Chapitre 1

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Maxine

Mercredi 1er septembre 2021

Nouvelle vie, nouvelle maison, nouvelle école. J'étais exactement là où je ne voulais pas être. Le métro m'avait éjecté de la rame comme on se débarrasse d'un déchet. Avec ma grosse valise à trois roues, j'avais du mal à remonter à la surface.

La vie parisienne... je l'avais si longuement rejetée qu'elle s'était à nouveau imposée à moi. Je détestais tout ici, l'impression d'être dans une fourmilière géante, des gens partout, des buildings immenses, des cages à poule en guise d'habitation. Le temps était gris et maussade, l'odeur exécrable, la pollution dérangeante.

Dernière marche et énième coup d'épaule, mon énervement était à son paroxysme. Je rabattais la capuche de mon sweat sur mon visage pour éviter que cette pluie fine et glacée ne vienne se faufiler entre mes vêtements. La dernière chose que j'avais envie c'était de tomber malade et de devoir trouver un médecin compétent et disponible dans ce trou à rats de capitale.

Mon portable vissée dans une main, la valise branlante dans l'autre, je traçais entre les lignes de piétons au visage morne afin de trouver mon chemin dans ce pays du béton. Je me rappelais déjà les mots de mon frère « c'est tout simple, à la boulangerie tu tournes dans la petite ruelle, la porte est marron ». J'étais face à deux foutues boulangeries, une de chaque côté de la rue, avec une ruelle juste à côté. J'allais l'assassiner le frangin. J'appuyais rageusement sur l'écran de mon téléphone pour essayer de le joindre.

Je savais que c'était une cause perdue, il dormait à cette heure-là. Je n'allais pas tarder à le réveiller lorsque je serais en face de lui. Je pris la première ruelle, s'il n'y avait pas de porte de couleur marron j'allais faire demi-tour et l'attendre dans un café.

Ma poisse légendaire me fit faire demi-tour rapidement, un cul de sac et aucune porte marron, des poubelles oui, des sacs poubelles oui également, un appartement non. Je repris la rue principale et trottinai pour traverser pendant que le feu était encore vert, je n'allais pas attendre cinq minutes dans cet environnement hostile. J'aurais clairement dû rester à Lyon, la chaleur, les beaux immeubles, ici j'avais l'impression d'être dans le monde à l'envers.

Une voiture me klaxonna et l'envie de lui faire un doigt d'honneur me traversai l'esprit. Je tirai mon bagage sur la marche entre la route et le trottoir pour l'entendre craquer de nouveau, une nouvelle roulette venait de rendre l'âme.

Note à moi-même : on n'achète pas une valise de son ancienne colocataire.

Je voyais bien la boulangerie et la ruelle, si ce n'était pas la bonne adresse, il allait entendre parler du pays le frangin !

Le dieu des portes marrons devait finalement exister, elle était là, en face de moi. Une porte récemment peinte avec deux plaques dorées de médecin accrochées juste à côté de l'interphone. Je recherchais le numéro qui m'intéressait lorsque la porte s'ouvrit rapidement, me faisant presque perdre l'équilibre de surprise. Une mamie d'environ 80 ans sortait du hall d'entrée, avec une canne et une multitude papiers à la main. Elle me passa devant sans s'excuser. Je profitai de la porte ouverte pour me faufiler à l'intérieur. La porte du cabinet médical se refermait lentement, signe que la mamie sortait de chez le médecin.

Le hall était en pierre blanche avec un escalier en bois menant aux étages, pas d'ascenseur. Evidemment, déjà que j'étais ici cela aurait été trop simple de me donner un ascenseur pour monter au troisième étage de ce vieil immeuble.

Je soupirai longuement en bas des marches arrondies à cause du poids des années. Je rangeai mon téléphone dans la poche de ma veste en entrepris de monter une à une les marches en soulevant mon fardeau à deux roulettes usées.

CIGARETTE - PLKOù les histoires vivent. Découvrez maintenant