Installé sur l'une des rares chaises de ma tente, j'enfouis ma tête entre mes mains, épuisé. La journée a été éprouvante.
Après avoir délaissé le village rempli de fantômes, j'étais déjà dans un état second. Tout ce que je désirais, c'était me coucher et oublier tout ce que mes yeux avaient imprimé dans mon cerveau. Mais c'était sous-estimer la cruauté de la vie.
J'ai à peine fait le tour du campement de soldats. On m'a attribué une tente spacieuse, celle généralement réservée au général, et j'y serais resté toute la soirée si je n'avais pas entendu une voix familière. Elle était là. Je n'aurais jamais cru voir Annita dans un tel endroit. Sur le coup, ça m'a fâché, vraiment. Ça m'a confirmé à quel point je la connais peu.
Et puis, elle m'a dévoilé sa véritable identité. Enfin. On s'est encore chicané.
Mais cette fois, je ne suis pas seulement fâché, je suis furieux
Parce que ça veut dire que le palais a de nouveau été infiltré, parce qu'on y a placé des espions ; une espionne que j'ai trouvée à mon goût, qui me plaisait. Pour la première fois depuis longtemps, je pensais avoir rencontré quelqu'un qui me comprenait, à qui je pouvais tout dire, alors qu'en fait elle ne faisait que me mentir jour après jour.
Putain !
Elle a affirmé qu'elle avait pris la décision de quitter da communauté, et je ne sais pas si je dois sérieusement la croie parce qu'elle pourrait être en train de me mentir – encore – pour mieux paraitre à mes yeux et retourner dans mes bonnes grâces. Mais d'un autre côté, j'ai tellement envie de la croire.
Parce que je ne veux pas la perdre.
Ces deux jours loin d'elle – ou pas si loin, d'après ce que j'ai compris – m'ont permis de comprendre que je me suis davantage attachée à elle que je ne le pensais. Son rire m'a manqué, ses paroles ont résonné dans ma tête, nos conversations passaient en boucle dans mon esprit malmené.
Mais savoir qu'elle m'a menti... elle a beau m'savoir dit certaines fois la vérité, des semi-vérités n'en sont pas totalement une. Il y a tant de signes qui m'indiquent de ne pas lui faire confiance : son attachement à sa communauté, le fait qu'elle a été élevée comme espionne et qu'il s'agit carrément de son métier, les mensonges qu'elle m'a servis jour après jour, la dizaine d'armes qu'elle porte en tout temps comme si elles formaient une partie d'elle, et toutes ses capacités physiques que j'ignore.
Mes frères, particulièrement Sébastian, me conseilleraient de m'éloigner le plus possible d'elle parce qu'elle risque de ne m'amener que davantage problèmes, surtout dans mes futures responsabilités. Mais je ne peux pas m'en empêcher : tout ce que je veux, c'est être avec elle.
La preuve : j'ai tenu à installer moi-même une tente à côté de la mienne, pour l'y installer, avant de relier les deux. De l'autre côté se trouvent deux soldats. Je n'ai pas le choix de la garder parce que je ne sais pas quoi faire d'elle.
Toutefois, ma petite voix intérieure me crie de la pardonner. Elle ne serait pas intervenue dans la tentative d'assassinat si elle ne s'était pas sentie impliquée. Elle n'est pas neutre, et elle l'a démontré à de nombreuses occasions. Et puis, tu peux t'assurer qu'elle ne retourne jamais dans sa communauté, Wellan...
La savoir si près de moi, alors que nous n'avons jamais eu de quartiers personnels aussi proches, m'excite terriblement.
Après une journée difficile, après avoir pleuré dans ses bras avec elle, je n'ai plus envie de me cacher derrière le masque du prince dur. Je désire faire ce que je veux, pour une fois.
Alors, contrôlé par mon propre corps, je me lève pour aller dans juste à côté. Si la tente ne paie pas de mine, elle est assez spacieuse pour accueillir un lit de camp. Annita s'y trouve, avec ses vêtements poussiéreux, ses longs cheveux blonds entourant son visage de porcelaine. Elle est allongée sur le ventre.
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La Tueuse de Princes
FantasyAnnita est une tueuse de l'Ombre, un ordre d'assassins aussi sombre qu'ancien. Lorsqu'on lui demande d'éliminer le prince du royaume de Polaris, adoré par son peuple, elle déménage au palais et se fait passer pour une domestique. Mais la jeune femme...