La Tueuse de Princes

52. Annita

Le chaos.

C'est le chaos qui a suivi l'assassinat du roi.

Wellan s'est précipité sur son père, des gardes en quantité astronomique ont surgi dans la salle du trône, sortant enfin de leur cachette.

Les cris se sont fait entendre lorsque les corps ont été découverts.

Si je ne ressens aucune culpabilité pour le sort de la reine, je ne peux m'empêcher d'avoir le cœur serré pour le roi. Wellan avait espéré que son père se rende compte des mauvaises actions de sa femme et qu'il revienne sur le droit chemin. Malheureusement, ça ne sera jamais possible.

Désormais, Wellan est en charge. Je me suis effacé dans mes appartements pour le laisser prendre le contrôle de la situation, ne sachant pas vraiment quel est mon rôle dans la situation. Un simple je t'aime ne suffit pas à me donner une place importante dans la hiérarchie. Après tout, je suis une roturière, une personne sans nobles origines.

Sébastian et Zacharie, qui ont été avertis de la situation, se sont empressés de me rejoindre. Lorsque je les ai vus sur le pas de ma porte, j'ai tenté de les envoyer soutenir leur frère. Ils m'ont répondu que c'était à Wellan de prendre son rôle en main et qu'ils ne seraient d'aucune utilité sur place.

Ils se sont allongés sur le canapé de ma salle à vivre et m'accompagnent, attendant avec moi l'arrivée de Wellan. L'ambiance pourrait être au deuil, à la morosité, pourtant il n'en est rien. Je ressens quelque chose d'autre, quelque chose de plus puissant.

L'ère d'un renouveau est arrivée.

— Je n'ai jamais souhaité sa mort.

C'est Zacharie qui a pris la parole, interrompant le silence qui s'était installé.

— Nous avions toujours espoir qu'il puisse changer, qu'il puisse reprendre les rênes de son royaume. On ne saura jamais s'il en aurait été capable.

Sébastian hausse les épaules, comme s'il était indifférent à tout cela. Toutefois, je sais très bien qu'il n'est pas indifférent. Il ne le sera jamais. C'est probablement celui qui réfléchit le plus ici.

— Maintenant, il faut laisser sa chance à Wellan.

— Crois-tu qu'il sera capable de changer le gouvernement ? lui demandé-je, même si ma propre opinion me suffit.

Il me regarde, de ses yeux émeraude si semblables à ceux de Wellan.

— Wellan est l'homme qui se préoccupe le plus de son peuple. Bien sûr qu'il fera un changement.

Lorsqu'il apparait enfin des heures plus tard, rouge, écrasé par la fatigue et les nouvelles responsabilités qui l'accablent désormais, je lui souris. En ce moment, tout ce qui m'importe, c'est lui. Le royaume bien s'écrouler, tant qu'il va bien, ce sera le cas pour moi.

Sans prêter la moindre attention à ses frères, il s'élance vers moi, me soulève et colle sa bouche à la mienne.

— Bon, on reviendra plus tard, entends-je dire.

J'y prête à peine attention alors que j'approfondis le baiser. Il s'est passé tellement de choses aujourd'hui, il y a eu tellement de réponses, nos émotions nous submergent, et tout ce dont j'ai besoin à cet instant, c'est de lui contre moi. De savoir qu'il ne m'abandonnera pas, que nous continuerons le chemin ensemble.

Parce qu'il est désormais la seule personne que j'ai.

Ses mains sur mon corps, sa bouche sur la mienne, son âme chantant à l'unisson avec la mienne. Je pourrai vivre une éternité ainsi.

Cette fois, il n'y a pas de douceur, rien que de la passion à l'état brute. Nous nous mangeons, nous goûtons, nous communiquons notre désir qui nous consume. Pendant quelques minutes, nous oublions cette nouvelle vie qui s'offre à nous, ces scènes d'horreur auxquelles nous avons assister.

Il n'y a que nous.

Lorsque Wellan se détache de moi, un petit sourire étire ses lèvres. Il colle son front contre le mien tandis que j'encercle sa taille de mon bras pour l'attirer à moi.

— Je suis désolée pour ton père, chuchoté-je. Je sais que tu croyais toujours à sa rédemption.

Il lâche un petit soupir, toutefois je sais qu'il n'est pas triste. Pas entièrement.

Malgré lui, il a depuis longtemps fait le deuil de parents qui ne se sont jamais intéressés à lui. Et désormais, il n'a plus de temps à perdre à regretter le passé.

Il doit conduire le royaume d'Astha vers une nouvelle ère. Une ère où on prendra la main tendue des innocents au lieu de l'ignorer. Où on ne cachera plus les enfants aux dons particuliers.

Un monde meilleur.

— Je ne pensais pas devoir prendre ces responsabilités aussi vite, m'avoue-t-il de cette voix basse qui me fait frissonner.

— Tu vas faire d'Astha un meilleur pays, lui chuchoté-je en retour.

— Nous allons faire d'Astha un meilleur pays.

Je penche la tête de côté, ne comprenant pas ce qu'il me dit. Ou ne voulant pas me l'avouer.

Le sourire de Wellan est plus éclatant que le soleil lorsqu'il me murmure à l'oreille :

— Je ne compte pas te lâcher de sitôt, Annita.