La rue des Vertus était une rue étroite mais assez calme. C'était un quartier modeste.
Peut-être ne faudrait-il pas rester dans ce quartier situé non loin de l'île de la Cité car c'était son seul défaut.
Cosette tenait avec force la main de son papa, suivant la haute silhouette vêtue de noir du policier. Dans son autre bras, elle serrait Catherine et regardait autour d'elle les passants et les maisons.
Jamais, elle n'avait vu cela ! Une si grande ville avec tant de gens.
" C'est encore loin ?, demanda la petite fille pour la sixième fois.
- Mon immeuble est situé au 5, expliqua pour la sixième fois l'inspecteur Javert, essayant avec de moins en moins de succès de conserver un ton posé.
- Mais c'est loin le numéro 5 ? On est passé devant le numéro 22. C'était déjà la rue ? Mais le 22 est après le 5 ! Eponine m'a appris à compter ! Je sais les chiffres ! Le 5 est avant le 22. Donc on est passé devant ! Ou alors on est...
- Cosette !, s'écria la voix nerveuse de Javert. Il faut que tu...
- C'est encore loin ?, persista la fillette.
- Non, on n'est pas loin, répondit simplement Valjean.
- Ha bien voilà !," conclut victorieusement Cosette.
Et Valjean dut cacher son rire devant la soudaine raideur qui prit le policier, tandis que Cosette reprenait ses bavardages, au sujet des passants si nombreux et comment cela se faisait qu'ils étaient si nombreux, et pourquoi ils étaient si nombreux et où ils allaient tous...
Etc, etc, etc.
Jamais de toute sa vie, Javert ne pesta autant contre la longueur des rues.
La logeuse du policier était une femme sérieuse et discrète.
Elle accepta avec plaisir un nouveau locataire.
Elle mena Valjean dans un appartement vide, assez étroit, mais propre et doté de tout le confort nécessaire. Le prix n'était pas excessif et le logement était libre de suite.
Javert annonça simplement que son ami, M. Leblanc et sa petite fille, allaient peut-être trouver quelque chose de plus grand à un moment donné.
Bien entendu, ce fut accepté aussi. Car c'était ainsi à Paris.
On emménageait et on déménageait assez facilement.
Aussitôt que les deux nouveaux locataires et leur valise prirent possession de l'appartement, l'inspecteur Javert s'éclipsa avec un anodin :
"A bientôt, Leblanc !"
Ce fut le signal pour la logeuse d'exposer les règles de la maison.
" Les termes se payent à l'avance au début de chaque trimestre ; je peux demander à un commerçant de la rue de vous fournir en bois de chauffage ; je peux aussi commander l'eau tous les jours, mais vous devrez la monter vous-même. Ah ! Je ne fais plus de blanchissage ni de déjeuners... Mon âge, vous savez ?
- Je comprends," affirma Valjean en sortant le montant du premier terme de sa bourse.
L'argent rendit la femme plus douce, elle ajouta en souriant :
" Comme vous avez l'air fatigué tous les deux, je vais faire une exception pour le déjeuner d'aujourd'hui... Venez le chercher à midi... Et soyez les bienvenus.
- Merci, madame."
Cosette courait dans l'appartement ouvrant et fermant les portes. Il n'y avait pas beaucoup de place pour circuler, mais à en juger par l'éclat du regard de la fillette, s'installer aux Tuileries n'aurait pas pu lui causer un meilleur effet.
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Montreuil
FanfictionEt si nous revenions à Montreuil-sur-Mer ? Souvenez-vous ! Il y a la mairie et juste en face le commissariat. Il y a M. Madeleine, alias Jean Valjean, et l'inspecteur Javert. Il y a un terrible jeu du chat et de la souris... Ecrit en collaboration a...