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À deux heures du matin, après une nuit brûlante, Wakasa tenta de revenir sur Terre. L'envie le tarrodait - Shinichiro devenait son énigme qu'il devait résoudre en un temps éclair. Il attendait, dans la chambre assombrie par la nuit pesante qui passait. Plongé dans la rumination taciturne de son esprit, Shinichiro glissa sa main sur la hanche de son amant, l'attrirant contre lui. Le silence régnait en maître dans la chambre. Il était presque étouffant. Dans un soupire commun, le noiraud alluma la lampe de chevet, son regard noir heurta celui du blanc.
- Tu veux que je mette la musique ?
Imaushi acquiesça faiblement, sous le sourire de l'autre qui se leva lentement pour attraper dans son sac de voyage un enceinte et son téléphone. Aussitôt les notes résonnèrent dans la pièce, Ordonary Love de U2 pulsa entre les murs.
Son visage s'attendrit, Wakasa se redressa dans le lit, s'adossant contre le mur.
Sano se surprit à analyser son amant. Imaushi avait fermé les yeux - il semblait méditer sous son expression concentrée, sa bouche fermée serrait ses fines lèvres tremblantes, quant au reste de son corps, celui-ci s'empruntait à de brèves frissons qui le faisaient sursauter. Shinichiro crut que le monde venait de s'arrêter. Lorsqu'il s'approcha à nouveau du blanc, il déposa un tendre baiser sur son front. Ses pupilles s'attardèrent sur les détails de ce faciès - fatigué et réservé, capable de se déformer dans la colère, le désir et l'envie. Cette fois-ci, ce fut un baiser qu'il déposa sur cette bouche.
- Dis-moi ce que je peux faire pour toi... Waka.
Le journaliste pensait à l'absurdité de cette situation. Pourquoi fallait-il que l'obession de connaître Sano soit un disque infernal dans son cerveau. Il l'aimait, soit. Mais, l'obssession tournait en boucle chaque jour. Il souffla :
- Apprends-moi à me connaitre et à te connaitre, il fixait la baffe qui diffusait les notes tendre et calme de la mélodie. Puis, dans un mouvement lent, il posa ses orbes améthystes dans celles sombres de Shinichiro.
Le bras de Sano s'élança vers le visage du journsaliste qui restait dans l'attente. De son index, il fit glisser le dos de sa main le long de sa joue toujours dans le fredonnement rock qui les berçait.
- Mon langage n'est pas le tiens... alors je vais te le montrer. Son corps heurta celui de blanc qui posa sa tête bien trop lourde à son goût sur le torse qui se trouvait à proximité. Ils se sourirent un instant. Sano l'embrassa :
- Que voudrais-tu que je sache sur toi ?
- Tout, mumura-t-il en sentant le souffle chaud sur ses lèvres humides.
- Mon histoire n'est pas bien différente de la tienne. Elle est complexe, étrange. Parfois je m'y perds... mais, elles se complètent.
Waksa s'apprêtait à lui réponde, mais il devança :
- Tu ne vas pas être déçu de notre voyage ! Mais... résonne. Je ne veux pas que tu me détestes.
- Pourquoi je le ferais ? Demanda le blanc en se décollant de son amant, qui semblait à son tour ailleurs.

C'était un dessin.
Un réseaux rigoureux de blessures.
Au premier coup d'oeil, Waksa comprit ce que Sano voulait lui monter. Les entailles étaient nombreuses, mais parfaitement ordonées. Un véritable schéma d'anatomie se dressait devant lui, montrant interstices, coupures et blessures partant des tempes, se creusant jusqu'à la gorge, pui qui se déployaient : longeant horizontalement au-dessus des clavicules... Sur le long des bras - bicepps, plis du coude, poignets... Sur le torse, le motif prenait l'emsemble du corps.
La série rappelait les pointillés de patron qu'utilisent les modélistes pour faire de la couture. Jusqu'ici, on avait parlé de vingt-sept coups de couteaux et évoqué la sauvagerie du meurte. Wakasa supposait à une violente pulsion anarchique, créant un désordre barbare dans la tête. Le cadavres nettoyé montrait cependant, des traces d'un acte soigné, méthodique.
Malgré l'heure et la nausée, Wakasa avait retrouvé de sa lucidité malgré le doute en lui. Les photographies changeaient son point de vue. Sano avait un lourd passé, agissant dans le meurtre. Il avait pris son temps pour dessiner ce motif - le suplice avait duré des heures.
- C'est la voie du sang.
Imaushi leva les yeux. Il se trouvait dans le bureau de Mutô, au General Hospital de Kuala Lampur, glacé par la climatisation. On entenait au loin le chant de muezzins. Vendredi matin : la ville toute entière vibrait de prière.
Le médecin, affalé dans son fauteuil, croquetait une barre de chocolat. Il répéta :
- La voie du sang. Sano a choisi le réseau de veines.
La blanc songea un instant : « Le Chemin de Vie ».
- Expliquez-moi, demanda-t-il.
Mutô se leva et contourna le bureau. Il tendit une barre chocolatée vers le cliché, répendant des graines de sésames sur le papier brillant :
- À la base du cou : veines jugulaires. Sous les aiselles : veines auxiliaires. Dans l'entrejambe : veines iliaques. Dans les cuisses : veines fémorales... je pourais donner tous les noms. Il a transpercé chaque veines importantes. En revanche, il a soigneusment évité les artères.
- Pourquoi ?
Le légiste retourna s'asseoir. Son détachement coïncidait parfaitement avec le froid du bureau :
- Parce qu'il l'a saignée. Vivante. Et qu'il voulait que son plaisir dure. S'il avait tranché les artères, le sang aurait jailli en quelques giclées énormes et basta. Les veines sont soumises à moins de presions. Le sang y coule plus lentement. C'est pour ça aussi, qu'il a contourné le cœur et les poumons. Il voulait que la machine fonctionne jusqu'au bout.
- Mais elle n'est pas la seule à avoir subit cette mort...
- Non. Il y a eut deux fois le même scénario.
- Concrètement, comment a-t-il fait ?
- Il a placé son couteau de plongé à l'horizontale, puis il tanché chaque veine, coupant la route au flux sanguin.
- Il a répété ce geste sur trois autres personnes... et les autres comment sont-ils morts ?
- Simplement, répondit le médecin en baillant, par un flingue.

𝙇𝙖 𝙏𝙧𝙖𝙘𝙚 𝘿'𝙪𝙣𝙚 𝙇𝙞𝙜𝙣𝙚 |ʷᵃᵏᵃˢʰⁱⁿ|Où les histoires vivent. Découvrez maintenant