Chapitre 44

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Arrêtée devant le miroir de ma chambre, je caresse du bout des doigts le pendentif à mon cou. Dans la glace, je me revois encore toute bouleversée par cette révélation inattendue : Zayn m'aime. Même dans mes cauchemars les plus lointains, je n’aurais pas pu imaginer une telle chose. Je l'ai toujours vu comme un ami et jamais rien de plus.

Cette affaire n’aurait pas dû me préoccuper autant. Un simple "non" aurait été suffisant et je ne serais pas là à cogiter encore et encore. Serait-ce parce que je l’aime aussi ? Non, c’est impossible. Ce que je ressens quand Ayan est là est totalement différent de ce que je ressens avec Zayn. J'ai peur de ne pas avoir de justification à lui donner si je lui dis non, et pourtant...

Un aboiement me sort de mes pensées. Je tourne la tête vers Coco qui me regarde avec curiosité. Je m'abaisse à sa hauteur et commence à le caresser. Il semble apprécier puisqu'il se couche, mais malheureusement, je n'ai pas le temps. Je dois encore sortir. Cette maison est devenue trop petite pour ma mère qui me casse les oreilles avec le mariage, mon père qui est endetté et moi qui en ai marre.

Comme prévu, dès que je mets un pied hors de ma chambre, je tombe sur ma mère, parée pour une bonne dispute matinale. Elle n’en a jamais assez.

— Tu sors beaucoup ces derniers temps, tu as recommencé ton travail ?

— Non, pas encore, dis-je nonchalante.

— Eh bien, tu vas où alors ?

Je passe ma main sur mon front et regarde l’heure avant de lui dire :

— J’ai plus cinq ans m'man. Arrête de me demander tout le temps où je vais, tu deviens lourde.

— Ne me parle pas comme ça, je suis ta mère. Au lieu de passer tes journées à ne rien faire, tu devrais te trouver un mari. Hajira, tu prends de l’âge ma fille. Qu’est-ce qui t’empêche de te marier, hein ? Il y a plein d’hommes qui te veulent.

Je reste silencieuse, sidérée. Je ne comprends pas en quoi je la dérange dans cette maison pour qu’elle ne me fiche pas la paix avec le mariage.

— Bon sang m'man, pourquoi tu ne me laisses pas vivre les derniers instants en paix ?! Je ne veux pas me marier, dans quelle langue veux-tu que je te le fasse comprendre ?

Elle tape des mains et ramène rageusement ses cheveux en arrière.

— Parle en mandarin si tu veux, je m’en fiche. À ton âge j’avais déjà mon premier gosse. Dans notre famille, lorsqu’une fille dépasse vingt-cinq ans sans se marier, on accuse l’éducation que ses parents lui ont donnée. Qui te dit que tu vas mourir ? Tu es devenue une déesse maintenant ? Ton père aura bientôt la somme et tu guériras, t’entends !? Tu guériras. Alors en attendant, je vais te chercher un conjoint convenable vu que je doute fortement de ton orientation sexuelle.

Là, c'est moi qui suis choquée. Oh mais oh, le fait que je ne sois pas prête pour le mariage – ou que l'homme que j'aime ne m'aime pas – ne fait pas de moi une lesbienne, si ? Cette femme est d'un autre monde, bien qu'elle soit cultivée et instruite.

— Mais maman, laisse-la tranquille un peu, dit Myriam. Elle se mariera quand elle le voudra.

— Toi, tu la fermes et tu dégages, l'agresse ma mère.

Myriam saisit ses notes et sort de l'appartement. J'crois qu'elle va chez Olivia, la fille que j'avais croisée l'autre jour. Elles s'entendent bien vu que c'est notre voisine et qu'elles sont dans la même classe. Oui, c'est déjà le début des cours.

— Sérieusement, maman, t'en as marre de me voir ? dis-je, terriblement irritée.

— Oui, j'en ai marre qu'à vingt-trois ans, tu sois encore dans cette maison à errer comme un fantôme. Je te dis que tu vas te faire opérer et guérir alors il est temps que je prépare ton mariage.

Un Hiver à 100°(En Pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant