34

16 2 0
                                    

- Viens. Y a urgence.
Taiju l'attrapa par l'épaule. Le geste même impliquait une situation grave : jamais il n'aurait osé poser la main sur Sano, à moins que les circonstances ne soient exeptionelles. Shinichiro lâcha son explication avec Wakasa, et suivis le plus costaux.
Il était treize heures. La maison était écrasée par la chaleur.
Ils franchirent le salon en tortinant presque dans les couloirs - le soleil se cachait derrière les rideaux, créant une énorme ombre dans la pièce. Autour d'eux le silence, enfin presque. La télévision diffusait une chaîne d'information directement reliée aux Phillipines, si bien que les images semblaient alarmées les sens de Taiju qui ne savait où donner de la tête.
Sano ne dit rien. Continuant à le suivre sans rien dire.
Cependant, le regard alarmé de son ami, le rendait perplexe.
- Mais qu'est-ce qu'il se passe ? Finit-il par en regardant autour de lui.
Shiba ne répondit pas. Les muscles de son bras son bandèrent violemment, il se préparait à une douleur... tandis que de son index, il désigna la télévision. Encore cinq secondes d'attente, et le calme survint.
Le jeune homme augmenta le son de la radio maintenant. Sano le regarda sans comprendre, jusqu'à ce qu'il constate les images sur l'écran. Quelques minutes plus tard, ils se regardaient dans le blanc des yeux, horrifiés par la vision fantomatique de ce qu'il se passait à Manille.
- Mais... c'est quoi ce bordel ?
Shiba ne dit toujours rien, plongé dans un mutisme qui ne lui ressemblait pas. Il attrapa deux cigarette dans son paquet et en tandis une au noiraud.
Le jeune homme soupira, analysant les images, et la radio qui parlait sans s'arrêter.
Soupirant, il regarda alarmé son ami.
- Ne me dit pas que... souffla Shinichiro. Putain de merde !
Taiju se lança à la poursuite d'un verre et d'alcool. Shinichiro lui emboîta le pas, ravalant sa colère. Ils se mirent à boire une gorgée de liqueur, puis soufflèrent dans un râle desepéré.
- Je pensais que tout était métrisé...
- Tu vois bien que non.
Finalement, le Tenjiku venait de faire explosé sa planque. Son gang était en danger.
Il ne parvenait plus à parler - son corps s'était figé sur place, ne comprennant rien à la situation. Est-ce que son ami avait suivis ses conseils ? Shinichiro n'en savait rien. Un doute le submergea, augmentant violemment en lui - il s'insinuait en lui parcourant ses veines en un étrange frisson.
Dans une démarche mécanique, il se mit à tourner en rond. Marchant encore, et enocre. Il essayait de se distraire. De penser à autre chose. Rien ne vint... ruminant son échec, il expira. Shinichiro avait tous les indices.
- Merde.
- Ouais, comme tu dis. Tu vas faire quoi du coup ?
Le plus costaud posa son verre sur le comptoir. Sano distingua une paresse suite aux évènements. Son crâne le rappela à l'autre. Des toiles enchevêtrées de confusions se tissaient dans son esprit. Dans ce tunnel sombre, la lumière s'éloignait. Emprisonné, dans sa tête, il ne parvenait pas à voir ce qui l'attendait.
- Faut que je sorte...
Taiju le suivait dans la fournaise. Au delà, il y avait la liberté. Un renouveau qu'il ne goûterait pas. Puis, plus loin encore, des marécages...
Sano sentit une coulée glacée dans son dos. tel un fantôme, il marchait dans la forêt, froissant les feuilles sur son passage.
Ce fut à ce moment là qu'un souvenir surgit en lui.
- J'ai déjà tué. Souffla-t-il en s'arrêtant sur place. Son regard se figea sur place, ses mains tremblèrent. Puis des images distinctes se mirent à passer sous ses paupières comme des flashs.
- Shin...
- Putain de merde. J'ai déjà goûté au sang ! Hurla-t-il cette fois dans sa torpeur. J'ai... tué... j'ai tué... j'ai... tué...
