Chapitre 20

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Je fais les cents pas dans ma chambre sous le regard inquisiteur de Yassine à deux heures du mat. Mon Dieu, deux heures. Cet enfant est officiellement un diablotin — plus que moi en tout. Le petit garçon vêtu que d'un short gris a les bras croisés comme un inspecteur de la brigade criminelle attendant ma version des faits. Qui sait ? Il va peut-être aller le dire à son oncle favori et ce dernier, qui ne souhaite même pas me voir en peinture, va me faire passer l'envie de me venger. La peur me tord le ventre mais je ne regrette rien.

Pauvre Azhar, tu t'es frottée à la mauvaise personne. Par Dieu que si elle m'avait demandé gentiment, je lui aurais cédé la place. Mais mademoiselle a décidé à jouer à la plus maligne. Moi aussi j'adore mes cheveux. Lorsque j'étais chez mes parents, je passais des heures à faire mes soins capillaires au grand damne de ma mère. « Pourquoi tu perds du temps à les faire briller si au final c'est pour en faire un vieux chignon ? » Me demandait-elle constamment. Pour la charier, ma réponse était toujours « Je les garde pour la personne exceptionnelle qui aura la chance d'avoir une personne aussi rare que moi dans sa vie. »

Ça lui faisait toujours rire car elle savait que cette « personne exceptionnelle » n'existait pas vraiment.

— La prochaine fois que tu refais un coup pareil à mademoiselle Siass sans moi, je le dis à mon oncle.

Je souffle et roule des yeux.

— Oui c'est bon j'ai compris. Elle n'a qu'à pas vouloir me faire tomber, me défends-je. C'était bien drôle, tu as vu sa tête ?

— On dirait la statut de la Liberté. On ferait mieux de nous taire avant que quelqu'un nous entende, fait Yassine en regardant la chambre de son oncle.

— Oui tu as raison. Bonne nuit !

— Bonne nuit Hazira. Demain je vais te montrer mes nouveaux jouets, crie t-il en s'en allant.

— C'est Hajira avec un J, hurlé-je à mon tour. Sal petit morveux.

Je saute dans mon lit et me rendors paisiblement, le sourire aux lèvres. Ça lui apprendra à me chercher.

***

« Il fait froid.

Très froid.

Maman, où est mon bonnet de soie ?

Je tremble. Beaucoup. Pourquoi ?

Je me sens différent.

Mon cœur vibre.

Mon âme s'enivre.

Tout devient noir.

Impossible de me rappeler la route de la foire.

Ils étaient blancs.

Je sais qu'ils étaient blancs.

Alors maintenant, pourquoi ils sont rouges ?

Maman ou est ma sendale ?

Les dalles sont glaciales.

Maman, où est mon bonnet de soie ? »

Le corps tremblant je me redresse de mon lit avec une telle rapidité que j'en ai le tournis. Malgré la climatisation actionnée, la sueur dégouline de partout. J'observe ma chambre plongée dans le noir en même temps que j'essaie de régulariser ma respiration.

Me servant un verre d'eau de la carafe que je bois d'une traite, je saisis un gilet qui traînait et sors du lit. Un coup d'œil rapide sur le réveil me signifie qu'il est trois heures du mat. Je porte mon large gilet par-dessus mon pyjama et rejoins le jardin en passant par la fenêtre de ma chambre.

Un Hiver à 100°(En Pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant