Chapitre 36 - Un mois après l'incident

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// Anaïs

Reprendre le travail ne fut pas aussi pénible que je le pensais. Tout d'abord parce que j'en avais eu marre de tourner en rond dans ma chambre d'hôpital – au sens figuré parce que ma mobilité avait été réduite à cause d'une vilaine blessure à la jambe – mais aussi parce que j'étais contente de revoir Alicia. Elle était venue me rendre visite assez souvent, mais la revoir dans le contexte du travail, dans notre cocon, c'était différent.

En réalité, durant les heures de visite, je n'avais jamais été seule, entre ma famille, Alicia, Lyam et Ben, je n'avais pas eu une minute pour m'ennuyer. Mais pour tout le reste du temps... là, cela avait été barbant au possible.

Me voilà donc derrière mon bureau face à mon ordinateur. Mon ventre se noua d'appréhension en ouvrant ma boite-mail, je redoutais la longue liste de messages non lus qui étaient sur le point de s'afficher. À ma grande surprise, il n'y en avait qu'une petite dizaine. Je me chargeai donc de les traiter en repoussant à plus tard mes interrogations.

Quand Ethan entra dans mon espace de travail, un de mes collègues également traducteur, je sautai sur l'occasion.

- Tu sais qui s'est chargé de mes courriels pendant mon absence ?

Mon collègue avait tout d'un geek physiquement, le corps frêle, les épaisses lunettes et même les cheveux gras. En soi, je ne le connaissais pas assez pour savoir s'il l'était vraiment ou non.

- Oui, c'est moi, rétorqua-t-il timidement, Alicia s'inquiétait pour toi en sachant que tu aurais trop de travail à ton retour... Elle n'a même pas eu besoin de demander, j'ai pris les devants.

J'avais sous-estimé le béguin qu'il avait pour notre cheffe, mais je n'allais pas m'en plaindre, ça m'avait drôlement servi.

- Oh, OK, eh bien, merci beaucoup.

Ethan m'adressa un petit hochement de tête avant de repartir avec le dossier qu'il était venu chercher.

À la pause, je traversai l'open space jusqu'au bureau d'Alicia et veillai à bien refermer la porte derrière moi.

- Tu n'oserais pas te servir d'Ethan pour faire tout le sale boulot ? m'enquis-je.

Alicia releva la tête, ses larges lunettes cachant en partie son froncement de sourcil. Elle termina de pianoter sur son clavier d'ordinateur avant de me répondre.

- Pourquoi tu dis ça ?

- Il a trié et répondu à tous mes mails parce que tu t'inquiétais pour ça.

Je lui jetai un regard entendu.

- Mais non ? Sérieusement ?

J'opinai en lui faisant les gros yeux, mais elle pouffa en reprenant :

- Non, vraiment, je ne savais pas qu'il le ferait. Waouh, c'est fou, ça, je n'ai même rien demandé.

Elle eut l'air un instant songeuse et je la connaissais assez pour savoir qu'elle était en train d'imaginer tous les services qu'il pourrait lui rendre, du style, aller lui chercher un café de l'autre côté de la rue ou ce genre de trucs de flemmarde.

- Ali, n'y pense même pas !

Elle leva les yeux au ciel dans une attitude théâtrale.

- Oh, ça va, ne fais pas l'hypocrite, tu joues avec les pieds de Ben depuis un mois, le pauvre. Il exécute le moindre de tes caprices.

J'ouvris la bouche, offusquée et lui jetai dessus un M&Ms en provenance du paquet qui trainait sur son bureau.

- C'est faux ! m'exclamai-je. Je ne ferai jamais ça !

Cœur meurtri ('Nombreux')Où les histoires vivent. Découvrez maintenant