Chapitre XX

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Tout se passa très vite, Zhongli réussit à se libérer des menottes in-extremis et libera Tartaglia dans le même geste, ils se précipitèrent simultanément dans la cohue formée par les adhérant de ce culte plus que louche vers le grand gourou suprême et le second grand gourou suprême. D'un coup de poing bien placé le chef fut assommé -il n'avait pas cherché à se défendre, visiblement non seulement il était petit mais en plus pas musclé- et sa seconde ligotée -plus véhémente. Quelques autres personnes furent aussi capturées, le reste s'étant enfuit. Ils ne craignaient pas les rumeurs qui pourraient circuler sur eux, les fuyards avaient intérêt à ne rien dire pour ne pas être retrouvés.

Ils se rhabillèrent rapidement, Tartaglia un peu moins sonné que tout à l'heure rendit une petite visite nocturne à son bureau afin de livrer ses prisonniers. Il ne voulait absolument pas les exécuter devant Zhongli, il souhaitait conserver son image presque clean de fatui.

La secrétaire qui le reçu était une jeune, une stagiaire qui remplaçait surement celle qu'il avait viré dès ses débuts à Liyue. Sa surprise fut exquise aux yeux de Tartaglia quand elle mit ses lunettes et constata le tas de gens en pagne et évanouis sur le carrelage bien propre et bien ciré de la banque du Nord. Les trainer jusqu'ici n'avait pas été de la tarte et le roux s'en félicitait. Il était épuisé et laissa ses prisonniers à la jeune employée embarrassée.

Quand il rentra enfin chez lui, Zhongli était déjà couché. Fatigué par cette soirée forte en sensations, il s'endormit directement une fois lové dans les bras de son colocataire qui dormait déjà sur le lit. Heureusement que demain était samedi et qu'ils pourraient faire la grasse matinée.

***

C'était une des rares fois où Zhongli était réveillé avant Tartaglia. Non pas que ce dernier avait décidé de dormir plus tard mais le brun s'était simplement réveillé plutôt, avant les aurores, victime de son passé d'insomniaque. La lune était encore haute dans le ciel et le vent se faisait entendre d'un grondement sourd.

La lumière nocturne se reflétait dans les cheveux emmêlés de Tartaglia et faisait ressortir les quelques mèches plus blondes qui semblaient dorés. Comme ça, pour Zhongli, il avait l'air d'un beau prince endormi, le vieux t-shirt qu'il portait pour dormir laissait entrevoir une peau laiteuse, parsemée de taches de rousseurs qui ressemblaient à des constellations. Ses traits étaient détendus et il dormait la bouche légèrement entrouverte, la tête posée sur l'épaule de Zhongli. Une respiration régulière et lente faisait soulever sa cage thoracique, s'échouant tranquillement dans le cou du brun.

Il dégagea quelques mèches de cheveux qui cachaient le visage du roux et ce dernier réagit à son contact, se blottissant un peu plus contre la paume de sa main, tel un félin en manque d'affection.

Tout était calme, bob ronflait à leurs pieds, étalé de tout son long et la lune les regardait d'un œil bien veillant.

Finalement il décida de se recoucher, tant pis s'il devait passer la nuit à regarder le visage paisible de son colocataire.

Le réveil de Tartaglia fut un peu moins tôt, à un horaire correct pour un week-end et pas si indécent pour une grasse matinée. Quand il s'éveilla, il était blotti sur Zhongli qui était assis et lisait tranquillement un livre -que le roux trouverait surement soporifique- caressant d'un geste tendre et presque machinal ses cheveux, qui étaient encore une fois en bataille.

***

Xiao était encore une fois sur la terrasse de l'auberge Wangshu à profiter de la vue qui s'offrait à lui. Les arbres verts remuaient doucement à travers le vent hivernal qui commençait à s'adoucir avec la venue du printemps. Les saisons se répétaient en boucle, avec la même lenteur aux yeux de Xiao. L'étendue verte s'étendait à perte de vue et il sentit la fierté envahir son cœur. C'était grâce à lui qu'aujourd'hui que l'auberge pouvait prospérer sur ces terres, c'était parce qu'il les protégeait. Peu de fois il réalisait ça et se le disait, la plupart du temps il avait l'impression de ne servir a rien en voyant de nouvelles vagues de monstres, puis il pensait à ses frères et sœurs qui n'étaient plus là et repartait de plus belle, empli d'une énergie désespérée. Et parfois, de plus en plus souvent, il voyait les enfants sourire, des adolescents parler d'eux et de leurs problèmes amoureux, des adultes se plaindre de l'augmentation des taxes à Liyue, des ainés contempler ce tableau, se reposant paisiblement à côté de l'être aimé. Et il regrettait d'être venu sur terre comme ça, cela pouvait paraitre égoïste mais lui aussi tout au fond de lui il voulait ça.