Son coeur se mit à battre plus vite. Ses genoux flanchèrent, une larme coula le long de sa joue. Shinichiro avait l'impression de devenir fou. Plus il avançait, plus il se mettait à danser, plus il se confrontait à sa nature.
C'était une valse. Une horrible danse. Q'il se cachait depuis longtemps.
Tout ça parce qu'il avait sombré. Rien de ce qu'il avait fait de sa vie ne lui semblait à un pure hasard.
- Shin, c'est pas toi !
- Qu'est-ce que t'en sais ?
Shinichiro revit la curiosité le frapper. Il imaginait un corps... rachitique, privé de défense, errant dans les ténèbres, touché par la follie.
Il n'en pouvait plus de son coeur qui battait trop vite. Il en avait tellement mal, qu'il pensait à se l'arracher tout de suite. Mais, il se trompait. Une part de lui, voulait vivre. Juste un peu pour pouvoir cesser ce carnage.
Privé de toute logique, il se prit dans une rire. Sadique, froid. Il riait jaune en se sentant sal, mauvais. Pourquoi suivait-il ses traces au juste ?
- Je suis un monstre, et je l'entraîne dedans... murmura-t-il en fixant le sol humide de la forêt.
- Dis pas n'importe quoi. Déclra Taiju au bout d'un long moment de silence.
Il s'accroupit, posant sa main sur son épaule, pour le regarder de ses yeux jaunes et sévères :
- Tu n'es pas un monstre, tu devais le tuer. Tu sais pourquoi ?
- Mais j'ai tué une femme !
- Tu as tué des hommes Sano, pas une femme. Bordel ! Cria son ami, en le poussant.
À l'écart de la maison, un jeu de regard furieux se faisaient entre les deux amis. Une odeur de transpiration, de peur et de colère plainait sur la forêt.
Sano connaissait cette sensation horrible en lui. Sa migraine, cette excès de violence ; lui provoquait la rancoeur de toutes ses années.
- Il va falloir que tu retrouves vite tes esprits, et que tu partes gérer tout ça.
Taiju se leva, tendant sa main au noiraud pour l'aider à se relever. Ils avançèrent un long moment à deux, jusqu'à ce qu'ils s'assoient par terre. Sano suivit le mouvement. Le choc de l'ombre, après le soleil apaisait ses esprits, jusqu'à ce que son ami ne sorte de sa poche de quoi fumer. Il dut s'arrêter de réfléchir ; il attrapa la pipe, et le sachet de plante séchée qu'il lui tendait. Il connaissait bien le produit. De l'opium. Cette drogue qui lui vait fait oublié tout un tas de chose. Une saloperie qui lui avait fait oublier sa propre existence pendant des mois.
Dès la première inspiration, il ferma les paupières, sifflant entre ses dents pour faire échapper la fumée de sa bouche. L'effet fut bref. Il planait déjà.
Son fantôme se manifesta devant ses yeux, il avait peu d'allure : ses épaules affaissées par un manque de confiance, ses yeux vides d'émotions. Il tournait en rond cherchant quelqu'un dont il ne se souvenait plus.
Sano ne savait plus faire la distinction du réel et de son euphorie... il sentit le regard de Taiju sur lui, alors, il souffla, prit dans un moment de lucidité :
- Je l'ai déjà connu.
- Qui ?
- Waka... expira-t-il en souriant niaisement. À l'époque, je n'avais pas compris pourquoi j'avais si mal tourné. Mais, il m'avait oublié, et je ne voulais pas le perdre dans mon monde. Donc je suis partis de sa vie comme j'ai dû de sa mémoire pour nous deux, je ne pouvais pas lui manquer, non ?
- Hum... dis comme ça... peut-être, mais tu l'as quand même retrouvé, et tu l'emmènes avec toi. Dit Taiju, en fronçant le sourcils, le dévisageant légèrement, tandis qu'il inspira un peu d'opium.
- Tu sais pourquoi ? Le noiraud se tut dans sa confidence, laissant planer le silence. Parce qu'il est ma liberté. Le seul à blâmer, c'est moi, pour mon égoïsme. Finit-il par souffler en constatant un frisson en lui.
- Quitte-le alors.
- Je peux pas.
Shinichiro sentit une nouvelle vague de fureur l'envahir. Elle le saisit d'un coup, qu'il se redressa aussi vite.
- J'en ai plein le cul de ce merdier ! Pesta-t-il en regardant le sol. Je vais détruire le Tenjiku, et en finir pour de bon avec les gangs ! C'est un poison... le monde est un poison. Il prit une grande inspiration, pour fixer un coin de lumière entre les branchages. Il semblait presque rêver. Mais, il reprit son monologue :
- Lui, il est ma délivrance. Je... il se coupa dans son élan, dévisageant son ami qui avait un foutu ructus plaqué sur le visage.
Taiju suivit le mouvement, et sourit, vidant le reste de drogue dans la forêt :
- T'énerve pas. Je vais te suivre cette fois-ci.
- Toi ? Putain qu'est-ce qu'il t'arrive ?
Shiba se désigna dans un rire abruitissant, alors qu'il sortit une nouvelle cigarette de sa poche. Sano se pencha vers lui, pour le comprendre, mais il souffla d'exaspération. C'était complètement débile comme plan.
- Izana nous cherche des noises depuis le jour où tu as sombrer. Ça fait trop longtemps que ça dure pour laisser ce merdier continuer. Avoua le jeune homme. Il sait que tu as un manque à combler, mais... ce manque n'existe plus, n'est-ce pas ?
Sano répondit en silence, acquiesçant comme un enfant.
- Alors je vais faire venir mes hommes, toi tu me diras ton plan.
  Il eut une brève attente avant que les deux amis se dévisagent comme s'ils étaient des inconnus.
Shinichiro se souvint distinctement de son passé. Des brides de souvenirs défilaient sous ses lourdes paupières, alors qu'il fermait les yeux pour reprendre un peu plus de lucidité. Des passages lui firent tourner la tête, alors qu'il approuvait tout seul cette conversation.
- T'as intérêt à être la cette fois. Dit-il en fixant Shiba dans les yeux.
- Fais-moi confiance, je serais là dès que tu me diras ce que tu prévois de faire. No problem...
Sano rit sans répondre. Taiju l'interpella encore une fois. Shinichiro lui envoya son poing contre le torse amicalement.
- T'éponges ta dette sale trou duc ?
- Plus ou moins, sourit l'autre en le bousculant. Et aussi parce que j'ai des choses personnelles à gérer. Tu vas y arriver Shin. Je crois en toi.
- T'as de l'espoir, sourit le noiraud.
Il secoua la tête, attrapant son téléphone qui s'était mis à vibrer, mais à cet instant, il se ravisa de finir la conversation. On venait venait de lui envoyer un message. Celui-ci semblait inquiet, et une multitude de doutes le concernant le fit grimacer. Ses pupilles fatigués, légèrement agacés, se mirent à vivre tandis qu'il se levait avec empressement. En face de lui, près d'un arbres exotiques, il croisa les yeux ternes de son amant. Son sourire pâle, son souffle léger et sa peau douce raviva son esprit complètement à l'ouest. Pourquoi se mentir ? Il l'aimait dans tout ce merdier.
   Wakasa s'avança vers les deux hommes, le souffle court et son front légèrement luisant.
Sano en était fou : il ne pouvait pas l'abandonner dans sa fureur, et ses doutes.
Il baissa les yeux, et sourit à son ami, qui le regarda sans trop comprendre. Il venait de prendre une décision. Il n'allait pas donner de chance à Izana, et il contacterait ses amis dès qu'il sera passait sous la douche. S'ils réussissaient, alors il se sauverait dans une vie normale...
- Je pars dans deux jours, dit-il en jetant un regard à Taiju. Tiens-toi prêt d'ici là.
- Promis, répondit l'autre tandis que Sano rejoignais son amant.

𝙇𝙖 𝙏𝙧𝙖𝙘𝙚 𝘿'𝙪𝙣𝙚 𝙇𝙞𝙜𝙣𝙚 |ʷᵃᵏᵃˢʰⁱⁿ|Où les histoires vivent. Découvrez maintenant