Cœur meurtri ('Nombreux')

Chapitre 11 - Huit ans avant l'incident

// Anaïs

Ma mère allait me tuer, c'était sûr et certain. Je n'aurais peut-être même pas le temps de franchir le seuil de la porte que je serais déjà morte et enterrée. Je devais reconnaitre que depuis l'accident de l'année dernière, elle était beaucoup plus indulgente, mais de là à accepter ça... Je ne savais toujours pas ce qui m'avait pris de sauter le pas.

- Tu es la perfection incarnée.

Ah, si, je le savais, en fait. Mon abruti de meilleur ami me poussait toujours à faire les pires folies – enfin, ce qui était des folies de mon point de vue de jeune fille rangée.

- Maman va criser.

- À mort, me confirma le reflet de Lyam, la mine grave.

Nous étions tous les deux face au miroir en pied de l'appartement dans lequel il vivait. Lyam n'était toujours pas revenu chez ses parents et à dix-sept ans, je doutais qu'il le fasse un jour. Il logeait chez son frère et sa belle-sœur qui avaient choisi expressément de louer un appartement qui incluait une chambre pour lui. Je savais que mon meilleur ami avait toujours des contacts avec son père et qu'il envisageait de travailler cet été chez Lacombe Car Safe, leur entreprise familiale, mais avec sa mère, c'était très compliqué.

Les choses avaient beaucoup changé en un an. J'osais à présent dire ce qui me dérangeait et poser mes limites, je n'étais plus en adoration totale devant mon meilleur ami, mais il prenait la première place dans ma vie malgré tout.

Je lui jetai un regard noir et lui adressai une tape sur l'épaule.

- Tu es le pire !

Il éclata de rire.

- Je plaide coupable.

Alors que j'examinai les mèches violettes qui recouvraient la totalité de mon crâne, je grimaçai. Quand j'étais sortie de chez la coiffeuse, j'étais confiante et j'adorais cette couleur, mais maintenant que j'allais devoir l'assumer sous d'autres regards que celui de Lyam, je paniquai. Non seulement je craignais les remontrances de mes parents, mais c'était une date importante aujourd'hui et j'allais voir une autre personne qui accaparait depuis quelque temps toute mon attention. Que penserait-il de ce changement ?

- J'ai l'air encore plus jeune comme ça, non ? m'enquis-je.

Lyam expira bruyamment et en me retournant vers la source de ses râles, je constatai qu'il était en train de soulever des haltères. Je levai les yeux au ciel. Depuis qu'il assumait ouvertement sa sexualité, il s'était mis en tête d'être le mec le plus attirant de la ville. Comme s'il avait besoin de ça...

- Non, tu as l'air encore plus stylée, c'est cool, répondit-il entre deux inspirations.

Je tirai une moue dubitative.

- Mais les gens vont me trouver bizarre, contrai-je. Ils vont me juger...

Il ricana et posa les poids au sol pour me rejoindre. Lyam passa une main sous mon menton afin que j'ancre mon regard au sien.

- Évidemment qu'ils te jugeront. Ils auront raison, c'est la seule chose qu'ils peuvent faire en voyant une fille aussi sûre d'elle avec un look aussi incroyable et unique. Eux qui n'ont aucun gout et des vies insipides... mais n'oublie pas, tu es une reine parmi tous ces manants !

Je m'esclaffai sans aucune grâce. J'adorais beaucoup trop sa folie.

- Il faut que tu arrêtes de regarder des séries historiques, me moquai-je.