Six. Domino.

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Je n'arrive pas à le comprendre.

Il n'est pas capable de me défendre face à ses potes, mais aller se taper dessus avec un abruti, ça c'est dans ses cordes?

Sullyvan est revenu salement amoché. Je lui avais seulement pété le nez, mais il s'était malgré tout pointé le lundi au lycée, avec une lèvre fendue et un bras dans le plâtre... Un bras dans le plâtre!

Je n'en reviens pas ... et sa logique m'échappe toujours.

- Ça leur passera t'inquiète pas, me dit tout simplement Eva en fermant son casier.

- On s'en fout ... éludai-je, en refermant le mien à mon tour, plus violemment que voulu.

Créant un silence en écho dans le couloir, tout le monde nous observe.

Tout ça me casse royalement les couilles. J'ai passé une soirée de merde, ma meilleure amie me prend pour une cause désespérée, et pire ... Lior pollue toutes mes pensées.

L'enfer.

- Oz' ...

- Non ... vraiment steuplait. Je n'ai pas la force là.

Bien évidemment, je n'échappe pas aux rumeurs qui vont avec. J'avais provoqué "Sully" comme une chaudasse en chaleur, pour faire enrager un autre mec, qui aurait fini par se battre avec lui pour défendre son honneur. Le sien, hein, pas le mien.

J'en prend déjà pleins la gueule. Mon seul pare-brise c'est Otto et Eva, qui me défendent corps et âme, pour rien.

Mais j'apprécie l'effort, pour une fois je me sens moins seule face à cette vague de merde. Les chuchotements vont bon train sur mon passage. Ça les occupe.

Nos regards se croisèrent, et je sais que je pourrais toujours compter sur elle. Mais pour une fois, j'aurais voulu n'avoir à être soutenue par personne. J'aurais voulu qu'on me lâche.

- Défends-toi, me supplia-t-elle.

- Pourquoi faire? ricanai-je. Ils m'ont déjà fait monter sur le bucher, je ne vais pas éteindre les flammes en soufflant dessus.

Je glisse rageusement mon téléphone dans mon sac, en espérant faire disparaitre toutes les notifications qui font briller mon écran comme un putain de stroboscope.

Je garde la tête haute, me persuadant que si je ne réagis pas à leurs réflexions, ils se lasseront. Mais dans le fond, je replonge dans l'enfer de l'année dernière.

Les murmures, ses petits rires étouffés, les rumeurs ...

Faisant remonter une bile acide qui me défonce les joues. Si Emmett était encore là, il aurait tous fermé leur gueule. Sans exception.

Ironique ... je suis capable de me battre pour me protéger, mais incapable de me défendre face à une bande de lycéens qui s'ennuyaient.

T'es qu'une pauvre merde de toute façon ...

En fait, je suis incapable de composer avec le mensonge.

Les mensonges laissent des traces permanentes dans nos âmes, et s'impriment de manière indélébile dans les souvenirs les plus insignifiants. Et la mienne n'a plus de place pour une nouvelle cicatrice.

Encore une fois, à midi je me réfugie dans le jardin botanique. Seul endroit paisible dans cet enfer hormonal. Je suis fatiguée ... Et j'ai besoin d'une pause dans mes faux-semblants.

L'inconvénient avec tout ça ... c'est que ça me rend aussi agoraphobe. Je ne supporte plus la foule, que ce soit ici ou dehors. Les gens m'étouffent, par leurs mots, pire, par leur simple présence.

Viens on s'haine.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant