Duncan

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La journée a été d'une telle intensité que je ne m'en remets pas. Enfin mon cœur et mon entrejambe ne s'en remettent pas pour être tout à fait franc.

Annabelle m'a embrassée ! Je ne pensais vraiment pas qu'elle oserait faire le premier pas, je l'ai clairement sous-estimée. Et c'est ça qui me plaît chez elle. Je ne sais jamais ce qu'elle va faire ou dire. Totalement imprévisible.

En me remémorant notre étreinte un peu poussée, j'en ai des frissons. Je la désire tellement que ça en est douloureux. Mais pourtant je l'ai repoussé. Elle s'offrait à moi, elle me désir tout autant. Et j'ai pris peur. Quelle connerie je lui ai dit! C'est sorti tout seul! "On ne devrait pas...", n'importe quoi !

Je me prends la tête dans les mains et me maudis intérieurement. Puis cette photo qui vient casser l'ambiance. Merci papa. Je ne te connais même pas et tu arrives encore à me faire sentir comme un moins que rien. Ça me blesse vraiment de savoir qu'il possédait une photo de moi et qu'il n'a jamais cherché à me voir.

Je regarde par la fenêtre. La soirée est bien entamée et je me sens soudainement à l'étroit dans cette chambre d'hôtel. J'enfile mon manteau et sors de cette modique pièce.

Le froid me percute de plein fouet. Je redresse le col de mon pardessus et enfonce les mains dans les poches. Même si nous sommes vendredi soir, il y a peu de monde dans les rues.

Je prends le temps d'observer cette ville. Je ne m'y suis jamais intéressé. Étant donné que je ne pensais pas rester aussi longtemps. Il y a quelques boutiques d'alimentation telles qu'une boulangerie, une supérette et à ce que je vois, une confiserie artisanale.

Je continue sur la rue principale et vois une enseigne allumée qui m'intéresse. Un pub. Je pousse la lourde porte du troquet et me retrouve dans une ambiance tamisée avec une musique en fond sonore. Même si l'endroit n'est pas très grand, il n'y a quand même pas beaucoup de monde. Je décide de m'installer au bar et commande une bière et un burger au grand type maigrichon et sympathique de derrière le comptoir.

Je sors mon portable et remarque un appel en absence. Il s'agit de ma mère. C'est vrai que depuis que je suis ici, je ne l'ai pas contacté. Je me promets de l'appeler le lendemain. Je range l'appareil dans ma poche et prends une grande gorgée de bière que le barman a mis devant moi quelques instants plus tôt.

Je sens un courant d'air froid lorsque la porte du bar s'ouvre. Une personne s'avance vers le comptoir. Je tourne la tête et j'aperçois Annabelle, le nez rosie par le froid certainement. Ça lui donne un certain charme.
J'esquisse un sourire quand elle me voit. Elle aborde une mine étonnée.
— Duncan! Quelle surprise de vous voir ici. Vous venez souvent?
— Non c'est la première fois, j'ai bien fait on dirait.
Je regrette instantanément ces derniers mots. J'ai l'impression que mon cerveau vrille à chaque fois que je vois Annabelle.
À son regard, je sais que j'ai fait mouche avec mes paroles spontanées. Apparemment ça a du bon, je devrais peut-être essayé de l'être plus souvent.
— Et vous Mme Cameron, vous venez souvent ici?
— Oui ça m'arrive régulièrement. Souvent le vendredi soir pour retirer une commande à emporter. J'ai souvent la fainéantise de me faire à dîner. Et les burgers de Max sont les meilleurs par ici! Elle fait un clin d'œil à ledit Max qui est en fait le barman.
Un sentiment de jalousie me prend par surprise.
— Ça vous dit de vous joindre à moi pour le dîner?
Je la vois hésiter un instant. J'ai peut-être été trop direct.
— Avec plaisir, me répond-elle enfin.

Nous nous installons à une table. Elle commande une pinte de bière. Elle retire son manteau et son écharpe. J'ai soudain un flash d'elle et moi, aujourd'hui dans la bibliothèque. Je chasse rapidement ce souvenir. Je ne dois pas prendre ce chemin sinon la soirée va être une vrai torture. Avec soulagement, Annabelle prend la parole et me raconte l'avancée de son travail de l'après-midi. Nous discutons avec une telle facilité que ça en est déconcertant. Comme si nous nous connaissions depuis toujours.

La soirée passe bien trop rapidement à mon goût. La fermeture du pub nous obligent à partir. Nous marchons côte à côte, en silence, dans les rues désertes. Le ciel est dégagé et nous offre une multitude d'étoiles. Je lève la tête. Magnifique. Dans les grandes villes, on ne voit pas ce genre de choses. D'ailleurs dans les grandes villes, on ne lève pas la tête.
Annabelle m'observe.
— Vous aimez les étoiles Duncan?
Je la regarde de biais.
— Pas spécialement mais j'apprécie toujours un beau spectacle comme celui-ci dès qu'il s'offre à moi.
Elle s'arrête. Je lui fais face.
— Vous êtes un romantique qui s'ignore! s'exclame-t-elle.
— Vous avez découvert mon secret, je la taquine.

Elle pointe du doigt l'immeuble derrière moi.
— C'est ici que j'habite.
— Merci pour cette soirée Annabelle. J'ai passé un agréable moment en votre compagnie. Comme d'habitude en fait.
— Idem pour moi Duncan.

Ses yeux me supplient de ne pas partir. J'hésite un instant. Dès lors que je franchirai cette limite, je perdrai le contrôle. Je me résigne et décide finalement de tourner les talons.
Et puis merde.
Je m'approche à grandes enjambées d'Annabelle et l'embrasse à pleine bouche. Je me détache d'elle et la regarde un peu choqué de mon élan soudain. Elle a les yeux qui brillent et m'embrasse à son tour. Ce n'est pas un baiser polie ou chaste; non, c'est un baiser avide, un baiser qui dit tellement de choses.  Elle passe ses mains autour de mon cou. Je la presse un peu plus contre moi. Elle approfondit notre baiser. Nos langues se mêlent, dansent, se goûtent. Nos dents s'entrechoquent. Nos bouches s'éloignent pour reprendre notre souffle.

Sans un mot, je suis Annabelle dans son immeuble. Nous montons l'escalier et nous engouffrons dans son appartement. Elle referme la porte et je décide de me laisser aller. J'abaisse mes dernières barrières et me donne corps, cœur et âme à Annabelle.

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