Il laissa pendre ses jambes dans le vide et s'allongea sur le parquet encore tiède, chauffé par le soleil. Le ciel était gris foncé, d'une couleur entre le coucher du soleil orange et rose et la nuit outremer. Ses yeux se fermaient doucement, il était épuisé, il aurait voulu juste une pause, juste souffler, juste rendre les armes, arrêter de se battre. Vivre la vie qu'il n'a jamais vécu, être vieux, posséder une petite maison sur un des sommets du Krast Jueyun, faire du thé et se demander s'il ferait mieux de planter des fleurs de soies ou des fleurs quinxing dans son jardin.

Il ne voulait pas se l'avouer, parce que pour lui ce serait avouer qu'il voulait trahir celui qu'il considérait comme son père, mais il ne voulait plus se battre.

Une larme coula doucement sur sa joue et il tomba dans le sommeil.

Il ouvrit les yeux doucement, la fraicheur humide de la soirée faisait frissonner ses bras et lui donnait la chair de poule. Encore une fois il n'était plus sur le toit de l'auberge. Il était dans l'herbe sous un grand arbre.

La lune qui éclairait timidement lui permit de voir, une petite rivière coulait en contre bas et des chrysanthèmes à aube tournait paisiblement. L'arbre qui projetait son ombre sur ce paysage endormit était gigantesque dans la catégorie arbre normal. Il était vert malgré l'hiver et avait toutes ses feuilles que le vent remuait doucement dans un souffle.

Le même morceau qu'il avait entendu lors de sa dernière nuit de sommeil raisonna dans l'air. C'était clairement un air monsdatois, il ne s'était pas trompé. Il n'était pas un expert en musique de la cité du vent mais connaissait quelques morceaux et cet air ne lui disait vraiment rien.

Il se releva doucement en position assise, cette fois sa tête reposait sur un tapis de mousse et non sur les cuisses d'une personne inconnue.

La mélodie était de plus en plus lente, les notes sonnant quelques secondes dans l'air et disparaissant dans le vent. Une légère brise berçait Xiao et il eut envie de pleurer.

Une voix s'éleva et accompagna la lyre qui jouait. Elle était douce et emplie de mélancolie, comme si l'inconnu avait vécu les drames qu'il contait. Il tourna la tête et ne vit personne. Ses paupières étaient lourdes encore une fois et d'un coup il ressentit un reflux d'énergie démoniaque.

Il se rallongea et au bout de quelques minutes, bercé par cette voix mélodieuse et cet air d'une tristesse infinie, l'énergie malfaisante s'estompa. Il voulait rester allongé profiter du bruit de la rivière qui coulait, du vent qui chatouillait les feuilles du grand arbre et de ce mystérieux inconnu. Un papillon cristallin flotta doucement dans l'air, porté par la bise, brillant d'une lueur pale.

Quelques minutes de plus passèrent et au moment où Xiao décida de se relever pour retourner chez lui -il n'était décidément pas à Liyue ou sur le territoire de l'Archon géo, il n'avait jamais vu de papillon cristallins anémo là-bas- il se rendit compte que l'inconnu à la voix magnifique pleurait tout en chantant. La lyre se faisait de plus en plus silencieuse et l'air qu'il contait ressemblait plus à une plainte.

Il savait reconnaitre un cri du cœur.

Et cet inconnu chantait parce qu'il avait mal.

Et tout cela resonnait avec Xiao, avec son passé, ses peurs et ses désirs les plus profonds. Il savait qu'il ne fallait pas interrompre ces moments où l'on était honnête avec soi-même.

Il se tut, se rallongea et ferma les yeux.

Anyway - zhongchiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant