Chapitre 39c : Dévouement

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Trahison et fascination, deux choses totalement différentes à mes yeux.
Je n'étais pas née dans cet autre monde d'où venaient tous les aventuriers mais pour moi, eux, étaient les vrais héros.
Et c'est en haut de ce clocher que j'ai fait un acte que je ne regretterai jamais.

Lorsque les premiers aventuriers sont venus dans notre monde, j'ai fait la rencontre de deux d'entre eux.
À peine âgée de quelques années, j'ai vu l'ancien roi d'Ernistère qui devait se défendre contre l'envahisseur.
D'une requête postée à la guilde des aventuriers, il leur avait fait part d'une future attaque des gnolls envers notre nation.
Bien qu'ils étaient peu à avoir le niveau requis pour nous porter main forte, un pugiliste et un magicien sont arrivés pour nous sauver.
Ma maison était en feu et face à ces monstres à moitié humains avec une tête de hyène, et au moment où mes parents allaient être tués de leurs masses, d'un coup de poing, quelqu'un en a envoyé un s'écraser contre le mur.
Lorsque j'ai vu ses cheveux gris, son regard dénué d'expression croisant le mien alors que je pensais que j'allais tout perdre, j'ai vu ce qu'était la tristesse incarnée.
Sans compter son regard ou son apparence, il m'a dit que j'avais beau avoir la peau noire, une mer de tristesse dans mes yeux, les éclats de joie que j'avais en le voyant étaient si brillants qu'il n'était pas capable de continuer à me regarder de face et a détourné les yeux avec un léger rougissement sur son visage.
Il ne m'aura fallu qu'une fraction de seconde pour développer de l'empathie envers mon sauveur.
Grâce à eux, les démons ont repoussé l'assaut gnoll et ils ont été élus comme héros des nôtres, où l'un aura même été nommé général, bien qu'il était le bras droit de celui qui m'avait sauvé la vie.
Ce magicien qui est resté avec nous, bien qu'il était humain à la base, grâce à sa bravoure et son courage, n'a pas hésité à perdre son humanité pour nous sauver, le changeant en déchu.
Le second était si fort que même sans utiliser ses pouvoirs, personne ne pouvait rivaliser avec lui.
Et malgré son immense tristesse, alors que tout brûlait autour de nous, de sa main recouverte de sang qu'il m'a tendue, pour la première fois, je retrouvais fois en l'humanité depuis que toi, Andréalle, tu étais partie sans que je ne puisse te retrouver.
Il nous a laissé son nom mais a demandé à ce que jamais il ne soit divulgué quelque part.
C'est pour ça que seul le nouveau général démoniaque avait son nom dans les livres d'histoire.
Et c'est lorsque tu as dit qu'il était un traître pour notre nation, Andréalle, que ça m'a fait un coup au cœur, si fort que j'en ai eu les larmes aux yeux, ainsi qu'un mal que je ne voulais pas te montrer.

C'est bien des années après le sauvetage d'Ernistère, lorsque j'ai été emprisonnée avec Zhin que je l'ai revu pour la seconde fois.
Il était accompagné de deux hommes de sa guilde et cette fois-ci, son regard était bien plus sadique mais à nouveau, son expression n'était pas dénuée d'un quelconque sentiment.
"Vous êtes bien Ernesto, n'est-ce pas? Lui ai-je demandé, avec le même éclat que la première fois que je l'avais vu.
C'est vous qui avez sauvé mes parents et Ernistère il y a-" Voulais-je terminer.
Bien des années plus tard, il était encore plus rapide que dans mes souvenirs.
En moins d'un instant, il avait réussi à mettre sa main devant ma bouche pour m'empêcher de parler.
"Ne dis pas un mot de plus, s'il te plaît. M'a-t-il murmuré.
Si j'ai souhaité que mon nom soit rayé de l'histoire, c'est pour que personne ne soit au courant de ce qui est arrivé à ce moment-là, c'est bien compris? Finit-il en enlevant lentement sa main.
-Il sera fait selon vos ordres." Ai-je répondu calmement mais où ma joie et ma fascination pour cette homme à qui je devais tout, étaient si dures à maintenir au fond de moi.
Nous avons échangé un sourire mutuel mais discret, avant qu'il ne se remette au niveau de ses membres de guilde.
Et juste avant de fermer la porte de la cellule de prison, il a demandé à ses hommes de bien vérifier que nous ayions à manger comme à boire tous les jours et que l'on soit gardés avec le respect qui nous était dû.
Face à l'incompréhension, Zhin m'a directement demandé ce qu'il se passait.
J'ai essayé de feindre l'ignorance mais rapidement, nous avons été libérés de notre cage respective mais nous devions rester dans la cellule où on était confinés.
Ce n'était peut-être pas grand-chose mais ce que mon sauveur faisait pour moi, comptait plus que n'importe quoi.
Ernesto était le seul homme que j'ai jamais aimé.
J'ai eu à menacer Zhin pour qu'il ne te dise pas un seul mot sur cette histoire et c'est lorsque vous êtes venus nous sauver qu'on nous a gentiment demandé de retourner dans notre cage afin d'être à nouveau enchaînés.
Mais il y avait autre chose de bien plus important que tout ça.
Il m'avait donné la raison pour laquelle il était tel qu'il était envers moi et personne d'autre.

Quand tu t'es fait passer pour une aventurière et que tu voulais rejoindre la guilde des Croix inversées, j'ai sauté sur l'occasion dans l'espoir de pouvoir être utile à mon sauveur.
C'est là qu'à nouveau, j'ai eu la possibilité de le revoir.
Je ne tenais pas en place et n'ai pas pu m'empêcher de l'observer avec insistance.
Lorsque nos regards se sont croisés, il a demandé à ce qu'on nous laisse seuls car il voulait montrer l'exemple à la nouvelle que j'étais.
Bien que pour les autres ça s'apparentait à du bizutage, en réalité, il souhaitait simplement me parler.
Lorsqu'il m'a demandé la raison de mon déguisement, je lui ai avoué toute la vérité.

C'est à Délilia, lorsque Zhin a eu vent de ma localisation, qu'il est venu me voir pour me dire qu'il ne souhaitait plus te cacher la vérité, Andréalle.
Incapable de permettre que ça ne puisse venir terner la réputation d'Ernesto, je l'ai mis aux arrêts avant de l'emmener voir mon sauveur qui devait juger de quoi faire de lui.
Je suis montée avec le singe jusqu'en haut du clocher, là où se trouvait le chef de guilde et lui ai tout expliqué.
Énervé de ce qu'il pouvait arriver si la situation venait à se savoir, il l'a torturé maintes et maintes fois mais ne voulait pas le tuer.


Et c'est pour protéger l'avenir de mon sauveur, que j'ai décidé de mettre fin aux jours de Zhin, quitte à être haïe de toi, ma meilleure amie, pour cet homme que j'aimais du fond du cœur et qui voyait en moi sa petite sœur à l'hôpital ...
Sachez que je suis désolée pour tout ...
Je vous aime, Andréalle et Ernesto.
Adieu.


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