Chapitre 30 - Le jour de l'incident

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// Anaïs

« Tu ne veux plus de moi, alors, ce jour est arrivé ? ».

Je secouai la tête en essayant de chasser sa voix. Cette putain de voix qui m'avait rendue folle plus d'une fois quand elle me susurrait des insanités au lit. Mais là, quand Ben m'avait posé cette question, c'était plutôt un froid glaçant que j'avais ressenti dans tout mon être, car j'étais furieuse. Je n'avais bien sûr pas eu la force de lui dire que je ne l'aimerais plus, que c'était terminé, mais...

« Pars, s'il te plait, pars. »

« Je ne veux plus te voir » avais-je même ajouté.

Je fermai les yeux aussi fort que mes paupières me le permettraient, comme si cela pouvait effacer ce moment de ma mémoire. J'aurais donné beaucoup pour ne pas être condamnée à revivre cet instant encore et encore.

Après ça... il était parti et je ne l'avais plus revu. Je ne savais pas que ce serait la dernière fois. Oui, je pensais mes mots et réellement, il m'avait brisé une énième fois le cœur, mais de là à ne vraiment plus jamais pouvoir l'apercevoir ou être confrontée à son sourire charmeur ? Non, je n'imaginais pas ça. J'avais cru que je pourrais me perdre dans ses yeux bleus pour l'éternité et puis... plus rien.

Soudain, je pris conscience d'une chose importante. Oui, j'avais bien merdé et oui, je me sentais coupable, mais pour la première fois, plus rien ne me retenait de faire ce qu'il fallait. Tout le monde était désormais au courant pour cette relation et il était évident que c'était même devenu anecdotique étant donné ce qu'il se passait. Alors pourquoi devais-je rester passive à attendre des nouvelles ? C'était à moi de partir à sa recherche et de tout faire pour le retrouver, d'être là avec les personnes qui étaient les plus proches de lui quand il reviendrait. Une petite voix sournoise me glissa : s'il revenait... mais je décidai de la chasser et de prendre ma vie en main. J'envoyai un message à Lyam pour lui dire que je ne le rejoindrais pas ce soir et composai un autre numéro tandis que j'attrapai un sac de sport qui ferait office de bagage cabine.

- Allô ? répondit une voix masculine, fatiguée.

- Je veux venir l'attendre avec vous, annonçai-je de but en blanc.

Il y eut un silence au bout du fil et puis :

- Mantis ?

Je souris – pour la première fois depuis combien de temps, déjà ? - en entendant l'étonnement de Malone. Ouais, j'aurais peut-être dû m'annoncer.

- Oui, c'est bien moi. Je vous rejoins au Mali. Je t'appelle quand j'atterris à Bamako ? Je ne sais pas quand je pourrai avoir un vol, mais je camperai à l'aéroport s'il le faut.

Au nouveau silence qui s'installa, je compris que quelque chose clochait.

- Tu peux venir, évidemment, mais on n'a aucune nouvelle, c'est à peine si on nous répond quand on pose des questions à l'ambassade.

Eh bien au moins, je savais que je savais à quoi m'en tenir.

- Ce n'est pas un problème, je fais au plus vite.

- D'accord, mais ne te fais pas trop d'espoir, me conseilla-t-il.

J'entendais dans sa voix qu'il était déjà résigné, qu'il s'attendait au pire et même qu'il en était peut-être déjà convaincu. Mon cœur souffrait également pour Malone, pour cet homme qui en avait sacrément bavé dans la vie. Il ne pouvait pas perdre son meilleur ami, ça aurait été trop injuste, il méritait bien mieux. Quant à moi... je ne pouvais pas réellement dire que j'avais souffert plus qu'une autre personne. Ça aurait été injuste alors qu'on m'avait offert une vie de privilégiée, mais il y avait certaines choses qui m'avaient toujours ôté le sentiment de bonheur que l'on ressent lorsque l'on est complet. Voilà, c'était ça, je n'avais jamais été complète, il m'avait toujours manqué certaines choses pour l'être.

Cœur meurtri ('Nombreux')Où les histoires vivent. Découvrez maintenant