Chapitre 33 : Retour et pardon

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— Tu nous as trahi, Ariane. Je suis tellement déçu de toi.

La concernée se mordit violemment la joue en fusillant son père du regard. Comment pouvait-il dire une chose pareille ?! Elle avait fait son devoir jusqu'au bout ! Elle ne pouvait pas laisser cette famille se noyer dans le scandale. Mais ça, son paternel était infichu de le comprendre.

— Tu dramatises. Ce n'est qu'une démission.

Christian Strauss manqua de s'étouffer. Nom de dieu, il allait finir par faire une crise cardiaque.

— Qu'une démission ? s'époumona-t-il. Tu laisses le département pétrolier à la dérive ! Je ne peux pas accepter ton départ !

Ariane s'enfonça dans son canapé en croisant les bras. Que faisait donc Gabriel ? Il aurait dû rentrer du travail depuis un moment déjà. Son père avait colonisé son appartement depuis trop longtemps à son goût.

— Il va bien falloir pourtant.

— Tu n'es qu'une gamine capricieuse !

La jeune femme se retint de lui sauter à la gorge. Il était plus que temps qu'il s'en aille.

— Tu peux m'insulter autant que tu veux, je ne reviendrais pas sur ma décision. Sors de chez moi maintenant.

Son père fut estomaqué par son ton. Jamais il n'aurait cru en arriver là avec sa petite fille. Ce fichu contrat avait détruit beaucoup de choses...

Ravalant sa fierté, Christian Strauss se dirigea vers la sortie. Il allait lui dire une dernière parole lorsqu'elle l'interrompit :

— Ne t'avise pas de me trainer devant le Conseil de Prud'hommes pour démission abusive. Je n'ai pas le temps pour ça et tu sais que ça ne tiendrait pas la route.

Et sur ces mots délicats, elle lui claqua la porte au nez.

Dans la soirée, Ariane regardait les informations avec une certaine angoisse. Michael Hunter apparaissait sur toutes les chaînes, vantant l'intégrité de la famille Strauss. Il réfutait avec ferveur l'existence du contrat entre les Connor et elle. Finalement, ce requin tenait parole. Plus les heures avançaient, plus les titres devenaient de moins en moins violents à son égard. La tempête était passée.

Vers minuit, un bruit de clé dans la serrure de sa porte la fit sursauter. Gabriel passa enfin le pas de la porte, visiblement exténué.

Ariane se leva rapidement et se précipita vers lui.

— Enfin tu es à la maison ! Je commençais à m'inquiéter ! Est-ce que tout va bien ?

L'homme lui jeta un drôle de regard et posa sa serviette ainsi qu'un gros dossier sur le guéridon à l'entrée. Il retira ensuite son écharpe ainsi que son trench.

Au bout de quelques minutes, il darda sur elle un regard orageux.

— Je ne sais pas ce que tu as dans le crâne, Ariane, mais je te pensais plus fine que ça !

Soufflée, la brune eut un mouvement de recul. Il ne lui avait jamais parlé sur ce ton là. Jamais. Elle eut l'impression de se prendre un uppercut en plein estomac.

— Qu'est-ce que tu...

Gabriel explosa presque.

— Michael Hunter m'a appelé ce soir ! Cette antiquité s'est vantée de te compter dans son équipe désormais. Tu penses, au début je n'arrivais pas à le croire ! Et puis il m'a expliqué votre petit arrangement. Tu crois sincèrement que c'était la bonne chose à faire ? Nous devions montrer un front uni et voilà que tu décides de démissionner de ton entreprise familiale pour partir chez mon principal concurrent ? À ton avis, quelle image est-ce que ça renvoie au monde ? Je vais te le dire ! Celle d'une femme qui retourne sa veste pour aller au plus offrant ! Je n'en reviens pas que tu aies fait une chose pareille !

Pendant toute la durée de ce monologue, des larmes de rage étaient apparues aux coins des yeux d'Ariane. Elle ressentait une telle injustice qu'elle avait l'impression d'étouffer. Comment pouvait-il l'accuser ainsi ?

— J'ai fait ce qu'il y avait à faire pour préserver nos familles !

— Ah tu crois ? J'ai plutôt le sentiment que tu prépares ton futur mariage.

Elle se retint si fort de le gifler qu'elle enfonça ses ongles dans ses paumes jusqu'au sang.

— Je t'interdis de m'insulter de la sorte. Je ne regrette pas mon choix. C'était la seule solution.

Gabriel s'esclaffa en passant sa main dans ses cheveux. Il allait devenir dingue.

— Non, ce n'était pas la seule ! Bon sang, Ariane ! Nous sommes mariés ! Tu aurais dû m'en parler ! Tu penses que j'étais incapable de nous protéger des médias ? Ils me poursuivent depuis mon enfance ! Cette histoire aurait fini par se tasser.

La jeune femme se mordit la joue encore une fois. Elle avait une si forte envie de pleurer que ça en était douloureux.

— Peut-être pour eux mais pas pour tes parents.

— Qu'est-ce que tu veux dire ?

— Le contrat n'est plus parce que ta mère l'a déclaré caduc, Gabriel. Je n'avais pas envie de passer le reste de notre relation à subir encore et encore. Votre réputation sera sauvée grâce à Michael et les répercussions seront minces. C'est tout ce que je pouvais faire pour ne pas gâcher les deux années précédentes.

L'homme d'affaires soupira et s'affala dans le canapé. Il ferma les yeux quelques instants.

— C'était seulement oral, Ariane. Je ne suis pas sûr qu'il soit véritablement sans effet désormais. En plus de ça, ton petit manège a tout de même réussi. Nous n'avons pas perdu une condition essentielle du contrat.

Son épouse fronça les sourcils. Il disait peut-être vrai. Il n'empêche, il fallait faire quelque chose.

— C'est du pareil au même pour moi.

— Nous restons mariés quoi qu'il arrive.

— Oui et je me suis assuré que ce soit le cas le plus longtemps possible.

Gabriel souffla et finit par attraper sa main pour l'attirer à côté de lui. Il caressa doucement ses phalanges, l'air tourmenté.

— Il n'empêche que je ne suis pas d'accord avec ce que tu as fait.

— Je sais. Mais c'est ma décision.

— J'en ai conscience. J'ai confiance en toi. J'espère simplement que ce n'est pas le début des emmerdes.

Ariane s'esclaffa puis posa sa tête sur son épaule. Il lui faisait confiance, c'était tout ce qui lui importait à l'heure actuelle. Après des jours à faire semblant et à mentir, elle était plus qu'heureuse de retrouver son ami.

— Je te redis ça lundi soir.

Captain vint s'installer sur les genoux de Gabriel et celui-ci se mit à le caresser pensivement. Il était encore énervé mais pas après elle. C'était les Hunter, l'objet de sa rage. Ils essayaient encore de lui arracher quelque chose à laquelle il tenait. Pire, Luke allait tenter de se rapprocher d'elle, quitte à créer un nouveau scandale sur fond d'adultère cette fois.

— Méfie toi de Luke, d'accord ?

Ils se dévisagèrent un instant. Ariane pouvait y voir toutes les craintes sous-jacentes.

— Comme de la peste, ça ne change pas.

Il hocha simplement la tête.

— Je vais me charger de mes parents demain. Il vaut mieux que ce soit moi qui leur apprenne que leur belle-fille va fraterniser avec nos ennemis numéro un.

La jeune femme leva les yeux au ciel mais ne répliqua rien. Elle appréhendait un peu leur réaction.

Finalement, ils allèrent dormir vers deux heures du matin. Il restait deux pauvres petits jours avant les débuts d'Ariane au sein de la Hunter Company. Il allait falloir se blinder pour affronter la tempête suivante. C'était une certitude.

Doux sacrifice Où les histoires vivent. Découvrez maintenant