Mon épée fleurie

17. Une dure réalité

Deux semaines.
Cela faisait deux semaines que Désirée avait cédé.

À ses pulsions. À ses désirs.
Vista l'avait embrassée.

Et elle n'avait pas résisté.
Encore pire, elle avait aimé.
Elle en avait profité.
Ce baisé, elle l'avait savouré.

Mais elle avait pris une décision qu'elle comptait bien tenir.

Ce n'était rien de plus qu'un dérapage, que le seul écart qu'elle ne s'autoriserait jamais.
Il n'y aurait pas de seconde fois avec Vista. Où avec qui que ce soit d'ailleurs. Car si ce n'était pas avec lui, alors ce ne serait avec personne.

La femme brune se sentit rougir furieusement alors que son esprit dérivait de nouveau. Sur lui.
Ces prunelles brillantes, remplies d'un amour qu'elle ne méritait pas à son égard. Ces boucles sombres qu'elle souhaitait saisir à pleines mains, caresser sous ses doigts habitués à la manipulation des médicaments.

Ces lèvres pleines, si souvent étirées en un doux sourire.
Cette mâchoire ferme et puissante qui avait dirigé leur baiser avec force et tendresse. Elle frissonna du haut de la tête jusqu'au bout des orteils, ses mèches brunes glissant sur ses épaules d'une manière incontrôlée.

Il fallait qu'elle se reprenne.
La native de West Blue s'était répété cette phrase bien trop souvent à son goût lors des quinze derniers jours.
Cela et l'imposition dans son esprit de l'image d'Eris. Il s'agissait du dernier rempart qui la retenait de s'effondrer totalement. Qui l'empêchait de courir à sa perte, vers cet amour, à son bonheur-

Non. Non. Non.
Il n'y aurait pas de bonheur entre les bras de Vista. Seulement une chimère de plus qui la dévorerait, ne laissant d'elle que les os, ainsi que son corps noyé partant à la dérive dans la mer redoutable du Shin Sekai. Entrainant avec elle les cadavres de son frère et de sa sœur dont les vies reposaient sur ses épaules.

Alors faisant fit des tremblements incontrôlés s'invitant dans son corps, Désirée se concentra sur son travail. Elle ne faisait que cela ces derniers jours.
Pour s'occuper l'esprit, pour ne pas penser à toute cette histoire qui la détruisait de l'intérieur. Elle aimait le commandant de la 5ème flotte de l'Empereur pirate Barbe Blanche.

Elle l'aimait vraiment.
Elle souhaitait qu'il l'écoute jusque tard dans la nuit.

Qu'il la serre dans ses bras.
Qu'il l'embrasse de nouveau.

Qu'il la touche.
Qu'il la regarde de ses yeux brillants d'affection le matin au réveil, le midi sous le soleil brulant frappant le navire, le soir entre deux coupes d'alcool et la nuit lorsqu'il lui ferait l'amour.

- Les herbes de Teletir pour la grippe de Benjé. Les herbes de Teletir...

- ...

- Les herbes de Teletir.

Seul le silence lui répondit.
Un qu'elle se sentait obligée de remplir. Un qui contemplait son visage rouge de honte, ses prunelles brillantes d'envie et ses pensées les plus secrètes.

Désirée avait souvent imaginé des choses et d'autres avec Vista. C'était évident, elle se savait amoureuse depuis longtemps après tout.
Parce qu'elle haïssait quand il se rendait si rarement dans ces maisons closes avec certains de ses frères. Parce qu'elle était heureuse quand elle le regardait, encore plus quand elle lui parlait. Il avait toujours réveillé des sentiments en elle, et c'était suffisamment étrange pour le notifier.

Mais maintenant... oh par Roger, maintenant... Il avait fait naitre quelque chose d'autre, et de plus grand encore ; un sentiment qu'elle ne se souvenait pas d'avoir même jamais ressenti.
La passion. Une envie de lui qu'elle ne pouvait satisfaire que d'une seule manière.