Rencontres fortuites

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Point de vue de Brooke

Le lundi, la météo était en parfait accord avec mon humeur puisqu'il pleuvait des cordes. Malgré la très plaisante soirée que j'avais passé avec Denzel, je gardais surtout en mémoire le passage où il m'avait ramené chez moi et tout ce que j'avais ressenti à ce moment-là. Cela me laissait dubitative, dans le flou le plus total.

Tout cela me donnait encore plus envie de retourner chez moi et de me réfugier sous ma couette, au chaud, et là où personne ne pourrait voir ma triste mine. C'était dans cet état d'esprit que j'arrivais à la fac et me dépêchais d'entrer pour me mettre à l'abri. Tandis que je refermais mon parapluie et ébouriffais vigoureusement mes cheveux pour leur redonner du volume...merci l'humidité, un jeune homme s'approcha de moi. Il ne manquait plus que ça.

« Salut, moi c'est Erik. Je suis en deuxième année et toi ? », dit-il, en me dévisageant ouvertement.

« Euh...je m'appelle Brooke et je suis en cinquième année ».

« Tu dois sûrement te demander pourquoi je suis en train de te parler. Pour tout t'avouer, ça fait plusieurs jours que j'hésite à venir te voir. En fait, je t'ai remarqué depuis le début de l'année, mais je n'osais pas venir...tu m'intimides », dit-il, en souriant timidement. Malgré son air sincère, son discours sonnait faux, comme s'il récitait un texte appris par cœur.

« C'est gentil... », dis-je, plutôt perplexe, et ajoutais sans vraiment réfléchir « ...enfin je crois ». Ne voyant aucune réaction de sa part, je me dis qu'il n'avait sûrement pas dû entendre la deuxième partie de ma phrase.

« Ça te dit d'aller boire un truc à la cafète ? ».

Face à mon hésitation il ajouta, « Ne t'inquiètes pas, je ne mords pas », le tout accompagné d'un clin d'œil appuyé.

Malgré le fait que son comportement me laissait sceptique et réticente à lui répondre par l'affirmative, j'acceptais. Je me persuadais que cette réponse était due au fait que je ne voulais pas le juger trop rapidement, et qu'en dépit de tout cela il paraissait plutôt sympa. Mais je me voilais complètement la face, je ne voulais, ni lui donner une chance, ni apprendre à le connaître. Je souhaitais tout simplement m'occuper l'esprit, ne plus penser à Denzel. Quitte à passer un moment, même bref, en compagnie d'un parfait inconnu que je ne reverrais, volontairement, jamais.

Ayant obtenu mon accord, un grand sourire étira ses lèvres et nous nous dirigeâmes vers la cafétéria. Tandis que je m'asseyais à la première table libre que je trouvais, il me fit signe qu'il allait nous prendre quelque chose à boire. Je fus étonnée qu'il parte me chercher une boisson sans même me demander ce que je voulais. Je passais outre et l'attendais patiemment. Après plusieurs minutes qui passèrent comme des heures, il revint, toujours ce sourire plaqué sur son visage, avec deux gobelets fumants. Lorsqu'il s'assit et en fit glisser un vers moi je le remerciais machinalement, mais en voyant qu'il m'avait pris un café je regrettais ce « Merci » puisque je n'en buvais pas.

Heureusement pour moi, il parlait assez pour deux et ne remarquait même pas mon quasi-mutisme. Je l'écoutais distraitement, à moitié concentrée sur ses paroles, le regard dans le vide. Néanmoins, je revins rapidement à la réalité lorsque je vis que ses yeux n'arrêtaient pas de faire des allers-retours entre mon visage et ma poitrine. En plus du sentiment de malaise qui m'envahit, une sourde colère me donna envie de lui mettre mon poing dans la gueule. Mais, étant en plein milieu de la cafète de mon université, je ne voulais pas m'attirer d'ennuis, je pris donc difficilement sur moi. Voulant le détourner de mes seins, je croisais fermement les bras sur ma poitrine et lui jetais un regard mauvais. Il dut comprendre le message puisqu'il releva brutalement la tête et rougit légèrement. Je n'osais même pas imaginer son comportement si j'avais porté un décolleté.

En l'entendant parler de choses et d'autres, aussi futiles les unes que les autres, je réalisais qu'il devait sûrement être plus jeune que moi. Il manquait cruellement de maturité, rigolait pour un rien et ne se gênait pas pour lorgner chaque fille qui passait près de notre table.

Après cinq petites minutes, je tentais déjà de maîtriser au maximum mon ennui, notamment pour éviter de lui bailler en pleine face. J'étais à deux doigts de lui dire de la fermer et de partir très loin de lui. À la place, je regardais discrètement autour de moi et alors que j'allais reporter mon attention sur Erik, je croisais le regard d'un homme qui me souriait de manière moqueuse. Il finit par se lever et marcha lentement vers nous jusqu'à arriver devant notre table.

« Salut, chérie ! Je suis désolé pour le retard. Je te cherchais dans le hall, je ne pensais pas que tu serais déjà installée », dit-il, naturellement, en posant sa main sur mon épaule.

Je m'étais figée en l'entendant prononcer le mot « chérie », ne m'attendant absolument pas à ça.

« Salut, euh...tu m'as dit que l'on était déjà en retard, non ? On ferait mieux d'y aller tout de suite alors. Au revoir Erik », dis-je, sans lui laisser le temps de répondre quoi que ce soit, m'éloignant rapidement en tirant Monsieur l'inconnu par la manche. J'avais beau ne pas le connaître, je savais qu'il ne pourrait pas être pire qu'Erik.

Ce ne fut qu'une fois arrivés dans le hall de la fac que je remarquais lui tenir toujours le bras, je le lâchais donc brusquement. Puis, en nous regardant nous nous mîmes à rire en repensant à la tête qu'avait fait Erik. Il s'était tendu au mot « chérie » et j'étais persuadée d'avoir perdu tout intérêt à ses yeux à ce moment-là.

Après avoir repris un semblant de sérieux, il finit par se présenter. Il s'appelait Alex et était en septième année de médecine.

Malgré moi, je ne pouvais m'empêcher de le comparer à Denzel et je constatais qu'ils n'avaient clairement rien à voir, deux personnes totalement opposées.

Alex avait des cheveux blonds, qui contrastaient énormément avec les cheveux noirs de Denzel. Il en était de même en ce qui concernait leurs yeux, ceux d'Alex étaient d'un vert clair, tellement clair que l'on pouvait les croire bleus. Pour résumer, ils n'avaient absolument rien à voir avec les yeux de Denzel, et surtout ils n'inspiraient pas les mêmes choses. Tandis que les yeux d'Alex me laissaient entrevoir une personne douce et chaleureuse, ceux de Denzel lui donnaient un air sauvage et menaçant.

Alex avait des traits fins et aucune cicatrice sur son visage. Il était plus petit que Denzel, mais restait tout de même grand comparé à moi.

Il inspirait la confiance et la gentillesse, et je devais avouer qu'il était vraiment pas mal. Mais malgré tout cela, il ne me faisait pas plus d'effet que ça. J'avais même l'impression de tromper Denzel en ayant ce genre de pensée. Ce qui était tout à fait ridicule puisque nous n'étions pas ensemble et qu'il devait sûrement ne pas se gêner pour reluquer n'importe quelle femme qui passait devant lui.

Soudain, Alex passa sa main devant mon visage. Je devais sûrement être partie très loin dans mes pensées pour qu'il ait remarqué mon inattention.

« Excuse-moi, tu disais ? », dis-je, rapidement.

« Je te demandais si ça te dirait d'aller boire un verre ? Demain soir par exemple ? ».

Comme il fallait absolument que j'arrête de penser à Denzel, je me forçais à répondre « Oui ». Un grand sourire étira ses lèvres et il semblait réellement content de pouvoir sortir avec moi. De mon côté, j'essayais de montrer le même enthousiasme que lui à l'idée de cette soirée. Je dus réussir à faire illusion puisqu'il ne sembla pas percevoir le moindre signe de réticence sur mon visage.

Nous nous échangeâmes nos numéros, et ayant tous les deux cours, nous nous dirigeâmes chacun de notre côté vers nos salles respectives.

Je vous remercie !
À très vite.

HopeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant