Doux sacrifice

Chapitre 1 : Grande annonce.

Le bruit caractéristique des touches de clavier berçait la jeune femme présente au deuxième rang de l'amphithéâtre. Le professeur s'évertuait à rendre intéressante la matière harassante intellectuellement qu'est le droit administratif. La deuxième année de droit n'avait rien d'une partie de plaisir mais même la conscience d'Ariane ne parvenait pas à la sortir de son état léthargique.

— Ariane, chuchota le voisin de celle-ci. Je sais que tu n'aimes pas cette matière mais tu n'arriveras jamais à valider ton semestre comme ça.

À la suite de cette remarque, il lui donna un coup de coude discret pour la faire réagir.

— Je sais bien Hugo mais j'appréhende pour ce soir, répliqua la brune sur le même ton. Mes parents préparent un mauvais coup, j'en suis sûre.

— Tu dramatises trop. Ils ont seulement dit que vous recevez des invités ce soir. Tu  fais partie d'une famille influente, c'est normal que ton anniversaire se fasse en grande pompe.

Ariane arbora une moue peu convaincue. Elle connaissait parfaitement ses parents et habituellement, sa fête était plutôt discrète. Certes son père invitait certains collègues par convenance mais ça ne se transformait jamais en gala non plus.

Au bout de quelques minutes de réflexion, elle secoua la tête et se replongea dans le cours. Ça ne servait à rien de cogiter, la réponse arrivera bien assez tôt.

— N'oubliez pas d'apprendre régulièrement vos jurisprudences, indiqua le professeur à la fin de l'heure et demi. C'est essentiel pour la compréhension du cours et surtout, ça vous évitera de vous arracher les cheveux juste avant l'examen.

Un « oui » général lui répondit et les étudiants quittèrent l'amphithéâtre avec bonheur. Ils étaient rares à apprécier le cours, en même temps, il fallait vraiment être dingue pour l'aimer selon Ariane.

— Tu n'iras décidément pas en droit public toi, pas vrai ? rit Hugo en déambulant dans les couloirs avec sa meilleure amie.

— Je n'irai pas en droit administratif en tout cas.

Ils rirent tous les deux et sortirent de l'université. La journée était terminée, enfin !

— Bon courage avec tes parents. N'oublie pas de m'appeler juste après ! rappela le garçon en fixant la berline noire qui attendait son amie devant le bâtiment.

— Compte sur moi ! On se voit demain !

Ariane rejoignit tranquillement le véhicule et s'engouffra à l'arrière.

— Bonne journée, mademoiselle ? Demanda Tim, le chauffeur.

— Excellente et vous ?

— Très bonne. Vos parents sont impatients de vous retrouver.

— Et moi donc, murmura-t-elle en regardant à travers la fenêtre.

Le trajet devrait durer une vingtaine de minutes à cause de la circulation. C'est le bon moment pour réfléchir à toutes les possibilités. Peut être qu'ils allaient lui annoncer un voyage à l'étranger ou peut être qu'ils allaient enfin accepter qu'elle prenne son indépendance. Ariane était sceptique. La bataille avait été rude pour qu'elle poursuive ses études avant de rejoindre le navire familial. Son diplôme n'était qu'un accessoire, sa mère le lui avait bien rappelé tout comme son père. Le but ultime était qu'elle reprenne la barre et qu'elle dirige la banque fondée par son grand-père. Dieu que c'était frustrant d'avoir déjà un destin tout tracé à dix-neuf ans. La nouvelle sera forcément importante, la jeune femme le sentait au plus profond de ses tripes.

Tandis qu'elle énumérait les différentes hypothèses, le chauffeur indiqua qu'ils étaient arrivés. Le huitième arrondissement était de loin le quartier qu'elle préférait et c'était là où elle résidait avec ses parents. Ils habitaient un étage d'un hôtel particulier, autant dire que c'était beaucoup pour trois personnes.