27. Avoir peur

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- Ma roseraie, tu es sûre que tout va bien ?...

- Puisque je te dis que oui Vista. coupa Désirée d'un ton agacé.

- Hum... si tu le dis.

Le commandant de la 5ème flotte l'embrassa sur la tempe, complétant sa réponse par ce simple geste. Ces lèvres froides et humides se collèrent tendrement à sa peau glacée, faisant naitre une énième alchimie entre eux.
Lui contenait une part de flamme, l'une de ces flammèches bleues plus brûlantes que le feu rouge malgré tout ; encore plus que ce fils du Roi des pirates.

Mais elle, elle ; elle était vide. Vide de tout.
Ne restait que son cœur dénué de bonheur, de vie et surtout, de chaleur.

Il lui semblait que ce sentiment glacial avait toujours été présent, ne l'avait jamais vraiment quitté.
Il était ancré en elle.

Dans ses os, en sa chair. Dans son regard gris impénétrable, dans la rondeur de ses formes, la rougeur de ses lèvres

Désirée cligna des yeux. Et les ancra dans la glace de la salle de bain privée qui les abritaient du reste du monde.
Son reflet lui fut renvoyé.

Celui d'une grande femme à la crinière brune agrémentée de quelques mèches qui seraient de toute évidence éternellement décolorées. Une femme nue à la peau blanchâtre.
Une femme soupirante et fatiguée. Une femme aimée malgré tout.

Ce reflet c'était le sien.
Celui qu'elle portait depuis bientôt sept jours. Celui qu'elle n'arrivait pas à quitter depuis que Marshall.D.Teach l'avait approchée dans l'intimité de la réserve.

Il lui avait dit nombres de choses. En avait fait d'autres. Et certaines d'entre elles étaient plus ancrées que les autres. L'infirmière avait beau essayer, essayer avec toute la force que pouvaient bien porter ses convictions ; elle n'y arrivait pas.

Ses pensées se ressassaient, se répétaient. Elles l'enchainaient.
Et parfois, il lui semblait qu'elles étaient insurmontables.
Ce pirate ne s'en était pas rendu compte, bien évidemment. Mais certains de ces mots avaient plus touchés que les autres.

- Tu es belle mon amour.

- Vista...

Et puis il y avait lui, bien évidemment. Cette épée fleurie qui ne cessait d'être fidèle à lui-même. Qui lui faisait ressentir profondément, jusque dans sa chaire la plus intime à quel point ils étaient différents, à quel point il était droit et surtout ; à quel point il l'aimait et la chérissait.

Certaines de ces boucles sombres atterrirent comme à leur habitude dans le creux de son cou alors que lentement, il traçait du bout de ses doigts attentionnés les formes de son corps.

De la base de son cou blanc, comme marqué au fer blanc par la pluie de baisers qu'il déversait sur elle la nuit venue ; parfois ils n'attendaient même pas cette lune bienvenue pour se retrouver. Après tout il s'agissait du cycle naturel de la vie qui leur était imposé.

Mais pourquoi donc, finalement fallait il tant le suivre ? Ce n'était qu'un ordre inconscient de plus. Un de ceux qui dictaient le bon sens commun. Un de ceux qui quelque part, avaient fait d'eux des rejetés sur le monde aux cinq mers. L'un de ceux que cette merveilleuse Justice et ces doyens encourageaient, pour le meilleur des mondes ; pour l'équilibre.

Puis, il arriva à ses épaules nacrées.
Désirée se trouvait trop pâle, trop maigre. Mais dans les yeux de Vista tout ses défauts, ses yeux immondes, ce corps immense et fin, cette barrière interne qu'elle s'était construite ; tout cela devenait les plus beaux des attributs.

Mon épée fleurieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant