BOURREAU DES COEURS - TOME 1 - Le Bourreau

CHAPITRE 22 - Isabella

— AAAAAAAAAAAAHHHHHH !!! Hurlent les filles en chœur, tandis que j'use de toutes les forces qu'il me reste pour garder la tête froide.

Beverly...

Qu'est-ce qu'il t'a pris ?

J'observe son visage morne et son teint blanchâtre, les jambes tremblantes. Le liquide pourpre qui dévale son torse sèche à mesure que le temps s'écoule et que ses derniers souffles de vie prennent la fuite.

— Pourquoi... POURQUOI ?! Sanglote Hailey en plaquant maintenant ses mains par-dessus ses yeux pour ne plus assister à cette abomination. On aurait p...

— C'était trop tard... La coupé-je. Elle avait déjà perdu trop de sang...

Je m'approche lentement du corps sans vie de notre camarade, si jeune, et l'observe quelques secondes avec tristesse, avant de tendre une main vers son visage.

— Qu'est-ce que tu f... Commence Alexandra, en pleurs.

— Je lui rends le visage d'ange qu'elle a toujours eu...

J'approche encore puis pose mon index et mon majeur sur ses paupières pour les fermer. Une fois fait, je baisse les yeux et les plonge dans la mare de sang qui git sur le carrelage blanc. J'y vois mon reflet.

Pauvre Beverly...

Je te promets que tu ne seras pas morte en vain.

Malgré ce que peuvent penser les autres personnes, je ne pense pas que le suicide soit une marque de faiblesse.

Le visage hanté par la souffrance, Beverly gît contre le sol froid et dur. Et même lorsque je dépose la pulpe de mes doigts sur sa poitrine, je ne ressens plus les battements de son cœur qui, jadis, résonnaient dans les immenses pièces, comme dans un tunnel infini.

Pardonne-moi, Beverly, de ne pas avoir vu.

Pardonne-moi de ne pas avoir décelé tout le malheur qui encombrait ton âme d'enfant, ou de jeunes femmes qui avait tant de choses à vivre encore.

Pardonne-moi de ne pas l'avoir empêché de t'emmener.

Pardonne-moi pour ma faiblesse.

— Je te fais la promesse solennelle que je te vengerai, Beverly... Murmuré-je, d'une voix à peine audible.

Le visage dès à présent gorgé des larmes que je n'ai pas su retenir, je me redresse. Et, une fois debout, je fais face à Alexandra et Hailey, blotties l'une contre l'autre, et qui elles, comptent encore sur moi.

Je ne peux pas abandonner.

Nous ne pouvons pas abandonner.

Il est absolument hors de question que l'on laisse Hadrian gagner cette guerre sans merci à laquelle nous ne pourrons pas échapper.

J'inspire profondément, puis m'adresse à mes camarades :

— Il faut qu'on se débarrasse du corps...

— Quoi ?! Mais tu es complètement malade ! S'exclame Alexandra. T'as pas de cœur !!!

— ALORS, QUOI ?! Tu préfères qu'elle reste ici, qu'elle gise auprès de nous toute la sainte journée ?! Tu veux prendre ta douche en sa compagnie, peut-être ?! Parce que moi, non !

— Oui, je... T'as raison... Sanglote Alexandra en faisant un petit pas en avant pour me rejoindre.

Alexandra est bien plus sensible que moi. À bout de forces, elle se penche en avant, en tremblant comme une feuille.