Chapitre 23 - Trois jours avant l'incident

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// Ben

Je me réveillai péniblement, les jambes engourdies, les paupières lourdes et la mâchoire pâteuse. Et que dire de cette sensation de tiraillement sur toute la chair de mon corps ? De ce mal de crâne qui me percutait encore et encore comme si je recevais des coups en permanence ? 

Je tentai de bouger, mais ce fut impossible de m'exécuter. Alors à la place, je laissai échapper un geignement de douleur, discret cependant et contenant toute ma frustration. Une fois le sentiment d'impuissance passé, je me concentrai sur mon environnement et tentai d'ouvrir les yeux malgré la douleur lancinante à la tête. J'entendais des chuchotis autour de moi, des voix de femmes, des claquements d'ustensiles dans ce que j'imaginais être des marmites ainsi qu'une forte odeur d'herbes ou d'épices. Je n'étais pas un prodige de la cuisine, mais cela me faisant penser à cela. Je compris très vite que mes oreilles ne me faisaient pas défaut et que c'était une langue étrangère qui était parlée.

J'essayai de me redresser une fois de plus, mais l'effort était beaucoup trop douloureux et je ne me sentais pas en danger immédiat. Mon instinct me dictait que je me trouvais dans un lieu sécurisant. J'attendais donc de regrouper un peu plus de forces avant de réitérer.

Quelques minutes ou plusieurs heures passèrent, je ne sus pas très bien – j'étais plongé dans un sommeil sans rêves – je me réveillai la gorge totalement sèche. J'avais besoin de boire au plus vite. Étonnamment, je réussis à lever la main et à gémir quelque chose d'audible. Des voix se firent entendre, quelqu'un me souleva légèrement tandis qu'une autre personne versait de l'eau dans ma bouche. La brûlure fut apaisée et je poussai un soupir de soulagement. Je fus ensuite reposé et alors que je pensais que c'en était fini de mes soins, je sentis qu'on soulevait le vêtement que je portais et que quelque chose était étalé sur ce que j'imaginais être des plaies. La douleur de ce contact se répandit dans tous mes nerfs et obligea mes yeux à s'ouvrir alors que mon corps bondissait sous les assauts réguliers. Je fus retenu par plusieurs mains et je reconnus qui s'affairait à me maintenir en vie.

Car, oui, c'était évident à présent et tout me revenait par flashs. Nous avions été attaqués par surprise et j'avais été soufflé par l'explosion de nos armes. On m'avait ensuite assommé, du moins, c'était ce que j'imaginais et j'avais dû perdre connaissance à cet instant. Je ne voulais pas penser au nombre d'amis que j'avais dû perdre ni à tous les autres qui avaient trépassé dans cette attaque. Pourquoi moi je n'étais pas encore mort ? Je n'en avais aucune idée, peut-être avais-je tout simplement une bonne étoile qui veillait sur moi. La première image qui me vint en pensant ça fut celle de ma mère, si douce et tendre avec moi, si patiente quand je faisais des erreurs. C'était peut-être elle, mon ange protecteur.

Je serrai les dents pour résister, pour forcer mon corps à se laisser soigner par ses femmes que je connaissais et que j'avais tenté de protéger les derniers mois durant. Elles avaient toujours été méfiantes envers moi, envers nous tous. Elles ne nous approchaient pas et fuyaient notre regard la plupart du temps, mais je donnais généralement mes portions de nourriture à leurs enfants et leur apprenais à jouer au football quand j'avais du temps libre. Était-ce pour ça qu'elle m'avait aidé ou même carrément sauvé ?

Luttant pour ne pas m'évanouir à nouveau, je me concentrai sur mes respirations afin d'atténuer la douleur. Je me risquai ensuite à jeter un œil à mes plaies.

Je n'aurais pas dû.

Putain. Je n'aurais clairement pas dû.

J'avais des pans entiers de peau à vif, mais également des perforations cutanées, peut-être dues à des éclats d'armes qui s'étaient enfoncés dans la chair. Quoi qu'il en soit, ce n'était vraiment pas beau à voir. Je retins la bile qui menaçait de déborder de mes lèvres. Ce n'était certainement pas le moment de me vomir dessus et d'ajouter de l'acidité à tout ça. En outre, je ne pouvais pas manquer de respect à mes bienfaitrices en leur régurgitant dessus.

Cœur meurtri ('Nombreux')Où les histoires vivent. Découvrez maintenant