CHAPITRE 44 - Hadrian

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Je ne pouvais pas tomber sur meilleure opportunité. C'est donc le moment de sortir le grand jeu.

La jeune femme a mis une éternité à terminer son cocktail, trop occupée à me regarder, comme si ma queue était à la place de sa paille. Autant dire que cela fait de trop longues minutes que je force ma bile à rester bien en place. Et pendant tout ce temps où elle se confiait tant sur sa vie professionnelle que personnelle, je lui ai lancé des regards insistants, auxquels elle n'a visiblement pas résisté.

J'ai bien appris ma leçon.

J'ai appris comment elle avait rencontré ce fameux Shawn, mais aussi comment elle en est arrivée à devenir sa maîtresse officielle. Et par heureux hasard, j'ai pu en apprendre beaucoup plus sur cet homme avec qui Isabella vivait depuis des années, tout ça grâce à cette femme dont je n'aurais jamais pensé croiser la route. Cet homme a l'air d'être une enflure. Pourtant, il se tape deux femmes en même temps. C'est curieux.

Je me concentre sur cette Marjory, et lui fais du charme sans cesse. Dès que l'occasion se présente, je lui fais un compliment. Dès qu'elle plonge ses prunelles dans les miennes, je déclenche cet éclair d'excitation dans mon regard qui lui donne envie de se faire prendre. Dès qu'elle sourit, je me pince les lèvres en admirant ses lèvres pour lui faire comprendre mes intentions.

Finalement, ce jeu est encore plus amusant que ce que je pensais.

Maintenant, il ne reste plus qu'à l'emmener loin d'ici.

Je continue de la regarder, même lorsqu'elle a terminé son discours et qu'elle finit de siroter son Black Velvet. Sa langue joue de temps à autre avec l'extrémité de la paille. Il me semble que cela signifie que Mademoiselle souhaiterait que je baise sa bouche. Ce qu'elle ne sait pas encore, c'est que toutes ces avances ne servent à rien, bien au contraire.

Je continue de l'écouter, encore et encore, en jouant mon rôle à la perfection. Plus rien ne me fait défaut avec l'expérience. Mais bien vite, je commence vraiment à m'impatienter. Et je meurs d'envie de torturer cette femme pour avoir osé placer au moins quatre-vingt-dix mille mots en une seule conversation. Elle me demande parfois d'approuver, à coup de « J'ai pas raison ? », « Pas vrai ? », « Non ? ».

Évidemment, je vais toujours dans son sens. Même si parfois, soutenir ces idées matriarcales et son véganisme me donnerait plus envie d'aller me jeter du haut d'un pont, plutôt que de supporter ses discours insensés. Je me fiche complètement de tout ça. Je n'ai qu'un but dans la vie : la faire mienne.

— Je passe une merveilleuse soirée, Damian !

— Oh ! Moi aussi, si vous saviez !

À d'autres.

J'en viens à me demander comment ce fameux Shawn arrive à supporter cette femme, même si ce n'est qu'une histoire de baise. Il faut tout de même se la coltiner. Et puis d'ailleurs, elle et Isabella sont tellement différentes que j'ai du mal à imaginer comment ce Shawn peut avoir le goût de s'abaisser à cette idiote de Marjory. Je me demande si elle n'a pas encore trouvé le moyen de parler même avec un bâillon entre les dents, celle-là.

Il faudra que je teste ça.

Depuis des heures, à mesure qu'elle débite de ses paroles, j'invente de nouvelles manières de la torturer. Et je commence même à comprendre tous ces hommes sur les forums, qui répètent sans cesse : « j'ai envie de tuer ma femme ». Heureusement que je ne suis pas du commun des mortels : je suis bien au-dessus de tout ça. Ce qui fait que j'échappe à ce quotidien impensable pour moi.

Tout à coup, la jeune femme commence à tituber sur sa chaise. Alors, en vrai gentleman, je passe un bras sur sa taille pour la soutenir.

— Pardon, je... Je crois que j'ai un peu trop bu...

BOURREAU DES COEURS - TOME 1 - Le BourreauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant