28. Wellan

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Je n'ai pas seulement merdé, j'ai tout foiré en ce qui concerne Annita.

Mais ça n'importe plus. Plus maintenant alors que je suis à quelques minutes de partir au galop en direction des frontières que le royaume partage avec Mélène, en compagnie d'Hector. Voilà justement pourquoi je ne veux rien de plus qu'une amitié ; à cause de tous les problèmes que ça apporte. En ce moment, je dois me concentrer sur le royaume d'Astra et la menace des Mélènes pour éviter que des massacres se reproduisent. Le pays a besoin de moi plus que jamais.

Il faut impérativement trouver un moyen pour empêcher d'autres bains de sang de se produire, peu importe le côté d'où proviendrait le massacre.

Tandis que je scelle mon cheval – j'ai insisté pour le faire, au grand désarroi de l'écuyer – , Hector me regarde, adossé contre une poutre en bois. Il a un petit sourire amusé orne ses lèvres.

— Qu'est-ce que tu as dit à ton père pour le convaincre de te laisser sortir de son emprise ?

Je lâche un petit rire sans joie tout en donnant une petite tape au cheval et de l'enfourcher.

— Je ne le sais pas moi-même

Tout est flou depuis ma dispute avec elle. Mon cerveau a complètement occulté tout ce qui concerne mon entretien avec le roi et ma visite à la frontière pour se concentrer sur la fille qui occupe beaucoup trop mes pensées.

Heureusement, Hector, qui se décolle de la poutre et s'approche de son propre cheval, est là pour me fait changer les idées.

— En tout cas, je suis bien content qu'il t'ait enfin permis de sortir. J'ai toujours trouvé déraisonnable l'idée d'enfermer sa progéniture sous le prétexte de la sécurité. Encore plus en ce qui vous concerne, tes frères et toi, vous savez vous défendre depuis votre plus jeune âge.

Notamment grâce à lui.

Depuis que je suis tout petit, j'ai parfois eu des questions à ce sujet, des hypothèses quant aux raisons de cette surprotection, mais je n'ai jamais osé les partager avec mes parents, de peur du courroux de mon père. Je n'ai plus peur désormais.

S'il veut vraiment que je lui succède, il n'aura pas le choix de me laisser découvrir le royaume et de me faire connaitre au peuple hors capitale, sans quoi il pourrait y avoir une révolte ou une passation du pouvoir difficile. Sans oublier le fait que je dois m'habituer à ce monde si différent du mien qui m'attend à l'extérieur des limites qu'on m'a toujours imposées.

Tandis que Hector et moi partons enfin des écuries, suivis par deux soldats qui composent notre escorte, je lâche un rire, toujours perdu dans mes pensées. Le roi, étrangement, n'a jamais eu de problème à me laisser parcourir les rues de la capitale, là où plusieurs dangers se cachent dans les recoins poussiéreux. Il a à peine protesté lorsque je me suis enfui du palais pour combattre les ennemis qui se sont infiltrés dans la cité. Parfois, j'ai de la difficulté à bien le comprendre. Pas seulement ses décisions, mais sa personnalité en tant que telle.

Nos chevaux nous guident sur un sentier moins fréquenté, derrière le palais, afin d'éviter de passer par la ville, là où notre départ se ferait remarquer en un rien de temps. Il s'agit aussi du chemin que j'emprunte parfois pour me réfugier dans la forêt au-delà, loin des tourments de la cour et de mes responsabilités. Il faut gravir une petite colline, qui donne une vue imprenable sur la capitale remplie de vie et d'action, aux alentours verdoyants. Aujourd'hui, le soleil tape fort, pourtant la chaleur ne me dérange pas.

Pour une fois, je me sens utile.

J'en profite pour demander à Hector, toujours à ma hauteur :

— Était-il ainsi quand vous étiez plus jeunes ?

La Tueuse de PrincesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant