Onze. Trésor.

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(Lior) 

La nuit aurait dû la calmer, mais c'est tout le contraire. 

À quoi je m'attendais au juste? 

Je la connais, elle n'est pas prête de redescendre en pression. 

Je l'entends successivement hurler sur Otto et Eva à travers la cloison de ma chambre. Et c'est entièrement de ma faute. Ce qui n'arrange rien à mon humeur du matin. 

Elle pète un câble. Le jet des parents d'Eva, ne pourra pas revenir avant deux jours, et le premier vol commercial trois. Sandro ne dit rien, ce qui est, je pense, le plus flippant de tout ce qui se trame à côté. 

Je suis sûre, que le gamin est déjà en train de chercher un coin sur Maps non loin de la villa, pour m'enterrer. Je m'épargnerais bien des galères à le laisser faire. 

La porte de sa chambre claque, et je comprends que c'est Otto qui s'en échappe. Je le retrouve dans la cuisine à se faire un café. Il ne dit rien quand je me glisse à côté de lui. 

- Je vais vous laisser, ce n'est pas à elle de partir. 

- Et à toi non plus, fulmine-t-il. 

Je vois au cerne sous ses yeux qu'il n'a pas dû plus dormir que moi. 

- C'est sympa de m'avoir proposé un plan B, mais ça te fou dans la merde bro', et je ne suis pas venue pour ça ...

- Non! crache-t-il en claquant nerveusement sa tasse sur le comptoir. ET quoi? hein? Tu repars courber la tête devant ton père pour qu'il te foute sur la gueule?

Je le pousse du plat de la main, furieux contre lui. Inquiet qu'on nous entende, je jette un regard circulaire dans la pièce et m'assure que nous sommes bien seuls.

- Ne me dit pas de me taire toi aussi! me menace-t-il mâchoire serrée en pointant mon torse du doigt. 

Il est à cran et triste. Otto c'est ma version Yin. 

Depuis qu'on se connaît, il ne m'a jamais laissé tomber. Même quand je me pointe chez lui, après les crises de colère de mon père. Surtout la dernière en date. Il n'a jamais rien dit, et m'a toujours protégé des effets secondaires de toute cette merde. 

Il sait tout. Pour Manelle et la combine de mon père. Depuis le début. Et je sais que garder ce secret-là lui pèse, et bien souvent je regrette amèrement de le lui avoir confié. J'ai perdu une occasion de fermer ma gueule ce jour-là. Mais malgré tout, s'il n'était pas dans la confidence ... J'aurais craqué. 

- Je dis juste que je ne peux pas rester ici, et foutre les vacances de tout le monde en l'air. 

- Si t'avais eu les couilles de lui parler on en serait pas là! 

D'une main lasse, il se frotte le visage, et en chasse la fatigue. Il termine son café d'un trait, et reporte son attention vers la piscine. Il souffle, amer. 

- On devrait être en train de se baigner en buvant une bière. 

Ma culpabilité gonfle, me défonce le bide. 

- Vas-y, je vais régler ça. 

Il tourne vers moi un regard lourd de sens. À la fois inquiet et surpris. 

- Si elle veut partir, ne la retiens pas, ok? Elle est libre de ses choix.

Je le sais que trop bien mon frère ...

J'ai la boule au ventre, de la sueur plein la peau, et une bile acide qui me remonte dans la gorge. Je pourrais faire demi-tour, et attendre deux jours qu'elle se barre. 

Viens on s'haine.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant