il ressasse, plus le feu brûle ma peau.

Louis est trop fier pour l'admettre, mais je sais aussi qu'il a peur. À chaque frisson qui me traverse par surprise de part en part, je sais que c'est ce sentiment qui le traverse lui.

Je devine qu'il a des craintes pour la suite. Moi aussi ça m'inquiète toute cette histoire, car nos vies ne seront désormais plus pareil.

Mais je pressens qu'il a aussi peur de moi et de Tanakaï et ça, ça me tue.

Je ne veux pas qu'il ait peur de nous. Je serais bien incapable de lui faire du mal et je suis tellement désolé qu'on lui ait fait peur dans ces vestiaires. Ce n'était pas mon intention et si seulement il comprenait à quel point je suis désolé... Quant à mon loup, jamais il n'aurait attaqué Louis. Jamais. Je le sais, même si lui croit le contraire.

Alors que mes poils se hérissent à nouveau dans un frisson incontrôlable, je voudrais toquer à sa porte et lui redire tout cela pour qu'il arrête de trembler dans son lit. Mais je sais que je suis la dernière personne qu'il veut voir pour l'instant alors, tout doucement, je fais volte-face et je retourne dans ma chambre.

Mords-moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant