CHAPITRE 15 - Isabella

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Presque vingt-quatre heures se sont écoulées depuis les épisodes de la veille. Je le sais parce que Victor est revenu deux fois : la première fois pour notre déjeuner, la seconde pour notre dîner. Étrangement, et même si nous sommes maintenant des « captives », nous gardons l'appétit et engloutissons tout ce que nous pouvons, à chaque fois que les assiettes sur la table sont pleines. J'ai viré de bord. Seule Eleanor doit être forcée pour nous accompagner et daigner attraper un quignon de pain ou un petit bol de riz. Elle baisse les bras. Encore plus que lorsque nous nous sommes rencontrées.

Pourtant, elle est restée en paix. Hier soir, Victor n'est pas venu la chercher, ni aucune d'entre nous, d'ailleurs. Et c'est tant mieux.

Quant à moi, j'ai passé une nuit mouvementée, à répondre aux questions incessantes de mes camarades de chambre, qui étaient choquées par mon comportement d'allumeuse. Alors je leur ai simplement dit que je cherchais à lui soutirer des informations. Je devais à tout prix récolter ce qu'aucune d'entre elles n'est capable de chercher. J'ai cru comprendre, à travers ses paroles, qu'Hadrian pouvait nous observer à chaque instant. C'est déjà ça. Et ça ne m'a couté qu'une mise à nu.

Ce que je leur ai caché, c'est que cela m'a excitée.

Lorsque j'ai retiré ma robe, et que je l'ai laissée tomber sur le sol, mes seins se sont dressés à une vitesse phénoménale et mes mamelons sont montés au ciel comme si les mains d'un homme parcouraient mon corps. Je pouvais sentir des papillons dans mon bas-ventre, et presque sentir mon fluide corporel glisser sur mes lèvres et coller à mon entrecuisse. Victor a beau être un sadique - presque autant qu'Hadrian -, il n'en reste pas moins séduisant. La perspective de le manipuler m'a beaucoup plu.

Je me demande si c'est simplement parce que, en fin de compte, j'ai pu enfin avoir le dessus sur lui, pendant quelques minutes, le dominer comme lui a pu me dominer. Victor est un homme bourré d'hormones. Alors, j'ai tenté le tout pour le tout. Je me suis littéralement déshabillée devant lui, et j'ai aimé ça. Et si les filles n'avaient pas été là à nous observer, je pense que je serais allée jusqu'à glisser mes doigts entre mes cuisses pour titiller mon clitoris qui était en feu et ne demandait qu'à être sollicité.

Et pourtant...

Ça n'a pas fonctionné.

Il a évidemment vu clair dans mon jeu. Après tout, je n'ai jamais été du genre à manipuler mes semblables pour leur soutirer des informations, encore moins à jouer de mes charmes pour arriver à mes fins.

J'ai perdu une bataille.

Pas la guerre.

Des heures sont passées depuis la visite de Victor pour nous apporter notre dîner. Il a dû s'écouler entre trois et quatre heures. Nous prenons l'habitude de calculer l'écoulement du temps pour ne pas nous sentir trop perdues. Déjà que nous vivons en-deçà du monde, il ne manquerait plus que l'on perde toute notion du temps ainsi que notre tête.

Curieusement, nous apprenons à écouter notre corps plus que de raison. Je sais, par exemple, qu'il doit être environ minuit, si j'en juge par mon niveau de digestion. Mon ventre a cessé d'émettre des gargouillis oppressants, et je suis allée faire la grosse commission, avant de prendre une bonne douche.

Nous avons pris une décision de taille, les filles et moi. Tant que personne n'entrera, nous resterons nues, ceci afin de pouvoir laver nos robes durant la nuit, et de les remettre le matin, avant le passage de Victor. Cela fait quelques jours que nous sommes là, sans linge supplémentaire : il a bien fallu trouver une solution pour ne pas tremper dans notre crasse.

Dieu merci, nous avons une douche et tout le nécessaire, ici.

C'est exactement ce que nous avons fait, ce soir : nos cinq robes sèchent sur le porte-serviette de la salle de bain. Nous les avons frottées avec le gel douche à disposition, encore et encore. Elles empestaient si fort que la pièce en était embaumée.

BOURREAU DES COEURS - TOME 1 - Le BourreauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant