Chapitre 5 - Vingt-huit jours avant l'incident

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Alors que je vomissais mes tripes dans le caniveau, un million de reproches assaillaient mes pensées. Je m'en voulais tellement, c'était tout à coup insupportable. Mon corps rejetait littéralement toute cette culpabilité.

Quand je l'avais aperçu si amaigri, éreinté et désenchanté, un sentiment vif et violent avait pris possession de mon âme. Comment avais-je pu lui faire ça ? Et pire, maintenant, il pensait que je m'en fichais de lui et que je sortais sans doute avec quelqu'un. Si j'avais été à sa place, je me serais effondrée. Je n'aurais pas supporté de savoir qu'il était capable de flirter aussi librement avec une autre personne alors que je souffrais.

Même si Ben ne m'aimait pas réellement, ou tout du moins, pas comme je l'aurais voulu à un certain moment, on ne pouvait pas lui enlever que cette scène avait dû être difficile à voir étant donné ce que lui vivait.

Je tressaillis quand on m'agrippa l'épaule pour me redresser.

- Ce n'est que moi, me rassura Chris.

Je posai ma main sur la sienne et soupirai de soulagement. Même si Chris était le fiancé de mon meilleur ami, il était également un de mes plus proches amis. D'ailleurs, notre amitié avait commencé de façon un peu étonnante puisque je l'avais tout bonnement dragué dès notre première rencontre. J'avais pour objectif absolu de me le... enfin bref, de faire un très petit bout de chemin avec lui et de préférence, sans vêtement, avant de réaliser qu'il était en fait fou amoureux de Lyam et que je n'avais dès lors aucune chance. Bonne joueuse, j'avais appris à le connaitre, surtout quand mon meilleur ami nous avait quitté tous les deux pour vivre à Anvers. Nous nous étions alors beaucoup rapprochés et lui seul savait comme j'avais souffert à cette période.

- Il ne te déteste pas, tu sais.

J'ignorais comment il faisait pour me connaitre aussi bien, mais Chris avait cette faculté de s'intéresser sincèrement à son entourage et je l'aimais davantage pour cette qualité. Il savait que j'étais dans cet état à cause de Ben.

- Ouais, il m'adore, ironisai-je.

Je l'entendis presque grincer des dents. Je n'étais pas stupide, en outre, j'avais vu son air renfrogné à travers la caméra de son smartphone.

- Peut-être pas, admit Chris. Mais je suis certain qu'il ne t'en veut pas de continuer à vivre. C'était son choix de partir.

Peut-être pas totalement...

Si seulement je n'étais pas aussi lâche, je lui raconterais la vérité. Mais j'étais vraiment une trouillarde, alors, je ne dis rien. Il était hors de question que je songe à nouveau à cet instant.

- Je ne veux plus jamais le voir, plus jamais de toute ma vie, déclarai-je.

Mes propres paroles firent écho à mes souvenirs. Je chassai cette idée.

Le regard de Chris devint tout à coup plus pensif.

- Parfois, je me demande comment tu peux supporter Lyam sans profiter de ce qu'il a de meilleur à offrir et puis tu dis des trucs aussi excessifs et là, je comprends pourquoi vous vous entendez aussi bien.

Ma bouche forma un arrondi parfait sous la stupéfaction.

- Je ne suis pas excessive ! m'exclamai-je.

Mon ami s'esclaffa sans retenue.

- Jamais, non, vraiment, se moqua-t-il.

Je me détendis légèrement. Bon, d'accord, je pouvais avoir mon grain de folie également, parfois. Pas souvent, d'ailleurs. C'était très rare. Non, non, je n'étais pas de mauvaise foi.

Cœur meurtri ('Nombreux')Où les histoires vivent. Découvrez maintenant